Béatrice Peyrucq vit et travaille à Bayonne depuis 1995. Militante et membre du secrétariat d’ABERTZALEEN BATASUNA, elle s’intéresse aux questions sociales, à celles concernant les services publics, le logement et l’urbanisme depuis de nombreuses années. Depuis 2012, elle contribue à la dynamique BIL GAITEN-EH BAI qui se constitue autour des municipales 2014. Elle tient ici à souligner une initiative d’habitant-e-s mobilisé-e-s.
Le mal-logement est un néologisme couramment employé pour définir soit la situation d’insalubrité ou de précarité de personnes dans le logement qu’elles occupent soit la situation de personnes qui aspirent à un logement. En cela, la situation des personnes qui habitent à ce jour les maisons du Hameau de Plantoun illustre «à l’insu de leur plein gré» ce concept.
Il y a quelques années, l’Office Public de l’Habitat de Bayonne lance une opération d’accession sociale qui permettrait à plus de 35 familles de voir aboutir leur souhait d’accéder à la propriété dans des conditions financières, écologiques et urbaines satisfaisantes. Le terrain est quasiment « donné » par la Communauté d’agglomération et il est assuré à qui veut l’entendre que les habitations obtiendront le label «Haute Qualité Environnementale», en vigueur alors. Sur plan, le projet est original. Les promesses d’une piscine nouvelle, d’un collège et d’une ZUP rénovés sont alors gages d’un renouveau dans le quartier et de qualité du cadre pour les familles qui l’investiront. La forme architecturale est controversée mais l’innovation est de mise.
Le Hameau est construit très vite : ses habitant-e-s déchantent dès les premières semaines. Les malfaçons apparaissent (fuites sur les terrasses, dégradations des façades, sols qui gondolent, surchauffe l’été, ventilations défectueuses, planchers trop fragiles….) et le label «HQE» est oublié (chauffage électrique sans panneau solaire, absence de récupérateur d’eau de pluie, isolation en laine de verre, matériaux «pauvres» et non recyclables). L’opération est un désastre : les habitants sont en lutte et une expertise préconise la démolition. Les habitant-e-s de Plantoun rejoignent la grande famille des mal-logés version «occupants en situation de précarité ou d’insalubrité». Il faudra du temps pour que les solutions de «relogement» évoquées mais non arrêtées à ce jour permettent à la plupart des acquéreurs de faire le deuil de cette épopée. Certains vivent une situation très déstabilisante du point de vue psychologique et financier et l’absence de réactivité et d’accompagnement d’Habitat Sud Atlantic est à souligner.
Pour les nouveaux occupants, en revanche Habitat sud Atlantique a été particulièrement réactif et a proposé un accompagnement «vers la sortie» immédiat. Fin juin 2013 , ils font partie de la famille des mal-logés version «sans logement». Observateurs, ils remarquent dans le Hameau du Plantoun, une maison vide, une de celles «à peine occupée, déjà quittée» par un acquéreur peu enclin sûrement à supporter une procédure judiciaire éprouvante pour les nerfs et le portefeuille. Ils s’installent, HSA réagit immédiatement et porte plainte, les mettant une première fois à la rue. Ils reviennent, réactifs eux aussi et en lutte désormais. HSA va plus loin. L’affaire passe au tribunal est en délibéré : le 14 août 2013, ils sauront s’ils peuvent rester ou s’ils seront chassés une nouvelle fois.
La situation des squatteurs n’est pas la même que celle de ses voisins accédant à la propriété mais le paradoxe est là : les familles qui ont acquis un logement il y a quelques années se retrouvent dans une situation d’extrême précarité quant à leur avenir immobilier. Parallèlement, leur sort croise actuellement le sort de personnes sans aucune autre solution que de venir occuper un logement entaché de malfaçons et voué à la démolition.
Dans les deux cas, c’est l’incurie du promoteur de l’opération qui est manifeste. D’autant moins justifiable que celui-ci se veut un organisme à vocation sociale. Plus de 30 familles d’accédant-e-s à la propriété vont pendant plusieurs années encore lutter pour un logement digne alors que leur démarche d’accession sociale à la propriété les vouaient normalement à la stabilité et à sortir de la liste des 4000 demandeurs de logements sociaux. Pendant ce temps, les squatteurs auront un toit sur la tête pendant quelques semaines ou quelques mois et ne sortent pas de cette liste de personnes qui ont besoin d’un logement.
Dans le cas du Plantoun, HSA, opérateur social, démontre qu’il abandonne ses missions essentielles de soutien et d’accompagnement de celles et ceux – et ils sont 80 % de la population – qui pourraient prétendre au logement social quel que soit la forme qu’il prendrait.
Pendant les fêtes de Bayonne, à partir de 17 h, le samedi 27 juillet 2013, les squatteurs nous accueilleront dans leur nouvelle maison pour parler de la situation du «mal-logement» et nous inviteront à rejoindre ou soutenir leurs luttes pour le droit au logement pour tous et toutes.