Des choix politiques à leur traduction technique

Bruno Carrère, maire d’Uztaritze, vice-président de la CAPB en charge de la stratégie d’aménagement durable du territoire – Planification urbaine, patrimoniale et publicitaire

Depuis la création de la Communauté d’Agglomération Pays Basque, la compétence de la planification urbaine est exercée par la CAPB en lien étroit avec les communes. Pour Enbata, Bruno Carrère nous explique les échéances et enjeux des futurs Plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI).

Enbata : Avant d’entrer dans la méthode et les échéances importantes, pouvez-vous nous rappeler ce qu’est un PLUi ?

Bruno Carrère : Jusqu’à maintenant, nous avions l’habitude de voir des documents d’urbanisme à l’échelle municipale, que ce soit une carte communale ou un Plan local d’urbanisme (PLU), à l’exception du PLUi du Pays d’Hasparren. Dorénavant, ces documents s’élaborent à l’échelle intercommunale. Ces PLUi sont des documents d’orientation, véritables boîtes à outils pour organiser l’aménagement du territoire et en faire le réceptacle de nos politiques publiques (habitat, mobilités, activités économiques, environnement…). Ce sont des outils de planification qui traduisent les choix politiques portés par les élus.

Les PLUi doivent viser à assurer une planification durable du territoire, prenant en compte les besoins des habitants, mais aussi les ressources du territoire. Un des enjeux majeurs est de conjuguer les dimensions sociales, économiques et environnementales au regard d’autres défis tout aussi importants, comme la gestion économe de l’espace et la lutte contre l’artificialisation des sols.

Où en est l’élaboration des PLUi ?

Il faut rappeler que notre objectif est que l’ensemble des 158 communes du Pays Basque Nord soient couvertes par des PLUi. Par défaut, il en existe un seul à l’échelle du territoire intercommunal. La spécificité de la CAPB, de par sa taille, sa superficie et le nombre de communes aux typologies différentes, nous a amenés à demander et obtenir une dérogation préfectorale afin de répartir le territoire en cinq PLUi.

Dès 2021, nous avons lancé les travaux concernant les trois PLUi du Pays Basque intérieur. En effet, il y avait urgence à avancer car une cinquantaine de communes de ce secteur ne disposaient d’aucun document d’urbanisme. Autrement dit, elles étaient soumises au Règlement national d’urbanisme (RNU) et non pas à des règles fixées localement. Le calendrier que nous nous sommes collectivement fixé vise à approuver ces trois PLUi de l’Intérieur avant la fin de ce mandat. Les deux autres PLUi, Labourd-est et Labourd- ouest, seront approuvés début 2028.

Comment se passe la préparation d’un tel document ?

Il passe par trois étapes essentielles en Conseil communautaire, et bien entendu au sein des communes concernées : Plan d’aménagement et de développement durable (PADD), arrêt (puis enquête publique) et approbation qui le rend exécutoire.

L’étape initiale consiste donc à élaborer un diagnostic de départ et un PADD. Celui de Soule-Xiberoa a été débattu en décembre dernier en Conseil communautaire. Les deux autres PADD de l’Intérieur viendront devant l’assemblée intercommunale au premier semestre 2024.

PLUI d’Iparralde.

Les trois PLUi du Pays Basque intérieur sont prévus pour être arrêtés cette même année 2024 et approuvés en 2025, soit avant la fin du mandat. Les deux PLUi labourdins, dont de nombreuses communes sont déjà couvertes par des PLU communaux, voire un PLUi en ce qui concerne le pays d’Hasparren, seront approuvés au plus tard début 2028.

La méthodologie retenue a pour ambition de construire ces documents de manière collaborative et transversale. Certes, la compétence est intercommunale, mais les mairies gardent un rôle prépondérant dans le travail de définition du règlement ou encore du zonage. De la même manière, bien que cette compétence concerne le service de planification urbaine, il est impossible de fonctionner en vase clos. À ce titre, les directions telles que l’économie ou la transition écologique par exemple, sont pleinement associées à l’exercice.

Comment assurer justement que toutes les parties prenantes puissent contribuer ?

