Sudmine aux antipodes

Devant la propriété de M. Vallier, président de Sudmine
Devant la propriété de M. Vallier, président de Sudmine

Sudmine vs Pays Basque  : le dialogue impossible ? « Dans ce cas-là, vous refusez tout progrès… » versus « Vous comprenez le paradoxe absolu de prétendre penser un projet de territoire alors que les gens du territoire en question n’en veulent pas ». Nous publions l’intégralité des discussions entre Michaël Laloua, directeur de Sudmine, et des militants de Bizi sur Enbata.info. Deux logiques aux antipodes s’y affrontent. C’est l’occasion de découvrir -et de comparer- les arguments des uns et des autres, et de voir deux projets de société, deux visions échanger et tenter un dialogue… impossible ?

L'Ikurriña flotte dans le Loiret
L’Ikurriña flotte dans le Loiret

Le projet de mines d’or en Pays basque semble bel et bien enterré. Selon Mediabask, Bercy a affirmé que la demande de permis d’exploration à la recherche d’or dans le Labourd, déposée par l’entreprise Sudmine, est définitivement rejetée. L’entreprise n’a plus possibilité de faire aucun recours. Notre confrère a publié un numéro spécial accompagnant ce « scoop« . Il y publie entre autre des extraits d’une discussion échangée entre une délégation de Bizi! et la société Sudmine en septembre dernier. Enbata vous offre aujourd’hui l’intégralité de cette confrontation d’arguments et de visions.

Un véritable chantier installé au domicile du président de Sudmine
Un véritable chantier installé au domicile du président de Sudmine

Le jeudi 14 septembre 2017, Bizi avait réalisé une action spectaculaire en installant une pelleteuse et un chantier de travaux publics devant le domicile de M. Christian Vallier, président de Sudmine, dans la petite commune de Seichebrières, située dans le Loiret, à 700 kilomètres du Pays Basque. Une banderole venait expliquer le sens de cette intrusion peu courante : «Vallier, Président de Sudmine, que dirais-tu si on venait creuser chez toi ?».

La délégation de Bizi ayant rencontré le directeur de Sudmine
La délégation de Bizi ayant rencontré le directeur de Sudmine

Pendant que la majorité des activistes basques restaient sur place, quelques militants de Bizi, accompagnés de journalistes, se rendaient dans la commune voisine de Vitry-aux-Loges pour y rencontrer M. Michaël Laloua, directeur de Sudmine.

A 700 km du Pays Basque, Bizi vient faire résonner l'opposition frontale au projet de mines d'or
A 700 km du Pays Basque, Bizi vient faire résonner l’opposition frontale au projet de mines d’or

Un dialogue s’instaurait alors entre les représentants de Bizi et M. Laloua, devant les journalistes présents. C’était la première fois -et ce sera sans doute la dernière- qu’un débat se tenait ainsi en direct entre les promoteurs et des opposants du projet de mines d’or. Voici la retranscription intégrale de cette discussion.

Bizi : Bonjour, la société Sudmine a fait une demande de permis de recherche d’or dans une zone du Pays Basque, dans onze communes, qui est une zone avec des points très sensibles puisqu’il y a trois zones Natura 2000, c’est le bassin…

M. Laloua : Je suis Mickael Laloua, le directeur de Sudmine donc je suis au courant.

Bizi : D’accord, très bien. En fait, il y a tout le Pays Basque qui demande que vous renonciez à ce projet c’est-à-dire les trois chambres consulaires, l’ensemble des communes et il y a une manifestation ce samedi à Bayonne. Et du coup on se demande pourquoi vous vous entêtez à maintenir cette demande de permis et pourquoi vous ne la retirez pas, sachant qu’en plus connaissant le Pays Basque vous n’arriverez pas à faire vos sondages de terrain ou quoi que ce soit donc vous perdez du temps et de l’énergie.

M. Laloua : Et bien là, nous quand on est parti on a fait notre demande, ça va faire trois ans presque. On sait que c’est mal parti mais bon après on a fait notre demande, on laisse l’instruction suivre son cours et on verra une fois que le Ministère aura rendu sa décision.

Bizi : Mais vous ne voulez pas entendre la voix unanime du Pays Basque et retirer la demande ?

