Il faudrait lancer la refonte de règles institutionnelles pensées dans l’après-guerre mais qui ne correspondent plus en rien à la réalité sociétale complexe de notre XXIe siècle. Cependant, une réforme territoriale aboutie ne fera sens que dans le cadre d’une réforme plus globale. C’est pourquoi, il faut, un vrai changement de méthode d’analyse sur l’état de notre société, un redéploiement des ressources au travers d’une profonde réforme fiscale, une refonte institutionnelle bien plus large et, enfin, un effort de pédagogie en direction des populations.
Enbata.info publiera durant les prochaines semaines
des extraits de cette réflexion de Gérard Onesta
sur la réforme territoriale dans l’Hexagone.
Ce sera une aide utile pour « envisager la richesse de nos territoires
avec beaucoup de finesse » et l’ensemble de l’Etat
« en dynamique européenne« .
Notre démocratie est malade, les récents scrutins l’ont dramatiquement montré. Une extrême-droite aux thèses certes stupides mais triomphante sur fond d’abstention massive n’est pourtant qu’un des multiples symptômes du désabusement citoyen face à l’incurie publique confrontée à la conjonction de toutes les crises : chômage, dérèglements climatiques, acculturation, montée des intégrismes, paupérisation, pollutions, tensions internationales, injustices sous toutes les formes.
La classe politique traditionnelle, empêtrée dans de sordides affaires qui paraissent sans fin, ne paraît pas avoir pris la mesure de l’urgence d’un nouveau modèle de société. Pour cela, il faudrait d’abord une refondation complète des méthodes d’analyse de notre époque, notamment au regard des impératifs du développement durable et de l’avènement du fait européen.
Ensuite il faudrait un profond redéploiement des ressources sur la base d’une fiscalité nouvelle – allégeant celle du monde du travail pour mieux taxer la pollution, la spéculation et l’exploitation – couplée à une lutte sans merci contre les « paradis » fiscaux.
Enfin – et peut-être surtout – il faudrait lancer la refonte de règles institutionnelles pensées dans l’après guerre mais qui ne correspondent plus en rien à la réalité sociétale complexe de notre XXIe siècle.
Ainsi, en toute cohérence, une réforme territoriale digne de ce nom ne pourra donner toute sa mesure qu’au travers d’une remise à plat plus globale de nos institutions.
Car comment bien penser les territoires, sans s’interroger aussi sur les mécanismes qui en décident le destin ?
On tiendrait là l’occasion d’arrêter de se plaindre du caractère bonapartiste du régime présidentiel – qui obnubile les médias et déchire les partis plus qu’il ne construit l’intelligence collective – mais aussi de la faillite du Parlement – composé d’une Assemblée aussi pléthorique que molle et d’un Sénat peu représentatif mais debout sur le frein des conservatismes – le tout sur trame d’un jacobinisme aussi rance que vivace.
Pour réussir la Réforme territoriale pertinente, il conviendrait donc d’inclure ce chantier dans celui d’une nouvelle République. Autant dire qu’au vu du niveau du débat politique dominant, on en est loin…
Les constitutionnalistes doivent toutefois se faire extrêmement modestes, car il serait faux de croire que les citoyens confrontés aux soucis du quotidien ont une appétence spontanée pour le sujet des réformes institutionnelles. On peut certes le regretter quand on sait à quel point la règle du jeu sur-détermine le jeu, mais c’est ainsi. Pour entraîner l’adhésion du plus grand nombre, il faut donc faire preuve de beaucoup de pédagogie en partant d’exemples concrets, et expliquant avant tout en quoi la réforme va contribuer à résoudre des problèmes.
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