Le choix s’est porté sur une gouvernance partagée dans l’élaboration de ces PLUi. Je le disais, les communes, les pôles territoriaux et les directions thématiques de la CAPB sont associés à la réflexion politique. Les élus du SCOT (Schéma de cohérence territoriale) qui préparent eux aussi un nouveau schéma dont le contenu s’appliquera aux futurs PLUi, participent aux travaux. En effet, chaque PLUi dispose d’un élu référent qui occupe un poste de vice-président du SCOT. C’est cette articulation et collaboration qui permettra de constituer des documents cohérents et efficaces. Sur la partie technique aussi, la gouvernance se veut transversale. Nous avons fait le choix fort de mobiliser les compétences du territoire, plutôt que de faire appel à des cabinets extérieurs pour accompagner tout le processus de A à Z. Nous disposons en Pays Basque d’acteurs comme l’AUDAP, l’APGL, la Chambre d’agriculture, EHLG, qui ont une connaissance du territoire et un savoir-faire technique.

Vous parliez du SCOT en cours d’élaboration. Comment éviter que ces documents travaillés concomitamment ne soient finalement en contradiction ?

Justement, les calendriers sont articulés de manière à mener les réflexions en parallèle. Nous sommes particulièrement vigilants sur le fait que ces réflexions soient partagées et croisées au maximum. Il existe une hiérarchie des documents d’urbanisme : les PLUi doivent intégrer les orientations du SCOT, qui lui-même doit obéir aux choix du SRADDET (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires).

Le travail collectif est permanent entre nous pour voir ce que l’on prend en compte en matière de consommation foncière par exemple, ce que l’on compte, comment on le compte. Nous nous assurons de toujours parler de la même chose et d’être en permanence sur les mêmes bases de travail. Ce travail collaboratif est rendu d’autant plus nécessaire que la loi Climat et résilience (et son objectif de Zéro artificialisation nette dont on parle beaucoup) nous impose un cadre très strict.

Il faut également redire que les PLUi sont la traduction en documents de planification des choix politiques et du projet territorial de la collectivité. Ces dernières années, un certain nombre de plans stratégiques ont été travaillés et adoptés par les élus du territoire : Plan local de l’habitat (PLH), Plan des mobilités (PDM), Plan climat-air-énergie territorial (PCAET)… Toutes ces feuilles de route constituent une base de départ, des orientations que nous avons fixées et auxquelles les PLUi devront répondre.

Visuels utilisé dans le cadre de l’élaboration du Plan Local d’urbanisme en Xiberoa

Depuis quelques années, les questions de logement, de tourisme, de foncier agricole occupent bon nombre de discussions et réflexions politiques. Comment les PLUi viendront-ils répondre à ces inquiétudes ou attentes du territoire ?

Dans un premier temps, il faut souligner que nous évoluons dans un cadre législatif et réglementaire qui a bougé ces dernières années. Les questions de consommation foncière ou d’artificialisation des sols sont des sujets omniprésents dans nos travaux. Mais au-delà du cadre légal, il y a également nos choix politiques. Nous menons un travail de dentelle avec les élus municipaux qui connaissent au mieux leur territoire municipal. Nous parlons de croissance démographique, de foncier économique, agricole, d’espaces naturels… Par exemple, aux COPIL des trois PLUi du Pays Basque intérieur, nous avons étudié la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers sur la décennie 2012-2021. Nous y avons intégré les données 2022 et 2023 et c’est en fonction de tout cela que nous avons dressé des objectifs par polarité, en allant au plus précis et permettant de sortir des chiffres déclinés à l’échelle communale.

Nous sommes sur un territoire attractif qui a besoin d’héberger la population, mais également de lui offrir des services. Nous devons aussi préserver la ressource en eau, développer l’activité économique de manière équilibrée sur le territoire et avoir une stratégie qui préserve le foncier agricole. Élaborer un PLUi, c’est fixer un cap collectif, un horizon commun en gérant parfois les contradictions entre la volonté des élus au niveau municipal et la vision d’ensemble, ou encore entre les usages différents présents sur le territoire. Un PLUi est le réceptacle de toutes les politiques publiques. À ce titre, les travaux en cours sur ces documents d’urbanisme sont en train de définir les objectifs que nous nous fixons pour les prochaines années : ils dessinent déjà les paysages, la sociologie et le territoire du Pays Basque pour les prochaines décennies.

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