M. Laloua : Si, si, on entend, on a entendu vos arguments mais le problème c’est qu’on a jamais eu l’occasion d’en discuter. Là c’est la première fois qu’on arrive à discuter avec des opposants au projet. Donc là vous êtes l’association Bizi ?

Bizi : oui, nous sommes Bizi !, c’est une association qui travaille sur les questions environnementales et climatiques.

M. Laloua : C’était surtout le CADE (Comité des Associations de Défense de l’Environnement) jusque-là…

Bizi : Oui, on fait partie du CADE. On est une des associations fédérées dans le CADE.

M. Laloua : Et puis après il y a une association qui a été montée contre le projet spécifiquement. Donc nous on a cherché à rencontrer ses associations pour discuter avec eux, il y a maintenant… pas l’été dernier mais l’été d’avant, quand on avait voulu faire une commission concertation. Le but c’était de convier les associations, les maires, les représentants des riverains des communes sauf que personne a voulu se rendre à cette réunion pour pouvoir discuter et écouter notre projet.

Bizi : Oui en fait vous savez parce que vous avez reçu des courriers à ce sujet : cette réunion avait été présentée de manière complètement frauduleuse puisque …

M. Laloua : Non.

Bizi : Oui vous l’aviez appelée « Commission de consultation et de concertation » comme si c’était une démarche officielle alors que ça n’avait rien d’officiel.

M. Laloua : Le problème c’est que l’Etat ne veut rien faire.

Bizi : Et vous aviez annoncé par exemple la présence du Conseil de Développement du Pays Basque alors qu’il n’avait jamais donné son accord.

M. Laloua : Non, on les avait conviés.

« Bizi! à Sudmine : «Le Conseil de Développement du Pays Basque est l’instance de concertation de la société civile en Pays Basque. Ils vous ont écrit  et vous ne leur répondez même pas.»»

Bizi : Et eux ils ont écrit depuis pour vous demander des explications et vous ne leur avez jamais répondu. Ils viennent de le redire encore publiquement. C’est l’instance de concertation de la société civile en Pays Basque. Ils vous ont envoyé un courrier et vous n’y avait jamais répondu. Donc il y a des gens qui veulent discuter avec vous, ça (le Conseil de Développement du Pays Basque) c’est l’instance de concertation de la société civile en Pays Basque et vous ne leur répondez même pas.

M. Laloua : Ah non, nous on a jamais rien reçu d’eux. On a jamais reçu aucune demande officielle de leur part.

Bizi : La présidente s’appelle Caroline Philipps et c’est l’instance vraiment légitime pour parler au nom de la société civile.

M. Laloua : Non on a jamais reçu cette demande. Parce que nous au contraire…

Bizi : Nous on va lui dire. En tout cas le courrier moi je l’ai vu et il vous a été envoyé alors on va vérifier  ce s’est passé, on verra si ils l’ont envoyé avec accusé de réception ou non. Et eux ont déjà dit publiquement que vous ne leur aviez pas répondu.

M. Laloua : Oui mais ça on est pas au courant du sujet.

Bizi : Et du coup, vu qu’on parle… Quand même, est ce que vous ça ne vous fait pas bizarre : vous, qui êtes à 700km de chez nous, de décréter que vous allez peut-être explorer et exploiter des mines d’or dont personne ne veut chez nous. Où tout le monde dit, que ce soit les agriculteurs, les gens qui gèrent les thermes de Cambo, les gens qui s’occupent d’eau parce qu’il y a pas mal de bassins versants et de bassins d’eau dans cette zone, il y a trois zones Natura 2000 etc… et tous les gens disent « Nous ce projet on en veut pas » parce que ça aura des répercussions que ce soit physiques, que ce soit l’image très négative sur cette zone qui en plus est une zone d’attractivité touristique forte et…

M. Laloua : Oui mais il faut laisser voir, enfin nous on est qu’au stade de la demande de permis de recherche.

Bizi : Mais si personne n’en veut pourquoi vous allez aller rechercher ?

M. Laloua : Pendant les trois ans, on a l’intention d’aller présenter nos arguments, d’aller rencontrer les gens, d’aller présenter notre projet et après on verra au bout des trois ans si il y a vraiment un refus.

Bizi : En général, quand il y a un permis d’exploration après les permis d’exploitation sont accordés.

