Le 14 juin aura lieu à Bayonne une manifestation pour la libération des prisonniers politiques basques à laquelle appellent nombre d’associations ou d’élus. Pour Xabi Larralde, la question du devenir des preso est au coeur de la résolution du conflit pour une situation normalisée en Euskal Herria.
On ne le soulignera jamais assez : le combat pour la libération des preso se situe au coeur de la résolution du conflit en Euskal Herria. Aujourd’hui, ils sont littéralement pris en otage d’une stratégie des Etats espagnols et français visant au blocage total de la situation. Pour bien resituer cela, il est utile de revenir sur le pari que fait la gauche abertzale avec le processus actuel. Il est le suivant : reconstruire une donne politique démocratique en Euskal Herria, car nous sommes convaincus que par l’activation de la société basque et au travers d’un processus politique obtenant l’aval de la communauté internationale, nous pouvons franchir dans la phase historique actuelle des pas en avant significatifs vis-à-vis de la résolution du conflit, mais aussi de la reconnaissance d’Euskal Herria (changement des statuts, obtention du droit de décider). Vis-à-vis de ce dernier point, le contexte actuel atteste du fait que jamais notre projet d’autodétermination n’a été aussi crédible ; avec un précédent historique en Europe “de l’ouest” (si on peut encore utiliser ce vocable…) qui est celui de la tenue du référendum sur l’indépendance de l’Ecosse à l’automne.
Solder le passé
Nous voulons ouvrir une nouvelle séquence politique qui permette à la société basque de se déterminer démocratiquement sur son devenir politique, et les Etats jouent exactement la carte opposée, en essayant de maintenir en vigueur le plus longtemps possible les paramètres de la phase antérieure. A cet égard, la position des espagnols vis-à-vis des preso ne relève pas que d’une vision revancharde maintenue en soutien aux victimes, elle répond à deux objectifs politiques. Premièrement, conditionner la capacité d’initiative politique de la gauche abertzale à un endroit extrêmement douloureux pour elle. Et secundo, combattre l’idée que les preso relèvent d’un conflit, car il faudrait alors se poser la question de ses causes politiques, et des modalités démocratiques à mettre en oeuvre demain pour les appréhender. Or, l’Espagne traverse une grave crise et est confrontée à un enjeu qui est celui d’une seconde transition politique. Dans ce contexte, plus le débat sur les nouveaux statuts prendra de la force en Euskal Herria et en Catalogne, moins les espagnols seront enclins à faire d’eux-mêmes des pas sur la question des preso. On comprend de ce point de vue ce qui se joue autour du combat pour la libération des preso. D’une part, solder le passé et tourner la page de la confrontation armée. Mais aussi et surtout, ouvrir pour l’avenir un débouché au champ politique, en permettant que les diverses options sur le devenir d’Euskal Herria puissent être débattues et tranchées de façon démocratique. La portée politique de cette problématique est considérable : il sera impossible de stabiliser à terme la nouvelle phase sans libération des preso, car la non libération des preso signifierait fondamentalement que la voie politique reste obstruée pour la gauche abertzale.
Dans la stratégie qui vise à briser le statu quo des Etats
en faisant sauter les verrous des prisons,
une première victoire a été obtenue autour de la doctrine Parot.
Elle n’est pas suffisante, mais elle est significative,
car elle délégitime considérablement la position de Madrid,
et représente un signal de la communauté européenne en faveur du processus.
Faire sauter les verrous
Face à la stratégie de blocage de Madrid et de Paris, le travail réalisé ses dernières années vise à faire sauter un par un les verrous qui maintiennent les preso en prison. Dans cette idée, une feuille de route a été formalisée au travers des fameuses “recommandations”. Elles représentent une base de travail à laquelle peuvent adhérer de larges secteurs de la société basque, et sont validées par des experts comme conformes aux standards internationaux de résolution des conflits. Elles ont inscrit comme objectif un processus de libération qui soit individualisé mais intégral et échelonné dans un délai de temps raisonnable. De même, ils soulignent la nécessité de mettre en oeuvre une justice transitionnelle, qui adapte la législation à la réalité du processus. Dans cette stratégie qui vise à briser le statu quo des Etats en faisant sauter les verrous des prisons un par un, une première victoire a été obtenue autour de la doctrine Parot. Elle n’est pas suffisante, mais significative, car elle délégitime considérablement la position de Madrid et représente de fait un signal de la communauté européenne en faveur du processus. Toujours dans le cadre de la feuille de route que représentent les recommandations, le 14 juin nous allons interpeller Paris dans les rues de Bayonne, autour de mesures très concrètes : le rapprochement et regroupement des preso, la libération des preso gravement malades. Cette dernière revendication prend un relief plus particulier autour d’un cas concret, celui d’Ibon Fernandez. Atteint d’une grave maladie, les médecins sont unanimes pour affirmer que son état de santé nécessite sa mise en liberté dans les plus brefs délais. Le délibéré sur sa requête de libération est prévu, comme par hasard, le 20 juin, au lendemain de la manif de Bayonne… La diversité des associations qui appellent à cette manifestation, le soutien de l’ensemble des grands élus, toutes sensibilités confondues, atteste de l’ampleur qu’elle va prendre, mais aussi de l’existence en Iparralde, d’une prise de position quasi unanime en faveur des preso et du processus de résolution. Ceci étant, pas un abertzale ne doit manquer à la manifestation du 14 juin !
Voici le programme de la journée :
16h00 départ de la manifestation de Lauga
18h00 arrivée de la manifestation quai Chao et prise de parole.
18h30 txaranga 20h00 concert avec ZEBDA (Toulouse)et DJ Elepunto ( Ondarroa,Bizkaia)