On ne peut pas reprocher au Conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques de manquer de suite dans les idées. En mars dernier, le président Jean-Jacques Lasserre, entouré des représentants de l’Etat et de la Région, a présenté le plan 2018-2023 pour la station de Gourette, volet important du plan Montagne sur lequel planche la collectivité. Des investissements de 32,2 millions d’euros ont été annoncés pour le domaine skiable. La répartition de l’enveloppe entre les trois collectivités –Etat, Région, Département- n’a pas été dévoilée.
Pour le département, les investissements seront pilotés par l’EPSA (Etablissement public des stations d’altitude), organisme départemental qui gère les stations de ski béarnaises de Gourette et La Pierre Saint-Martin. La troisième station du département, Artouste, est gérée par un opérateur privé.
De la suite dans les idées, assurément. Depuis 2000, c’est plus de 70 millions d’euros que le département a englouti en investissement dans les deux stations d’altitude (50 millions pour Gourette et 23 pour la Pierre) pour financer routes d’accès, parkings, remontées mécaniques ou canons à neige. Dans le même temps, le loyer acquitté, en contrepartie, par l’EPSA, pour l’utilisation du domaine skiable, couvre à peine les intérêts des emprunts contractés à cet effet par le département. Tout cela pour à peine 4% de l’activité touristique du département.
Ainsi donc, en une vingtaine d’années, plus de 100 millions d’euros auront été “investis” sur seulement deux endroits de villégiature. Sans compter la subvention de plusieurs centaines de milliers d’euros consentie chaque année par le département pour couvrir le déficit des deux stations. Car en dépit de ces investissements pharaoniques, les stations restent chroniquement déficitaires.
Ces choix de politique publique du Conseil départemental posent questions. Disons-le d’emblée, loin de moi l’idée de pointer telle ou telle majorité en charge du département depuis vingt ans. Sous Bayrou (droite), Labazée (socialiste) ou Lasserre (re-droite), le consensus en matière d’investissement dans les stations d’altitude béarnaises a été total. Tous d’accord pour verser dans le tonneau des Danaïdes.
Mais les questions sont bien là. Est-on sûr que ces investissements sont bien appropriés alors que le rapide changement climatique en cours rend l’avenir de l’enneigement à basse et moyenne altitude de plus en plus aléatoire? Est-on sûr que l’utilisation intensive de canons à neige polluants est en mesure de faire face aux conséquences du réchauffement hivernal? Nos décideurs en sont si peu convaincus eux-mêmes qu’on nous propose de réfléchir d’urgence sur le développement d’activités estivales ou hors ski alternatives. Avec, cela va sans dire, de nouvelles dépenses publiques à la clé.
Est-on sûr que tout cet argent public va en priorité au bien-être de celles et ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin? Rappelons ici que seuls 8% de la population fréquente les stations de ski, proportion inchangée depuis 40 ans. Que l’on sache, ce ne sont pas les plus nécessiteux de notre société. Est-on sûr que ces sommes considérables englouties pour le ski au nom du maintien de l’emploi en zone de montagne n’auraient pas un retour sur investissement plus profitable en termes sociaux et économiques si elles étaient orientées vers le développement d’activités alternatives moins précaires, plus durables et plus respectueuses des personnes et de l’environnement montagnard ? Que gagne-t-on à privilégier les intérêts financiers de groupes ou de commerçants dont certains ne sont même pas localisés dans les P-A?
Est-on sûr que ces sommes considérables englouties pour le ski
n’auraient pas un retour sur investissement plus profitable
en termes sociaux et économiques
si elles étaient orientées vers le développement d’activités alternatives
moins précaires, plus durables et plus respectueuses
des personnes et de l’environnement montagnard ?
Depuis 2012, le petit train de la Rhune, auparavant concédé à la CFTA (Chemins de fer et transport automobile) du groupe Veolia Transport, est repris en gestion directe par le département par le biais de l’EPSA. Pour une fois, un équipement public rentable revient à la collectivité propriétaire qui bénéficie ainsi des retombées financières générées. On ne peut que s’en réjouir, tant on nous a habitués à l’inverse. Mais là où le bât blesse, c’est que le Pays Basque ne voit pas un centime de ces bénéfices. L’EPSA les utilise pour couvrir ou, si vous préférez cacher, une partie du trou béant des stations béarnaises.
Dès lors, on comprend mieux les raisons pour lesquelles le Conseil départemental veut bétonner le sommet de la Rhune pour “accueillir” encore davantage de touristes. Arc-boutés sur leur politique de fuite en avant qui les pousse à étendre le domaine skiable de Gourette jusqu’à Anglas ou à transformer la Rhune en prêt-à-consommer touristique de masse aux conséquences environnementales désastreuses, les responsables départementaux ne reculent devant aucun saccage ni aucun gaspillage de l’argent public.
Le vieil abertzale que je suis ne peut qu’appeler de ses voeux la création urgente d’une collectivité à statut particulier qui sera, enfin, maître des investissements à réaliser pour le développement social et économique durable de notre territoire. Pau ne sera jamais notre allié. Les élus départementaux qui veillent sur l’intégrité du département non plus. Tant qu’Iparralde sera soumis au bon vouloir d’instances exogènes, nous ne nous en sortirons pas. Les choix (d)énoncés dans cet article le démontrent.
A 100% d’accord avec cet article chaque fois qu’une collectivité gère des activités commerciales c’est le déficit assuré couvert bien sir avec nos impots station de montagne réseau de transport etc…execption le train de la Rhune qui ne va pas tarder a basculer avec les investissements pharaonique programmés.
Agustin