M. Laloua : Non, non, non, non, non.

Bizi : Et pourquoi non ?

M. Laloua : Non ça je l’ai répété au moins dix fois aux médias, il n’y a pas de droit de suite. Non, non, non.

Bizi : Oui mais, dans les faits, vous connaissez beaucoup d’exemples..

M. Laloua : Oui.

Bizi : C’est-à-dire par exemple ?

M. Laloua : La Guyane.

Bizi : Un seul, voilà. C’est celui que j’allais vous citer. C’est le seul ! C’était à l’époque du Grenelle de l’environnement, et le permis d’exploitation n’a pas été donné alors que le permis d’exploration avait été donné. C’est parce qu’on était à la veille du Grenelle de l’environnement, sous Sarkozy, et du coup il a fait un geste très symbolique. La société a mis l’Etat en justice et demande des millions de dédommagement.

M. Laloua : C’est normal ! Vu ce qu’ils ont dépensé.

Bizi : Ah ! Donc vous voyez bien, quand on a accordé un permis d’exploration après c’est ultra compliqué, ça n’arrive quasiment jamais sauf cet exemple- là, de refuser des permis d’exploitation après. Et du coup nous on sait très bien que si on vous donne le permis d’exploration, ça veut dire que dans les années qui viennent on se retrouve avec des mines d’or dans ces zones.

M. Laloua : Il faut déjà qu’on trouve quelque chose.

Bizi : Oui, oui mais enfin vous n’allez pas dépenser de l’argent si… Vous avez quand même un certain nombre d’indices géologiques qui disent qu’il y a des restes d’or.

M. Laloua : Oui mais rien ne dit… Il y a des études à faire.

Bizi : Ce que je ne comprends pas c’est comment vous pouvez vous obstiner quand toute la population et tous ses représentants économiques, politiques etc. vous disent « Nous on ne veut pas de ce projet », à vouloir quand même le tenter. C’est ça qu’on a voulu signifier avec l’action : c’est comme si nous on venait creuser dans votre commune…

M. Laloua : On a rien creusé, on a rien fait.

Bizi : Oui, mais c’est votre démarche. Nous si on venait faire ça chez vous…

M. Laloua : Vous déformez tous nos propos, vous déformez tout notre projet.

Bizi : Quels propos on a déformé ?

M. Laloua : Vous dîtes qu’on va faire une mine d’or  comme à Salsigne alors que c’est un petit projet, on prévoit d’exploiter uniquement les alluvions.

Bizi : Non ! En tout cas dans votre demande de permis, vous dîtes autre chose.

M. Laloua : Oui mais on y a renoncé officiellement dans un communiqué de presse.

Bizi : Et vous avez modifié la demande de permis en fonction ?

«Bizi! à Sudmine : «On sait ce que valent ces engagements ! Comme l’engagement de M. Vallier qui disait qu’il écouterait l’avis de la population et en l’occurrence il n’est absolument pas en train de l’écouter puisque non seulement la population mais aussi les élus, tous, sont opposés»»

M. Laloua : Non.

Bizi : Un communiqué de presse, ça n’a aucune valeur. Si ils vous acceptent la demande de permis, ils vous autorisent…

M. Laloua : C’est un engagement !

Bizi : On sait ce que valent ces engagements ! Comme l’engagement de Monsieur Vallier qui disait qu’il écouterait l’avis de la population et en l’occurrence il n’est absolument pas en train de l’écouter puisque non seulement la population mais aussi les élus, tous, sont opposés

M. Laloua : Nous on a fait notre demande, on attend la décision finale et on verra.

Bizi : Oui et vous savez que là vous êtes en train de déclencher une mobilisation en Pays Basque. Nous là, on fait cette première action en venant ici mais, vous, vous créez un climat de tension en Pays Basque avec cette inquiétude…

M. Laloua : Ca, c’est pas que de notre faute.

Bizi : Attendez : il y a des filières entières qui se disent que peut être demain on va avoir des mines qui vont saccager les nappes phréatiques et l’image de marque de la région…

M. Laloua : C’est une faute de l’Etat aussi, qui aurait dû organiser justement une commission officielle, que nous on a voulu organiser nous-même, et que l’Etat n’a pas voulu organiser. Il n’a pas voulu prendre l’initiative d’organiser une commission de concertation et une réunion de présentation du projet, ce qui fait que tout est parti en vrille. Alors que c’est vraiment un projet qui est limité en terme d’investissements et d’impacts sur l’environnement.

