Avec la création de la CAPB, première institution englobant tout le Pays Basque nord, l’aménagement de ce territoire peut enfin se concevoir de manière globale et cohérente. Encore faut-il que les élu.es et technicien.nes se saisissent réellement de cette opportunité et fassent preuve de courage et d’ambition… et que la société civile suive attentivement ces procédures et travaille à y faire bien intégrer ses propres priorités.
Ces derniers mois, Enbata a largement ouvert ses colonnes à de nombreuses contributions ou points de vue évoquant les différentes procédures en matière d’urbanisme (SCOT, PLUi…) en pointant le rôle essentiel qu’elles pourraient ou devraient jouer en matière d’organisation de l’habitat, des activités économiques et de transition écologique en particulier. L’enjeu est en effet central et il est toujours primordial de communiquer et d’échanger sur ces procédures au-delà du cercle des élu-e-s et des organismes en charge de leur animation. Ces dispositifs et les décisions qui y sont prises impactent au fil des ans de manière très forte la vie quotidienne des tous les habitant.e.s, sans que nous n’en ayons forcément conscience au jour le jour. Dans le panel des responsabilités confiées aux communes et aux intercommunalités, l’élaboration et le suivi de ces documents d’urbanisme fait sans conteste partie des compétences qui modèlent le plus notre cadre de vie.
Un premier enjeu d’ordre démocratique
Malheureusement, ces procédures sont souvent arides pour le grand public du fait de la technicité sur laquelle elles s’appuient, et leur appropriation par le plus grand nombre s’en trouve largement freinée. Il est, d’un point de vue démocratique, assez paradoxal de constater, ici comme ailleurs, ce décalage entre d’un côté, l’enjeu de cette politique publique pour les habitant-e-s et d’un autre côté, le périmètre restreint des personnes (essentiellement militantes) qui y accordent l’intérêt qu’il devrait pourtant éveiller auprès de tous. La difficulté de l’exercice ne devrait pas pour autant dispenser les personnes en charge de l’élaboration de ces outils, des nécessaires efforts à déployer pour partager avec le plus grand nombre les enjeux de ces dispositifs. Des initiatives allant dans le sens d’une plus grande concertation existent bien mais elles dépassent rarement le cadre réglementaire existant. Sur des sujets aussi techniques que ceux-là, les temps de concertation ont un impact forcément limité s’ils ne s’appuient pas sur des démarches préalables de vulgarisation à plus grande échelle, impliquant entre autres les médias. Merci à ce titre à Enbata d’apporter sa pierre à cet effort de démocratisation.
Un calendrier nourri…
Cet enjeu démocratique est d’autant plus important à souligner aujourd’hui en Pays Basque que l’actualité en matière de procédures d’urbanisme s’avère particulièrement riche. Les trois PLU intercommunautaires concernant le Pays Basque intérieur (Soule / Amikuze / secteur Iholdi- Oztibarre-Garazi-Baigorri) sont largement engagés et avaient pour objectif à leur démarrage d’être adoptés avant la fin du mandat en cours. Les deux PLU intercommunautaires concernant la zone côtière pour l’un et le Labourd intérieur pour l’autre ont également démarré en vue d’une adoption en 2028. Bien qu’incluses dans le périmètre du futur PLUi Labourd littoral, les communes de l’ex- ACBA ont relancé récemment un PLUi initié en 2015, resté en sommeil pendant plusieurs années, dans l’objectif de le faire adopter en 2025. Le SCOT organisé à l’échelle de l’ensemble du Pays Basque et du Seignanx est lui aussi largement engagé et vise une adoption pour la fin de l’année 2025. Soit au total sept procédures en cours englobant l’ensemble du territoire Pays Basque.
« L’enjeu démocratique autour des procédures d’urbanisme
est d’autant plus important aujourd’hui en Pays Basque
que l’actualité en la matière s’avère particulièrement riche. »
On ne répétera jamais assez au passage, l’impact décisif de la création de la CAPB en 2017, permettant de dépasser des périmètres précédemment trop morcelés pour traiter avec efficacité les problématiques d’aménagement et de pouvoir réfléchir et organiser ces documents d’urbanisme sur des échelles bien plus pertinentes.
…qui génère des opportunités à saisir
La simultanéité de ces procédures présente par ailleurs de nombreux intérêts puisqu’elle permet de croiser les analyses, de mettre en oeuvre des orientations cohérentes sur l’ensemble du Pays Basque tout en permettant de prendre en compte les spécificités territoriales de chaque secteur concerné. Les habitant- e-s du Pays Basque auraient du mal à comprendre que les responsables élue- s et technicien-ne-s de ces procédures ne se saisissent pas de cette opportunité temporelle pour avancer de manière concertée sur le fond et le contenu des orientations. Ce point de vigilance vaut en particulier pour le nécessaire dialogue à rechercher entre les PLUi et le SCOT dont l’adoption est prévue à la même échéance de la fin de mandat. L’activation de ces procédures sur l’ensemble du Pays Basque présente aussi le double intérêt de doter de documents d’urbanisme des zones qui en étaient jusqu’ici dépourvues, en particulier en zone rurale, ou de réactualiser en zone urbaine des documents anciens, parfois même antérieurs au SCOT de 2014 et dont les références peuvent s’avérer aujourd’hui obsolètes, malgré les révisions et les modifications qui ont été apportées depuis.
