Durant l’année 2010, l’attente d’une trêve d’ETA a suscité bien des paris, méfiances, espoirs, alimentant ainsi des débats pas toujours très porteurs.
L’arrêt des hostilités de la part de l’organisation armée le 5 septembre 2010 (on at-tend à ce jour le communiqué des Etats français et espagnol allant dans ce sens) avait provoqué des réactions mitigées, allant du soulagement au scepticisme en passant par le mépris le plus total. Et voilà, aujourd’hui, à Bilbao, dans l’enceinte de ce lieu mythique de bien des batailles sociales qu’est le Palais Euskalduna, 300 invités et autant de journalistes, avons assisté à la naissance d’un nouveau parti politique dont l’identité sera révélée ultérieurement. Même si les visages sont les mêmes (ça rassure), le parti est nouveau certes, mais c’est son message et son contenu, que le monde abertzale et au-delà attendait avec impatience, qui rendent probablement ce jour historique.
Bien sûr, il y en a eu d’autres, et même si tout événement semble le devenir, je reviens de Bilbao avec ce sentiment d’apaisement, d’espoir en l’avenir et le regard tourné vers un horizon où se dessine l’affirmation d’un nouveau projet politique pour Euskal Herria sur fond de réconciliation.
Le message de Rufi Etxebarria, (en prison il y a encore quelques mois), a été on ne peut plus clair. “… mise en place d’un projet politique refusant l’usage de toute forme de violence ou de menace, y compris celle utilisée par ETA…”.
Afin de rassasier toutes et tous ceux qui seraient encore tentés d’afficher le fameux “ce n’est pas suffisant”, Iñigo Iruin, avocat ténor des grands procès d’Herri Batasuna, Segi, GAL, 18/98, Udalbiltza, Arnaldo Otegi, etc., souligne avec force, l’un des articles du règlement intérieur de ce nouveau parti qui stipule “l’exclusion du parti de toute personne utilisant la violence quelle que soit sa forme”. La pelote est à présent sur le fronton du gouvernement espagnol.
Comment pourrait-on à partir d’aujourd’hui comprendre et encore moins accepter une nouvelle illégalisation, si ce n’est par des lo-giques politiciennes et intérêts électoraux. J’en appelle à la responsabilité des représentants des partis politiques, syndicats, associations, société civile, autant dire toutes et tous ceux qui défendent la force de la justice et le débat politique sans contraintes.
M. Zapatero, M. Rubalcaba, M. Sarkozy, Mme Alliot-Marie, devant ce grand pas de géant, nous attendons de votre part la réponse adéquate à la mesure de l’événement. M.C.
Les reactions
A l’invitation du mouvement pour la paix Lokarri, tous les partis et syndicats étaient invités. La totalité des organisations abertzale, du PNV à Aralar, d’EA à AB, ont répondu présents ainsi qu’à titre personnel des responsables du syndicat espagnol CCOO. Le PP et le PSOE ont décliné l’invitation. L’événement avait pour cadre le Palais des Congrès Euskalduna de Bilbao, sous le regard d’une foule de journalistes de tous types de médias.
Les réactions ont été immédiates. Pour le ministre de l’Intérieur de Madrid, A. P. Rubalcaba, “c’est aux juges de décider si ces statuts rejettent la violence permettant d’en finir avec l’illégalisation (de Batasuna)”. Pour le Parti Populaire, Maria Dolores de Cospedal, “Batasuna ne peut se présenter aux élections”. Pour A. Basagoiti, leader PP en Pays Basque: “Ils cachent 900 assassinats”. Pour le gouvernement de Navarre UPN “il ne suffira pas de se présenter avec un papier pour démontrer qu’on s’est démarqué d’ETA”. Pour le PSOE, son n°3 Marcellino Iglesias, “c’est une grande nouveauté”. Pour le Le-hendakari Patxi Lopez “nous avons entendu des choses que nous n’avions jamais entendues auparavant”.