Connue dans les années 90 pour son engagement écologiste à l’embouchure de l’Adour, elle est décédée la 20 octobre à Ayherre où elle s’était retirée. Ce fut une pionnière, à l’époque où l’écologie politique naissait à peine. Celles et ceux qui arpentent aujourd’hui les sables autour de la Barre d’Anglet, qui apprécient ce qui reste de territoires encore à demi ensauvagés, ignorent qu’ils le doivent à une femme, à l’époque « passionaria » de l’environnement, Colette Pince.
Dès 1974, l’immense site de la Barre, entre forêt de Chiberta, port de plaisance en amont et digue, était alors bien peu construit et balayé par les tempêtes déchaînées, « les orages désirés » et l’«azur bleu vorace». Un hippodrome abandonné gisait auprès des dunes, tel un paquebot échoué. Paysages mouvants, instables comme échevelés, envoûtants, ouverts à l’immensité et dévastés, le visiteur s’attendait à croiser sur la grève un naufrageur fugace, à voir surgir un Pascal Convert échappé d’Itsasgoity, Nora Mitrani au bras de Julien Gracq ou même Anne-Marie Stretter fixant le vice-consul de Lahore.
Ces lieux apparemment désolés et vides, mais si riches en leur abandon, suscitèrent l’appétit des promoteurs, dans le sillage de la MIACA.
Leur plan : la construction de 68.000 mètres carrés habitables autour d’une marina, 600 logements dans un nouveau quartier où vivront un millier d’habitants permanents, un port de plaisance doté de 720 anneaux, un institut océanographique, un hôtel et des commerces, etc. Ce projet pharaonique avait pour architecte François Spoerry, maître d’oeuvre de La Grande Motte (Hérault), de Port-Grimaud (Var) ou encore de Port-Liberté face à Manhattan.
Pendant plus de dix ans, Colette Pince à la tête d’un petit groupe irréductible, ayant pour seules armes une détermination sans faille et un modeste bulletin, «La puce des sables», livra bataille avec un cran inouï, rendit coup pour coup. Elle avait pour adversaires le maire d’Anglet Michel Bonnet de sinistre mémoire (1) et d’immenses intérêts financiers. Finalement, grâce à un arrêt inespéré du Conseil d’État, elle obtint l’abandon du projet. Ce qui fera joyeusement titrer Enbata, en une de son numéro du 1er août 1996: «Port-Chiberta, c’est fini».
Les aménagements actuels initiés par le maire suivant, Alain Lamassoure, ne plurent pas vraiment à Colette Pince. Mais grâce à son combat acharné, nous avons échappé au pire, la bétonisation complète et la touristification à outrance de ce morceau de lette. Tel est le nom local de ces écosystèmes littoraux dunaires battus par les vents atlantiques.
Recrue par les épreuves de cet affrontement, Colette Pince se retira à Aiherra, non loin des arbres, les vieux chênes basques si chers à son cœur. En son jardin secret, elle se ressourça auprès des sagesses orientales dont elle fit un livre sur le métier de vivre. Telle fut cette femme dont la force, la grandeur d’âme furent celles d’une l’indomptable résistante. Nous errerons longtemps autour de son exemple.
Terminons par un vœux. Que demain hommage lui soit rendu, qu’Anglet donne enfin son nom à une rue de la ville. Ce ne sera que justice.
(1) Voir l’odieux chantage que Michel Bonnet fit subir à Ramuntxo Camblong
Milesker, merci Ellande, merci Enbata pour cet hommage à Colette.
Je me permettrai d’y ajouter que bien avant l’affaire de la Barre, dès l’année 1973, elle faisait déjà partie des quelques rares adultes bienveillants envers les plus que remuants Jeunes et Nature dont je faisais partie. Je nommerai Jeanine Orgogozo, Jean Chartier, Bernard et Henriette Charbonneau, Jeannette Renard, Maître Maite Maniort, que de belles et bonnes personnes .
Biba zuek! Baionako Barra salbatu duzie !
Vous pouvez retrouver les pensées et avis -souvent virulents – de Colette dans le blog qu’elle a animé dans les dernières années de sa vie.
Blog prendre conscience