Le contenu de la luxueuse plaquette diffusée par les quatre maires, vice-présidents de l’Acba, dont l’objectif est de couler le projet d’EPCI unique pour Iparralde ainsi que la position du Medef Pays Basque qui, soudain, monte au créneau sont étonnants. Tout ceci n’est qu’habillage et babillage.
Dernier document en date La nouvelle collectivité Pays Basque. Même si les tenants de cette proposition ont fait l’effort de formaliser ce qu’ils souhaitent, il est très regrettable qu’ils n’aient exprimé leur point de vue qu’à quelques semaines de l’échéance du vote des conseils municipaux.
Sur la forme, ce document fait la part belle à l’historique de la revendication territoriale. Il cite notamment les frères Garat d’Ustaritz lors de la révolution française. J’ai voulu partager cet étonnement avec une élue bayonnaise lors d’un match de l’Aviron qui m’a, sans doute avec raison, traité de naïf.
Sur le fond et avec les deux interrogations légitimes de ces élus, celle de la gouvernance et celle de la fiscalité, ce document laisse un peu sur la faim.
Sur la gouvernance, tout d’abord, la simplicité n’est pas la synthèse qui apparaît au premier abord : couche supplémentaire, nombre d’élus, partage des compétences, maintien des dix collectivités, organes de décision et opérativité du montage face aux 95 syndicats, expression et légitimité d’une stratégie territoriale, etc.
Sur la fiscalité, il y a de réelles questions à travailler mais certaines n’ont rien à voir avec l’EPCI.
Un autre écueil de fond réside dans l’ignorance des détails de la loi NOTRe qui prévoit, de toute façon, que le nombre des communautés sera très fortement réduite. Le dossier est donc, sur ce point, complètement hors réalité. Dès que l’on procèdera à une fusion de deux ou trois communautés de communes, se posera, de toute façon, avec la même acuité, la question de l’harmonisation fiscale et des façons d’y parvenir.
Le Medef sort du bois
Cette organisation de façon tardive s’est exprimée lors de son assemblée générale récente. Elle s’oppose résolument à l’EPCI unique. Vue de l’extérieur (n’appartenant pas à cette organisation) il semblerait qu’il n’y ait pas eu le temps nécessaire d’explication pour comprendre et faire partager par ses membres les points forts et les points faibles de cette opportunité. Le point d’achoppement porte principalement sur la fiscalité (et surtout la taxe transport). De plus, dernièrement, cet organisme diffuse largement un sondage qui jette le trouble : un certain nombre d’élus de la CCI ont répondu de façon contraire à leur choix.
De fortes critiques ont été exprimées quand les chambres consulaires ont formulé leurs avis favorables à l’EPCI. Elles feraient de la politique. Soyons clairs : ce qui ne pose pas de problème sur la collectivité de Nice ou du Cotentin, pose des problèmes ici. Alors qu’une circulaire ministérielle précisait que les chambres consulaires devaient être formellement consultées pour qu’elles donnent leur avis. Par ailleurs, les contributions fiscales et sociales des entreprises font des 17.000 ressortissants de la CCI des acteurs importants dans le choix d’organisation du territoire : “la politique est trop importante pour qu’elle soit l’affaire des politiques” pour paraphraser ce qu’on dit sur l’armée. Enfin, est-ce vraiment anormal qu’un sujet aussi complexe fasse l’objet de débat et d’avis de la part de la société civile?
Dans ce contexte, il faut saluer la soirée débat de Saint-Palais sur le thème EPCI et agriculture en présence de tous les acteurs qui comptent dans l’agriculture (y compris le président de la Chambre d’agriculture).
Incompréhensions et retards à l’allumage
Dès que le préfet, lors d’une AG du Conseil de développement ou peut être lors d’une plénière à la CCI avait décrit cette opportunité (il y a près de deux ans), j’ai trouvé l’idée très intéressante: mon premier article pour Enbata, “Une opportunité pour avancer” date de mai 2014. J’en avais parlé autour de moi. Quelles n’avaient pas été les volées de bois vert et autres propos peu amènes que j’avais du endurer de la part de personnes très proches! Par la suite, bien heureusement, les explications et les maturations nécessaires ont eu lieu.
Ces mêmes explications et présentations du préfet ont eu lieu aussi au sein de la CGPME lors d’une assemblée générale, l’an dernier, déjà. Il aurait pu y avoir le même type d’explication au sein du Medef. Le sujet est en débat depuis déjà longtemps et dans beaucoup de sphères de la société civile (par exemple, l’ouvrage fait par Batera : l’EPCI pour les nuls). De plus, des experts du Garapen kontseilua avaient été aussi saisis pour donner une validation de ces scenarii. Pourtant certains font mine de “découvrir” cette question. Il n’est pire sourd que celui qui ne veut entendre.
Il y a aussi le faux débat non avoué du risque de faire la part belle au nationalisme basque.
Même si la première partie du document La nouvelle collectivité Pays Basque se drape d’ouverture en flattant le besoin de reconnaissance, il y a fort à parier que c’est un faux-semblant.
Soyons clairs aussi dans ce domaine. Tout le monde connaît mon attachement pour le territoire, mais je déclare, dussé-je me fâcher avec mes amis, que le territoire est A TOUS (toutes les bonnes volontés sont utiles). Les abertzale dont je suis, (très fortement minoritaires par ailleurs), n’ont pas l’apanage de la vérité sur le territoire. Ils devront formaliser pour proposer, s’allier avec d’autres, participer et construire le bien de tous.
Je salue ici le courage du préfet d’avoir permis qu’une reconnaissance de ce pays ait lieu et d’avoir pris de la hauteur dans ce débat à haut risque. Est ce aussi un crime de convenir que le préfet est un homme de bonne volonté ?
Les choix clairs
Moi qui ne suis pas de gauche, je salue aussi la quasi-unanimité de la gauche (région, département, élus locaux, sénatrice, élus) et des Verts. Je salue aussi l’engagement de MM Brisson et Etchegaray (j’apprends avec regret que ce dernier subit des pressions au sein de l’Acba). Mais je regrette que d’autres choix du centre et de la droite s’alignent sur ceux des extrêmes gauche et droite. Dans quelques semaines, les services de l’Etat proposeront des orientations sur les disparités fiscales identifiées par le cabinet saisi. Puis il faudra que ce territoire choisisse.