La Bressola, équivalent de Seaska en Catalogne, voulait acheter le monastère Ste Claire à Perpinya. Louis Aliot, maire Rassemblement national de la ville, s’y oppose en faisant valoir son droit de préemption. Le 23 octobre, 3000 Catalans défilent dans les rues de la cité pour exiger l’ouverture du futur collège-lycée d’enseignement catalan en immersion.
Le réseau des écoles immersives La Bressola rassemble sept établissements en Catalogne Nord, dont un collège, il scolarise 1050 élèves. Depuis plusieurs années, il est contraint de refuser une quarantaine d’élèves par an, faute de place. Il ne peut proposer aux enfants la continuité d’un enseignement au collège et au lycée. La Bressola souhaite ouvrir trois classes de collège à Perpinya, dès la rentrés 2022.
L’association se met donc en quête d’un bâtiment à acquérir. En mars 2021, elle visite le monastère de Saint-Claire à Perpignan. En avril, Charles Pons, premier adjoint de la ville, l’assure que la ville n’a pas de projet pour ce lieu et que le conseil municipal lui laisse les mains libres pour l’acquisition. L’élu précise qu’aucun droit de préemption ne sera exercé par la mairie.
Début mai, le président de La Bressola Joan-Sebastià Haydn est alerté par les services de l’urbanisme de probables contraintes techniques au nom d’un impossible changement de destination. « On nous dit de nous rapprocher du préfet, ce que nous faisons en juin. Il nous assure que le projet est possible, mais que l’accord du maire et la signature d’un sous-seing privé faciliteraient l’étude de faisabilité« . Le 6 août, le sous-seing privé est signé. La Bressola obtient les engagements de soutien de la Région (400.000 €), du Département (400 000 €) et de la Generalitat de Catalunya (750 000 €). Avec un prêt de 1,2 million d’euros et un apport de fonds propres de 80 000 €, les frais de 2,78 millions d’euros devaient être couverts. Le calendrier des travaux est élaboré.
Mais le 30 septembre, soit six jours avant la date limite pour déposer un droit de préemption, La Bressola est informée que la municipalité a exercé son pouvoir de préemption sur l’immeuble. Le projet est arrêté. « Une trahison incompréhensible », accusent la directrice et le président de La Bressola. L’association dépose deux recours au tribunal administratif de Montpellier, l’un pour excès de pouvoir, l’autre est un référé de suspension. Et elle dénonce publiquement les manœuvres du maire. Louis Alliot est très remonté par ce qu’il qualifie être « une cabale politicienne menée par des agitateurs qui prennent en otage une école et des parents d’élèves. C’est de la politique politicienne que je remarque, entre autres, depuis qu’Annabelle Brunet est élue sur ce canton et qui est l’agent principal du catalanisme sur le territoire français des Pyrénées-Orientales ». Pour le maire d’extrême droite, cette préemption n’a qu’un but unique, préserver le caractère patrimonial historique et culturel du monastère et providentiellement, il vient de découvrir qu’il est situé en zone inondable… Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage.
Le 23 octobre, entre 2000 et 3000 manifestants protestent dans les rues de Perpinya et scandent : « Avui i dema, l’escola en catala », aujourd’hui et demain, l’école en catalan. « Nous sommes là pour demander à Louis Aliot d’annuler cette préemption », déclare Eva Bertana, directrice de La Bressola qui regrette au passage une baisse de subvention de la mairie pour sa structure. En revenant sur leur parole, Aliot et son équipe «nous ont planté un couteau dans le dos. Nous ne pouvons qu’exprimer notre stupeur et notre sidération », ajoute-t-elle.
Contrairement à ce que les élus de la ville affirment, « nos écoles ne sont en rien un nid à ‘catalanistes d’extrême de gauche’, car désormais c’est leur obsession (…). Et non, M. le Maire, les parents qui mettent leurs enfants à La Bressola, le font pour la pédagogie et la gymnastique linguistique, un atout pour travailler des deux côtés des Pyrénées», commente l’association Agissons Pays Catalan.