Isabelle Capdeville – BOST (Berroetako Okupazioaren Sustengu Taldea)
Le 23 juin 2021, ELB et Lurzaindia ont initié une occupation de terrain de 12 hectares à Berroeta, à Arbonne. Depuis, une grosse centaine de citoyen.ne.s s’est relayée nuit et jour pour occuper activement ce lieu de vie et d’échange. Ils entendent ainsi dénoncer l’accaparement de la terre agricole par de riches propriétaires qui, de fait, la détournent de sa fonction nourricière.
L’exemple de Berroeta n’est malheureusement pas un cas isolé. Autour de nous, nombreux sont les témoignages d’habitants voyant près de chez eux des terres agricoles devenues constructibles. Chaque année, en moyenne 250 hectares agricoles disparaissent pour toujours au Pays Basque Nord. Si le phénomène n’est pas nouveau, il semble s’être emballé ces derniers mois, générant un sentiment d’impuissance face à l’arrivée de personnes à (très) hauts revenus, prêtes à tout pour une belle maison avec vue.
Penser global, agir local
Au Pays Basque, comme dans beaucoup trop d’endroits dans le monde, la réduction des terres agricoles est un problème qui nous concerne tous. C’est pour cela qu’il est urgent d’agir ici et maintenant. C’est ce qu’ont fait les militants d’ELB et de Lurzaindia. Peu habitués à être des spectateurs passifs de notre destin, ils ont affirmé dès le début leur détermination à poursuivre ce combat jusqu’à la victoire. Cette étincelle de début d’été a rencontré un fort écho dans la société et a suscité une belle vague de soutien de la part de paysans, de citadins, d’artistes, de voisins, d’artisans, de restaurateurs, d’élus… Ce qui ne devait durer que quelques jours, voire “deux semaines, grand maximum”, a finalement réussi à passer le cap de l’été et se prépare à passer un automne pluvieux et un hiver froid s’il le faut.
Un comité de soutien
Les batailles de longue haleine ne doivent pas être abandonnées à cause de la fatigue ou de la lassitude. Conscient de la nécessité d’alléger le travail des initiateurs, un comité de soutien s’est constitué début août. En lien étroit avec ELB et Lurzaindia en charge de la partie politique, juridique et foncière de l’affaire, ce comité ouvert et participatif travaille autour de trois axes : gestion de l’agenda d’occupation, organisation d’animations et partie logistique. Il réunit tous les lundis, de 19h à 20h30, des personnes d’origine, de sensibilité, d’âge, de parcours et de culture militante très diverses.
Dans une société de zapping où même l’engagement associatif semble s’ubériser, la beauté d’une telle lutte, c’est qu’on y passe du temps et qu’on y partage des tranches de vie. A Arbonne, depuis fin juin on cuisine, on dort, on cause politique, on petit déjeune avec des inconnus, on cultive une parcelle du champ, on emménage la maison, on rit, on joue aux cartes, on apprend les uns des autres, on organise des concerts, on vide les chiottes sèches, on regarde les enfants jouer, on écoute des conférences, on débat beaucoup et on improvise un peu.
Appel à densifier l’occupation
Les prochaines semaines seront décisives. C’est la préservation d’une douzaine d’hectares en entrée de ville, qui est en jeu, mais qui s’inscrit dans un cadre plus large de flambée du prix de l’immobilier et de crise climatique. Tout est lié. Et gagner cette bataille nous permettra d’aborder les prochaines avec plus d’entrain et de détermination.
Le collectif lance donc un appel à solidarité qui peut se manifester par un don de matériel, l’organisation d’animations sur place ou tout simplement par une présence sur place. Tout au long du mois de septembre, les villes et villages du Pays Basque se relaieront pour tenir l’occupation durant 24 heures. Car dans cette occupation, c’est par notre présence que nous exprimons notre attachement à la préservation de la vocation nourricière de la terre et notre rejet de cette spéculation immobilière qui gangrène notre territoire. Chacun a sa place et son importance. Soyons le grain de sable qui bloquera les rouages d’un système qui semblait jusque-là inatteignable !
Ama lurra zain dezagun !