Améliorer la restauration collective, en proposant notamment des régimes moins carnés, présente de nombreuses vertus. C’est meilleur pour les enfants, mais aussi pour la planète et pour la production locale.
“ Le moral se trouve au fond de la gamelle ”, voilà une maxime qui a marqué mes années d’organisatrice de camps de vacances d’enfants. Permettre à chacun·e de se régaler, de manger sain et équilibré, à sa faim mais en évitant le gaspillage, tout en maîtrisant le budget… tout ceci est un art compliqué. Combien racontent, alors que des décennies ont passées, leurs traumatismes de cantine, plats insipides et froids, quantités inadaptées et ambiance insupportable ? (Beurk, la langue de boeuf froide de la cantine de l’internat…)
Assurer une restauration collective de qualité est un défi difficile à relever. Pourtant, les repas pris en extérieur constituent une grande part de notre alimentation. Selon un article du ministère de l’agriculture de 2020, en France, 1 repas sur 5 est pris hors domicile et 7,3 milliards de repas sont servis en moyenne chaque année. Pour les enfants, ce sont au moins 140 repas consommés chaque année à la cantine.
Levier important
Au delà des enjeux de santé et d’éducation à la nutrition, la restauration collective — placée en grande partie sous la responsabilité des collectivités territoriales — est également un levier important de politiques publiques pour faire bouger les lignes dans les secteurs de la production, de la distribution et de la consommation alimentaire :
C’est un levier pour développer la souveraineté alimentaire d’un territoire. Il existe ici des initiatives intéressantes. On peut citer la commune de Biriatou, qui a intégré à son plan Communal de sauvegarde des mesures pour pallier une éventuelle pénurie alimentaire causée par une rupture de la chaîne d’approvisionnement. La commune envisage des mesures qui amélioreront la résilience alimentaire.
La restauration collective est également un levier pour favoriser des modes de production plus qualitatifs. Au niveau français, la loi Egalim, promulguée en 2018, prévoit plusieurs mesures pour améliorer la qualité des repas servis par la restauration collective, avec notamment l’objectif d’un taux d’approvisionnement de 50 % de produits labellisés, dont 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. Ce sont autant de débouchés pour les producteurs.
Mais la restauration collective est aussi un levier puissant pour lutter contre le changement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre. 24 % de l’empreinte carbone hexagonale est due à l’alimentation, principalement du fait de l’élevage intensif. Comment baisser l’impact carbone de notre assiette ? En consommant des aliments moins transformés, en mangeant local, de saison, bio… Tout cela est bon pour la planète et bon pour la santé. Mais la mesure la plus efficace, et de loin, est de réduire la quantité de protéines animales. Une étude a montré que le fait de remplacer une fois par semaine la viande rouge et les produits laitiers par du poulet, du poisson, des oeufs ou une alternative végétale réduisait autant l’empreinte carbone que d’avoir une alimentation entièrement locale.
Empreinte carbone
Quoi ? Priver nos enfants de viande ? Mais dans notre territoire d’élevage, la viande, c’est notre culture, notre tradition, notre héritage ! Vous voulez la mort de nos paysans ? Et imposer des plats composés d’un “ steak’’ végétal industriel hyper trafiqué bourrés d’exhausteur de goût, réalisé avec du soja importé des terres déforestées du Brésil, quel piège à bobos ! Pauvres enfants pauvres pour qui la cantine est la seule opportunité d’avoir des repas équilibrés ! Reprenons les arguments un par un :
– L’alimentation carnée est dans nos traditions. Mais c’est pendant les 30 Glorieuses que la consommation de viande a explosé, c’est donc une tradition bien récente… Ces 30 dernières années, la consommation recule et c’est une bonne chose car l’impact négatif sur la santé de la surconsommation de produits animaux est avéré.
– C’est la faillite annoncée pour les éleveurs locaux. La proposition est d’intégrer aux menus moins de viande et de produits animaux mais de meilleure qualité, issus d’élevages plus respectueux de l’environnement et du bien-être animal. C’est une démarche dans laquelle est engagé un grand nombre d’acteurs locaux.
– L’alternative unique à la viande est le steak de soja transgénique du Brésil. L’alternative aux protéines animales, ce sont les protéines végétales contenues notamment dans les légumineuses : lentilles, haricots, fèves, pois cassés… et soja ! Si la production locale (qui existe) ne suffit pas à la demande actuellement, augmenter la demande locale et les débouchés ne pourra que soutenir la production. Et les recettes sont nombreuses de plats végétariens succulents et appréciés des enfants.
– La cantine est une opportunité pour certains enfants d’avoir un repas équilibré par jour. Justement ! Globalement, l’alimentation des pays occidentaux, et notamment des milieux populaires, souffre d’un excès de produits animaux et d’un déficit de produits végétaux.
Alors, pour la santé des enfants et le climat, moins et mieux de produits animaux ! Pour celles et ceux qui ne sont pas convaincus par ces arguments, il reste que depuis le 1er novembre 2019, conformément à la loi EGalim, toute la restauration scolaire — de la maternelle au lycée — doit proposer au moins un menu végétarien par semaine. Dura lex, sed lex. 😉