Bizi : On a sans doute deux mille emplois liés aux filières AOP agricoles, aux thermes de Cambo, à l’économie touristique…

M. Laloua : On va pas détruire tous ces emplois…

Bizi : Mais nous on a pas envie de prendre un risque que ce soit par rapport à l’image de marque et à la qualité de l’environnement de cette zone etc…

M. Laloua : Comment vous pouvez dire que notre projet sera nuisible et ne donnera pas une bonne image ? Nous on prévoyait justement de créer une filière de l’or local, de faire un projet respectueux de l’environnement, chercher en surface. Nous on a pas l’ambition de faire une grosse mine industrielle.

Bizi : Bon, j’imagine que c’est pour vous faire du bénéf, vous faites pas ça pour la beauté de geste.

M. Laloua : Ben si aussi !

Bizi : Alors, arrêtez parce que personne ne trouve ça beau chez nous.

M. Laloua : Vous ne me laissez même pas parler.

Bizi : Non, pardon, on vous laisse parler.

« Sudmine à Bizi! : «Nous, on a un projet qui était ambitieux mais pas de mines industrielles, c’est du semi-industriel, artisanal, une filière locale d’or basque.»»

M. Laloua : J’ai eu l’occasion de le répéter plusieurs fois. Nous, on a un projet qui était ambitieux mais pas de mines industrielles, c’est du semi-industriel, artisanal, une filière locale de l’or basque. Enfin, on voulait vraiment que ce soit un projet de territoire. Comme une exploitation agricole, c’est une exploitation minière locale, artisanale, une filière de l’or basque, créer des bijoux au Pays Basque avec de l’or produit au Pays Basque, enfin c’était vraiment un projet ancré dans le territoire.

Bizi : Vous comprenez le paradoxe absolu de prétendre penser un projet de territoire alors que les gens du territoire en question n’en veulent pas et l’ont affirmé.

M. Laloua : Le projet a été complètement déformé par vos réunions de présentation : des opposants qui qui parlent d’extraction de l’or à l’arsenic alors que ça n’existe pas l’extraction de l’or à l’arsenic.

Bizi : Non, non.

M. Laloua : On a pas eu l’occasion de s’exprimer donc on a pas eu l’occasion de présenter notre projet.

Bizi : Non, c’est vous qui déformez les propos des opposants parce qu’ils n’ont pas parlé de projet d’extraction à l’arsenic.

M. Laloua : Si, si.

Bizi : Non, ils ont parlé de cyanure, ils ont parlé de…

M. Laloua : si, si, je peux vous ressortir l’interview en question…

Bizi : En fait, chez nous, il y a eu toute l’argumentation des opposants au projet et votre argumentation qui ont été relayées dans la presse locale : Sud Ouest, Mediabask… Moi j’ai lu les deux.

M. Laloua : Ils ont dit qu’on allait faire des mines industrielles pour aller chercher l’or primaire alors que ce n’est pas notre projet.

Bizi : Euh excusez-moi mais c’est ce qui est marqué dans le permis de recherche.

M. Laloua : On a dit qu’on allait étudier la source. La source ! Mais on ne va pas exploiter de l’or primaire au Pays Basque.

Bizi : Oui, mais vous vous imaginez, vous nous demandez de vous faire confiance sur : premièrement ; votre volonté de créer un projet de territoire mais vous êtes prêts à maintenir ce projet de territoire alors que la totalité des acteurs du territoire ont dit non. Deuxièmement, vous dîtes « Oui, mais nous on veut faire un projet super méga cool avec des bijoutiers locaux etc.. » et une fois que vous avez le permis d’exploitation, nous n’avons aucune garantie que vous allez faire ça. D’abord, on est même pas sûr que c’est vous qui allez exploiter. On pense que vous arrachez le permis d’exploration qui vous permet ça, et après qui nous dit que vous ne le vendez pas à telle entreprise qui elle fera tel projet et ainsi de suite.

