Un exercice difficile que de résumer en quelques lignes ce que représentait Jakes Abeberry, lui qui a tellement incarné toute notre histoire récente portant une vision claire et chaleureuse d’un Pays Basque ouvert et tolérant ! Nos routes se sont croisées dans les années 70/80 quand le Petit Bayonne abritait nombre de réfus et que l’heure était au militantisme de tous les instants ! Assez gravement blessée par une grenade lacrymogène en 83, lors de la manif appelée après l’assassinat de Kattu, je me souviens de son soutien affectueux et bien évidemment de son frère Maurice qui fut mon avocat dans mon procès contre l’Etat. La suite ne fut qu’un compagnonnage constant dans tous les moments décisifs pour la reconnaissance du Pays Basque, dans laquelle son rôle a été des plus déterminants !
Nous avons aussi joué conjointement… les témoins de moralité dans deux procès à Paris dont celui du journaliste Serge Quadruppani accusé de diffamation par Patrick Stéphanini alors rattaché au cabinet de Robert Pandraud. Enfermés dans une sorte de cage grillagée en attendant d’être entendus, nous avons avec l’écrivain Gilles Perrault et Mattin Carrère, alors curé d’Arbonne, passé plus de sept heures… dont paradoxalement je garde un excellent souvenir !
L’évocation de tous les moments partagés n’est juste pas possible tant la liste serait longue… ce que je retiens de cet homme aux mille facettes, c’est son énergie, son intelligence, son humour et ce regard malicieux quand se présentait une nouvelle idée à mettre en oeuvre immédiatement !
Se pointer par exemple à la réception du Premier Ministre Fillon avec trois pancartes que généreusement il partagea avec Sauveur Bacho et moi-même nous intimant l’ordre de les lever pendant le discours officiel… pour exiger une nouvelle fois une institution pour le Pays Basque ! Dans ces ambiances protocolaires compassée : effet garanti !
Jakes était aussi l’âme du journal où s’écrivent ces lignes, Enbata, seul hebdomadaire politique local encore existant, réceptacle de près de 60 ans de l’Histoire du Pays Basque !
Quel fabuleux héritage, que ce témoignage fidèle des années difficiles, des victoires et des échecs qui ont jalonné tant d’années !
De magnifiques archives et il est probable que sans sa persévérance cette aventure journalistique n’aurait pas traversé autant de décennies !
Autour de lui il a su aussi fédérer toute une équipe et faire vivre une vraie diversité de courants de pensées… car il était comme ça, Jakes, sensible au bouillonnement des idées et superbe contradicteur quand l’envie lui en prenait… Beaucoup ont fait les frais de ses réparties, dans des joutes orales qu’il affectionnait !
Avec Berhoko, Jakes fut un de ces militants inspirants qui ont balisé le chemin de bien de militant·e·s permettant à ce territoire d’écrire de très belles pages, de se transformer, de mieux maîtriser son destin !
Il était heureux que l’on soit parvenu en 2017 à la reconnaissance institutionnelle du Pays Basque, une étape importante qui ne peut qu’en annoncer d’autres !
Personnellement j’ai beaucoup regretté que, n’ayant plus de mandat électif, il ne soit pas des nôtres lors du premier conseil communautaire de la nouvelle agglomération ! Plus que tout autre, il aurait été à sa place !
Jusqu’à l’ultime moment, il aura été acteur de ce territoire qu’il aura infiniment marqué !
Adio eta milesker Jakes !