C’est en particulier vrai sur toutes les questions liées à la transition écologique pour lesquelles ces dernières années ont vu le cadre légal et réglementaire en matière d’urbanisme s’enrichir, afin de mieux prendre en compte la réalité climatique et ses incidences, par rapport à une période plus ancienne où cette préoccupation pesait peu sur les procédures d’urbanisme. D’où l’impérieuse urgence à retravailler les documents d’urbanisme à l’aune de ce paramètre devenu aujourd’hui incontournable.
Dans le panel de ces sept procédures désormais engagées au Pays Basque, il convient de rappeler le positionnement singulier du SCOT qui fixe les orientations générales s’imposant ensuite aux PLUi, auxquels revient le soin de rédiger les règles à respecter à l’échelle de la parcelle. Si cette répartition des rôles entre SCOT et PLUi est claire, le cadre réglementaire n’impose pas pour autant le niveau de précision que le SCOT doit respecter dans sa rédaction. Inutile de souligner qu’un SCOT trop général et pas suffisamment précis dans ses orientations concernant la consommation foncière, les quotas de logement sociaux, la préservation du foncier agricole, la consommation énergétique, la mixité sociale, les infrastructures de transport… laisse forcément plus de marge aux décideurs des PLU. Ce qui pourrait s’avérer très vertueux si ces derniers étaient tous enclins à privilégier le volontarisme public dans la rédaction des PLU, mais dans la pratique, ici comme ailleurs, ce n’est pas toujours le cas. Il est parfois difficile pour les maires de résister dans la rédaction du PLU à la pression de certains initiés ou de lobbies porteurs d’intérêts particuliers. A l’inverse, il peut être aidant pour eux, de pouvoir s’appuyer sur un document SCOT précis, voire contraignant sur les aspects relevant de l’intérêt général. Espérons que le SCOT Pays Basque et Seignanx s’engagera clairement dans cette voie.
Des priorités à surveiller
Enfin, face à l’ampleur des décisions qu’un PLU est amené à prendre, à la densité du cadre réglementaire qu’il se doit de respecter et à la complexité des considérations techniques qu’il lui faut intégrer, il n’est pas toujours aisé pour toutes les personnes qui s’intéressent à l’élaboration d’un PLU de lire les orientations politiques que décline son contenu et de mesurer la manière dont il va peser sur les aménagements à venir. Dans ce contexte, il peut être utile de se fixer quelques priorités simples, au filtre desquelles il conviendrait d’analyser toutes les décisions concrètes à prendre.
A titre d’exemples, j’en mettrais deux en évidence qui me semblent fondamentales pour l’ensemble du territoire basque en général et plus particulièrement pour les zones urbaines et périurbaines : la sobriété foncière et le logement social.
– La sobriété foncière relève d’une responsabilité collective qu’il nous faut désormais tous intégrer pour limiter l’ampleur du dérèglement climatique. Elle découlera de l’acceptation par nous tous d’une plus grande densité dans les zones déjà construites, d’un moindre recours à la parcelle individuelle, d’une plus grande proportion d’habitat collectif et de locaux d’entreprises dans les secteurs résidentiels, d’une sacralisation des espaces naturels et agricoles…
– Dans un contexte où le marché local du logement n’arrive pas à offrir des logements locatifs accessibles au plus grand nombre dans la parc privé, l’interventionnisme public en matière de production massive de logements sociaux s’impose aujourd’hui comme la solution la plus efficace pour régler à court terme la crise que nous connaissons. La prise en compte de cet objectif par le SCOT et les PLUi en cours est déjà en soi une condition nécessaire à sa réalisation. Nous ne serons jamais trop nombreux à veiller à ce que ces deux priorités innervent les futurs documents d’urbanisme en cours d’élaboration, à hauteur de l’ambition qui convient.
Bonjour,
Très bonne analyse. Il convient de bien voir que la répartition du foncier disponible en ce qui concerne la consommation des ENAF sera distribué par le SCot aux plui. Or ceux qui ont consommé le plus ce sont les communes côtières lesquelles sont autorisés à consommer 48% du passé et l’intérieur 52% . Ainsi la CAPB défavorise l’intérieur qui a peu consommé et a besoin de zones d’activités et de zones à construire. 4% de différence entre des communes comme Saint pee sur Nivelle qui ont consommé 70 ha et saint palais trois fois rien c’est la continuité de la saturation de la côte et de la marginalisation de l’intérieur. Il nous paraît indispensable de faire des recours contre ce SCoT pour rééquilibrer celà. Un différence en % diminuer la côte de 75% et l’intérieur de 25% me paraît un minimum. Merci de votre engagement. Cordialement
Euskal herri a été transformée en une « Zone à aménager » comme les autres. Les institutions politiques font la promotion d’un territoire qui n’est plus ce qui est habité par des êtres humains, mais ce qui doit servir un modèle économique inégalitaire aux mains des plus riches.
La carte associée à l’article est en ce sens éloquente. Elle parle de « centres de rayonnement » primaires et secondaires enchaînés entre eux par des voies de communication pour y transporter des masses de marchandises et de d’éléments vus comme des vecteurs de production d’argent. Les gens, euskaldun ou pas, n’y existent pas sauf quand il s’agit d’en remplir la carte selon les appétits financiers des un, des unes ou des autres.
Exit la culture, exit l’identité, exit la dignité, exit « l’humanité ».