Et en plus, l’autre chose, il y a un problème philosophique de fond  c’est-à-dire que nous on a une vision de la société différente, on ne veut pas d’or ! L’or pour des bijoux, pour la spéculation financière ou la thésaurisation en lingots d’or etc. mais nous, notre terre on préfère l’utiliser pour faire de la bonne nourriture, pour soigner des gens, pour y vivre… Nous, on veut vivre normalement, on a pas besoin d’or. Donc écoutez, vous n’allez pas nous imposer un modèle de société dont on ne veut pas. Nous, moins on extrait, mieux c’est. En plus c’est des quantités énormes d’énergies qui seront nécessaires pour ce type de projet.

M. Laloua : Non, ce sera comme une carrière.

Bizi : Oui, c’est ça ! C’est ultra consommateur en électricité. Aujourd’hui, on sait très bien avec le défi climatique qu’il faut réduire notre consommation d’énergie et vous, vous venez dans une zone où personne ne demande ça, faire un truc qui va consommer une énorme quantité d’énergie.

M. Laloua : Dans ce cas-là, vous refusez tout progrès…

« Bizi! à la réplique de Sudmine disant « Vous refusez tout progrès » : «Il faut développer des choses qui isolent les logements, qui font de l’agriculture de qualité, qui respectent les sols et l’environnement, il y a pleins de choses à développer, les transports collectifs, les transports doux, etc. Par contre cette fuite en avant, c’est celle qui est en train de dérégler le climat…»»

Bizi : Non ! Il faut développer des choses qui isolent les logements, qui font de l’agriculture de qualité, qui respectent les sols et l’environnement, il y a pleins de choses à développer, les transports collectifs, les transports doux etc.. Par contre cette fuite en avant là, c’est celle qui est en train de dérégler le climat, c’est celle qui est en train de multiplier la violence des évènements climatiques extrêmes partout dans le monde.

M. Laloua : Ne mettez pas tout ça sur le dos de Sudmine.

Bizi : Mais oui, entre autres C’est tout ce modèle-là qui est en train de tout dérégler. Vous avez entendu parler du jour du dépassement ?

M. Laloua : Oui, mais regardez vos téléphones portables. Vos téléphones portables, il faut les produire, ils sont composés de métaux et les métaux ils viennent d’où ?

Bizi : Mais bien sûr…

M. Laloua : Ils viennent des pays sous-développés… Là c’est l’occasion de savoir d’où vient la matière première ! C’est sûr c’est mieux d’aller chercher l’or ou les métaux dans les pays en voie de développement.

Bizi :  Non, non, non. Je pense qu’on est assez conséquents, on mène aussi d’autres batailles, en dehors de ce refus de ce projet de mines d’or. On mène des batailles contre l’obsolescence programmée pour que les produits, justement comme les téléphones portables, ne durent pas que deux ans mais durent dix ans ou quinze ans, comme ça le serait tout à fait possible. On bataille chez nous pour développer des alternatives au « tout voiture », des déplacements en transports collectifs, en vélo etc.. On développe des filières de circuit-courts de distribution de l’alimentation et des biens, on a créé une monnaie locale etc… Donc nous on cherche vraiment à limiter l’empreinte écologique, vous vous êtes en train de…

M. Laloua : Ben, vous pouvez faire une pièce d’or !

Bizi : Mais enfin, à quoi ça sert ? Toute cette débauche d’énergie et tous ces saccages environnementaux pour quelque chose dont on a pas besoin. Nous on vous dit, on en a pas besoin de cet or donc ne nous imposez pas une production dont on ne veut pas. C’est ce que l’on explique avec cette action, vous imaginez si nous, on venait creuser ici ?

M. Laloua : Il faut une autorisation pour ça.

Bizi  : Oui et du coup, on demande un permis et ensuite vous avez des sondages de terrain etc.. Une fois qu’on a les autorisations, des gens qui habitent à 700km de chez vous font ça, des gens à qui personne d’ici n’a rien demandé.

M. Laloua : Ça c’est une partie aussi, de pourquoi notre projet n’a pas été accepté. Mais nous, on voulait engager un partenariat avec un partenaire local, pour que ce soit un projet basque. On sait bien qu’en Pays Basque, c’est un sujet sensible aussi.

