Pour m’être investi dans les arguments du « Bai » et avec les compléments apportés sur la gouvernance et sur l’aspect fiscal, ma crainte serait que le soufflet ne retombe, dès la proclamation des résultats. Je vous livre un point de vue personnel lié au coup d’après, c’est-à-dire à la mise en place de l’EPCI. Beaucoup d’amis partagent ce point de vue.
Un des aspects de la gouvernance, outre la représentativité qui a donné lieu à de nombreux échanges, est la nécessaire obligation de ne pas reproduire les réflexes sclérosants de la politique politicienne dont les exemples hexagonaux sont multiples (déchéance de nationalité ou loi travail): l’affrontement droite/gauche.
Devant travailler les compétences limitées de l’EPCI naissante qui aura tout à prouver, il serait idiot que les partis politiques pèsent sur les décisions pratico-pratiques des premières années que les élus auront à prendre. Il serait aussi important que les débats franco-français (élections, polémiques, propos clivés, médias privilégiant l’écume des choses plus que le fond,…) ne viennent pas polluer la nécessaire entente devant la tâche à accomplir. A la manière du juge anglais qui revêt la perruque et par là, aborde toute la noblesse de sa charge, l’élu futur devra se déshabiller de sa tenue politique habituelle.
Non à toute hégémonie
Le futur président donnera-t-il l’impulsion de ce nouvel état d’esprit ?
La société civile par l’intermédiaire de Batera et du Garapen Kontseilua peut-elle, dès l’instant où les têtes pensantes seront désignées, jouer les bons offices pour ce mutuel respect et opérativité de l’équipe politique de l’EPCI ? Les élus seront-ils désignés sur l’aptitude à se conformer à cette obligation ?
Un autre point lié au coup d’après concerne cette fois l’équipe de direction. Une tentative d’hégémonie des services de l’Acba serait, elle aussi, catastrophique. Il n’est pas, dans ce propos, fait état d’un a priori sur les hommes et les femmes qui auront à raisonner “Iparralde” plus que “Acba”, mais les pratiques de délégation, d’autonomie cohérente, selon les compétences seront à mettre en place, avec des modalités d’essai, de confiance, d’expérience et d’évaluation (choses qui sont loin d’être la pratique de notre beau pays….).
Il conviendra que l’équipe politique soit parfaitement active dans les mises en place décentralisées qui devront avoir lieu, d’autant plus qu’une partie des structures existantes a fait preuve de capacité à faire le job de façon utile et efficace (exemple : Xiberoa).
Enfin, sur l’enthousiasme lié à cet EPCI, qui me porte et me motive depuis mi-2014, vous l’avez compris, il conviendra aussi qu’un autre cercle que Batera puisse travailler le volet économique Iparralde. Les acteurs à réunir pourraient être les consulaires, les équipes (politique et dirigeante) EPCI, entre autres. Les chantiers à travailler pourraient être l’articulation entre orientation et mise en oeuvre (sous-traitances consulaires pour le compte, partage des tâches entre le politique et l’opérationnel), la liaison avec les schémas régionaux et les filières verticales décidées/négociées avec la région, les futures compétences accessibles et/ou utiles, l’analyse des contraintes et difficultés principales (menaces et opportunités), la gestion des m2 industriels et leur équilibre sur le territoire, la stratégie sur les infrastructures, etc. Un recueil de contributions libres sur ce thème pourrait être ouvert au grand public, il pourrait libérer les envies et les motivations.
A l’AG Uztartu du 14 avril, j’ai pu me rendre compte des attentes économiques sur l’EPCI. Elles sont énormes, diverses et vitales pour Iparralde. Souvent le monde politique est loin de ces préoccupations, alors qu’une partie des acteurs économiques est dans les starting blocks.
Une bonne réaction européenne
On se souvient peut être qu’une réforme sur les multinationales dont le siège social est en France avait été soumise au parlement. Les écologistes et une partie des députés avaient demandé que les bénéfices et chiffres d’affaire par pays soient déclarés par ces multinationales. La gauche majoritairement et la droite avaient refusé pour ne pas pénaliser les entreprises françaises, soumises à la concurrence, par des déclarations transparentes qui pouvaient les fragiliser. Il avait été évoqué une reculade du gouvernement. Mais le contexte a brusquement changé depuis le Panama papers. La Commission Européenne (projet de directive) les multinationales actives dans l’UE (dont par exemple Google ou Facebook), devront déclarer leurs chiffres d’affaire et bénéfices par pays avec une mention spéciale sur les données fiscales concernant les paradis fiscaux (il y a néanmoins encore un risque de dissimulation en agrégeant les données concernant les pays non qualifiés de paradis). Plus de 6.000 entreprises seront concernées. Cela sera une première dans le monde. Cet exemple, après mise en place dans l’UE, pourra ensuite faire tâche d’huile dans d’autres gouvernances de continent (sujet à l’ordre du jour du prochain G20 à Washington). Le pire n’est jamais certain et l’Europe a, en l’occurrence, montré le chemin à la France.