Bizi  : Oui. C’est pour ça aussi que tout ça est étonnant. Une fois que vous aurez le permis, vous croyez vraiment que vous allez pouvoir faire ces sondages ? A chaque sondage, vous allez avoir une manifestation avec des tracteurs, des élus, des gens qui vont se coucher devant vos véhicules, qui vont s’enchaîner à vos véhicules… enfin ça va être ça sans arrêt.

M. Laloua : En tout cas, nous on a déposé notre demande, on attend la décision qui sera surement négative.

Bizi  : Vous êtes pessimiste ?

M. Laloua : Ben, depuis trois ans on ne nous donne pas de nouvelles. Parce que vous savez qu’au bout de deux ans il y a un refus tacite, s’il n’y a pas de réponse, là, ça fait trois ans. L’Etat a sa responsabilité dans tout ce phénomène médiatique qui s’est déclenché. Il laisse tout faire. Il ne nous laisse pas communiquer, il n’organise pas de réunion publique…

Bizi : Vous n’avez pas communiqué ! Je vous rappelle que quand vous avez déposé cette demande de permis, personne n’a été mis au courant. Nous on a su qu’il y avait cette demande de permis par les associations qui travaillent contre les projets miniers en Bretagne, qui du coup avaient une instance de veille sur les demandes de permis, et ce sont elles qui nous ont averti. Vous, jamais vous n’avez averti des représentants du Pays Basque. Le Conseil de Développement du Pays Basque n’a jamais été saisi sur ça.

M. Laloua : On est sur un projet qui est très long. C’est un projet sur 5 à 10 ans de recherche.

Bizi  : Vous vous rendez compte ? Vous voyez bien que vous dîtes que personne ne veut discuter, mais si nous on n’avait pas appris de notre côté qu’il y avait ce projet ; vous, vous ne seriez pas venu en disant « Tiens, on voudrait rencontrer le Conseil de Développement du Pays Basque pour lui exposer un projet qu’on a pour ce territoire ».

M. Laloua : Si, une fois qu’on aurait eu le permis, toute une partie du projet c’était, en parallèle de l’exploration, de venir en parler.

Bizi  : Ça ne vous est pas venu à l’idée avant de demander le permis de recherche, d’aller en parler avec les acteurs du territoire voir ce qu’ils en pensaient.

M. Laloua : C’est sûr que comme ça, on ne ferait rien parce qu’en France tout le monde serait opposé à n’importe quel projet.

«Bizi! à Sudmine : «On est en train de consommer trois planètes, alors qu’on n’en a qu’une.»»

Bizi  : Et bien alors respectez ça ! On est en train de consommer trois planètes, alors qu’on en n’a qu’une. Il y a peut-être une logique à ce que les gens veulent qu’on arrête de faire des projets partout. Bien sûr qu’on peut toujours dire « Ils sont cons ! » mais on nous rabâche partout, et nous on écoute les scientifiques, qu’on consomme trois planètes c’est-à-dire qu’on est en train de dérégler de manière irréversible tous les grands équilibres, de créer des conditions de vie inhumaines pour les enfants nés aujourd’hui, nous on a envie d’arrêter cette fuite en avant. Alors bien sûr qu’on va s’opposer à tout ce qui n’est pas indispensable, ça c’est sûr ! Nous, on a envie d’aménagements durables, soutenables, de choses qui font manger les gens, les loger dans des conditions décentes et sobres énergétiquement. On a pas besoin d’or, ça ne nourrit personne !

M. Laloua : Ben si, ça va générer des emplois.

Bizi  : Ben non, alors de l’emploi, vous n’avez qu’à aller faire un trou dans la route à côté et puis embaucher d’autres gens pour le reboucher, ça crée de l’emploi. C’est de l’emploi utile qu’on veut ! De l’emploi en plus, on a de quoi en créer. Nous, on a fait justement toute une étude qui montrait qu’il y a dix milles emplois  créables en Pays Basque nord, par une politique climatique et de transition énergétique ambitieuse. On a les chiffres, les catégories…

M Laloua : Par les énergies renouvelables…

Bizi  : Pas que, pas que ! Il y a les filières de recyclage, l’isolation des logements, la reconversion d’une partie de l’agriculture…

M. Laloua : Mais l’isolation, l’isolation… Mais vous la faites avec quoi l’isolation ? Il en faut des matériaux.

Bizi  : Oui ! Je ne suis pas contre tous matériaux, mais par contre l’or il ne sert à rien.

M. Laloua : Mais en plus de l’or, il y aura du gravier, le gravier, on peut l’exploiter aussi, c’est dans le projet aussi

« Bizi! à Sudmine : «L’or dont on a besoin pour les produits industriels, c’est-à-dire pour le fonctionnement de la société, on en tire trois fois plus provenant du recyclage que ce que vous allez trouver dans vos mines.»»

Bizi  : L’or dont on a besoin pour les produits industriels, c’est-à-dire pour le fonctionnement de la société, on en tire trois fois plus provenant du recyclage que ce que vous allez trouver dans vos mines. De quoi on a besoin d’aller creuser les sols pour ça ?

M. Laloua : C’est un point de vue…on ne sera jamais d’accord de toutes façons….

Bizi : Non, mais au moins on pourrait être d’accord sur..

M. Laloua : Ecoutez, essayez au moins de nous faire confiance en ne nous assimilant pas à la grosse multinationale qui

Bizi  : Non, on ne vous fait pas confiance à priori. On n’a aucune raison de vous faire confiance : on ne vous connaît pas, vous déposez un permis de recherche en douce sans avertir personne dans le coin. Et maintenant, alors que tout le monde a donné clairement un avis contre ce projet, vous vous obstinez à le maintenir. On a aucune raison de vous faire confiance. Vous n’êtes pas une ONG qui fait ça pour le bien public.

M. Laloua : Vous ne nous faîtes pas confiance.

Bizi  : Mais je n’ai rien contre vous mais…

M. Laloua : Arrêtez de nous assimiler à une grosse multinationale. Regardez, moi j’ai mon boulot en parallèle. Je fais ça à côté.

Bizi  : Oui, mais c’est parce que vous cherchez le Graal, c’est-à-dire le truc qui vous fera le jackpot etc.. Vous allez pas me dire que vous êtes une ONG venant secourir les pauvres Basques qui meurent de faim…On est très bien comme ça !

M. Laloua : Non, non, c’est un projet qui nous tient à cœur.

Bizi  : Oui, mais qui vous tient à cœur parce que vous espérez faire votre jackpot dessus et ça je le comprends. Vous espérez trouver LE truc, et après vous allez vendre ce truc à une société qui va vous l’acheter.

M. Laloua : Non, non, pas pour le Pays Basque ! On va pas vous ramener des chinois ou des australiens…

Bizi  : Les chinois ou les gens de Seichebrières , pour moi ce n’est pas un problème de race ou d’origine

M. Laloua : De toutes façons, là vous dépensez de l’argent, vous faîtes des déplacements pour pas grand chose, parce que c’est….

Bizi : Oui enfin, vous, vous dîtes que ça sera refusé…

M. Laloua : Ça sera pas annulé, l’Etat prendra pas de décision….

Bizi : …ce que j’espère. J’espère que ce sera refusé. Le problème c’est que, nous, on a cette épée de Damoclès au-dessus de la tête, et on veut se la sortir. Donc on voudrait que vous retiriez cette demande de permis. Tant qu’il est en capacité d’être étudié et accepté, nous on reviendra ici.

M. Laloua : Vous dépensez de l’argent et du temps aussi donc…

Bizi : Vous, arrêtez d’en dépenser, vraiment je vous le jure, vous n’arriverez pas à faire vos sondages de terrain chez nous. Donc là, vous êtes en train de perdre de l’énergie et de l’argent. Vous savez, quand ils ont voulu faire la voie nouvelle LGV, on avait déjà un TGV et nous on avait jamais demandé de nouvelles voies LGV, c’est RFF, donc un truc qui a les reins un peu plus costaud que vous : ils ont voulu faire quatre-vingt sondages de terrain en Pays Basque, ils ont réussi à en faire cinq… les autres, ils n’ont jamais réussi, ils avaient en permanence des gens qui se bloquaient autour des véhicules etc. ils n’ont jamais réussi, ils ont renoncé à faire leurs sondages. Donc je vous le dis, pour moi c’est une dépense de temps et d’énergie etc. Là, vous vous plantez. En plus je pense que petit à petit, Sudmine va commencer à être connu… Vous étiez, vous savez dans les premiers hashtags de la journée aujourd’hui. Sudmine est monté au cinquième niveau. Le premier niveau, c’était  Paris et les jeux olympiques, et vous, vous étiez au niveau 5 ! C’est-à-dire les sujets les plus parlés sur Twitter.

De toute façon, là la mobilisation a commencé. Ce samedi on a une manifestation où on va être des milliers à Bayonne et à partir de là, tant que ce permis n’est pas refusé on va continuer. En plus maintenant qu’on connaît bien la région… Bon, très bien, ben on en reste là. Bonne journée !

Poignée de mains entre Michaël Laloua et les militants de Bizi

M. Laloua : Bon ben bonne visite de la région.

Bizi : Oui, on repère pour les prochaines actions….

Soutenez Enbata !

Indépendant, sans pub, en accès libre,
financé par ses lecteurs
Faites un don à Enbata.info
ou abonnez-vous au mensuel papier

Enbata.info est un webdomadaire d’actualité abertzale et progressiste, qui accompagne et complète la revue papier et mensuelle Enbata, plus axée sur la réflexion, le débat, l’approfondissement de certains sujets.

Les temps sont difficiles, et nous savons que tout le monde n’a pas la possibilité de payer pour de l’information. Mais nous sommes financés par les dons de nos lectrices et lecteurs, et les abonnements au mensuel papier : nous dépendons de la générosité de celles et ceux qui peuvent se le permettre.

« Les choses sans prix ont souvent une grande valeur » Mixel Berhocoirigoin
Cette aide est vitale. Grâce à votre soutien, nous continuerons à proposer les articles d'Enbata.Info en libre accès et gratuits, afin que des milliers de personnes puissent continuer à les lire chaque semaine, pour faire ainsi avancer la cause abertzale et l’ancrer dans une perspective résolument progressiste, ouverte et solidaire des autres peuples et territoires.

Chaque don a de l’importance, même si vous ne pouvez donner que quelques euros. Quel que soit son montant, votre soutien est essentiel pour nous permettre de continuer notre mission.


Pour tout soutien de 50€/eusko ou plus, vous pourrez recevoir ou offrir un abonnement annuel d'Enbata à l'adresse postale indiquée. Milesker.

Si vous êtes imposable, votre don bénéficiera d’une déduction fiscale (un don de 50 euros / eusko ne vous en coûtera que 17).

Enbata sustengatu !

Independentea, publizitaterik gabekoa, sarbide irekia, bere irakurleek diruztatua
Enbata.Info-ri emaitza bat egin
edo harpidetu zaitezte hilabetekariari

Enbata.info aktualitate abertzale eta progresista aipatzen duen web astekaria da, hilabatero argitaratzen den paperezko Enbata-ren bertsioa segitzen eta osatzen duena, azken hau hausnarketara, eztabaidara eta zenbait gairen azterketa sakonera bideratuagoa delarik.

Garai gogorrak dira, eta badakigu denek ez dutela informazioa ordaintzeko ahalik. Baina irakurleen emaitzek eta paperezko hilabetekariaren harpidetzek finantzatzen gaituzte: ordaindu dezaketenen eskuzabaltasunaren menpe gaude.

«Preziorik gabeko gauzek, usu, balio handia dute» Mixel Berhocoirigoin
Laguntza hau ezinbestekoa zaigu. Zuen sustenguari esker, Enbata.Info artikuluak sarbide librean eta urririk eskaintzen segituko dugu, milaka lagunek astero irakurtzen segi dezaten, hola erronka abertzalea aitzinarazteko eta ikuspegi argiki aurrerakoi, ireki eta beste herri eta lurraldeekiko solidario batean ainguratuz.

Emaitza oro garrantzitsua da, nahiz eta euro/eusko guti batzuk eman. Zenbatekoa edozein heinekoa izanik ere, zure laguntza ezinbestekoa zaigu gure eginkizuna segitzeko.


50€/eusko edo gehiagoko edozein sustengurentzat, Enbataren urteko harpidetza lortzen edo eskaintzen ahalko duzu zehaztuko duzun posta helbidean. Milesker.

Zergapean bazira, zure emaitzak zerga beherapena ekarriko dizu (50 euro / eusko-ko emaitzak, 17 baizik ez zaizu gostako).

Une réflexion sur « Sudmine aux antipodes »

Les commentaires sont fermés.