L’Edito du mensuel Enbata
Les bouleversements climatiques, tels que les tempêtes, les sécheresses prolongées et la montée du niveau de la mer, sont bien réels. Notre territoire aussi y est confronté, de plus en plus souvent et de plus en plus violemment. Et comme dans toutes les crises – économiques, sociales, climatiques… – ce sont toujours les classes les plus modestes qui trinquent en premier. Et pourtant, même face à l’évidence criante, les dirigeants continuent de regarder ailleurs.
On ne fait même plus semblant, les phrases creuses et dénuées de propositions alignées par Emmanuel Macron devant les deux plus grands journaux télévisés de l’hexagone ne cachent même plus l’incompétence et l’irresponsabilité.
Mais non, rien ne change, Paris a décidé que les Toulousains et les Castrais ont besoin d’une autoroute toute neuve et que c’est l’intérêt des Basques que de balafrer des kilomètres de paysages pour y faire passer un train à grande vitesse.
Effectivement, c’est la vraie question : qui décide ?
C’est donc le sujet de la souveraineté qui doit être abordé dans sa globalité lorsque nous parlons de lutte contre le changement climatique. La souveraineté énergétique ou alimentaire, bien évidemment, et la souveraineté politique aussi. Un concept qui en Euskal Herri, contrairement au discours ambiant en France, n’est pas synonyme de repli sur soi, de renfermement identitaire ou d’égoïsme xénophobe.
Nouvelle preuve est faite de cette dérive idéologique avec l’ouverture des débats autour de la future loi immigration qui arrive devant le Parlement français. Les catastrophes climatiques ne connaissent pourtant pas de frontières. Elles menacent l’ensemble de l’humanité et déplacent des populations entières. Face à cette réalité, une prise de conscience collective est nécessaire. Mais à Paris, rien ne change, la surenchère raciste et islamophobe n’en finit plus, faisant le jeu d’une extrême droite qui compte patiemment les jours avant une accession au pouvoir promise ou plutôt, nous en avons parfois le sentiment, offerte.
La lutte contre toutes formes de discriminations, le Pays Basque connaît bien. L’entrecroisement des batailles pour le logement, contre le réchauffement climatique, pour la justice sociale, contre les violences sexistes, pour une agriculture paysanne et durable, et contre les projets inutiles et dangereux, est au coeur des mobilisations depuis des décennies.
Sur toutes ces thématiques, plus de souveraineté amènerait des solutions concrètes et adaptées à la réalité du territoire.
Pendant ce temps, la France fait la guerre aux maires catalans qui parlent leur langue et lance son arsenal juridique contre tout parent breton qui menace l’unité républicaine en choisissant un prénom comportant un tilde.
Là non plus, pas de changement parisien.
Nos camarades kanaks ne pourront malheureusement pas témoigner du contraire. Ce début de mois, les responsables politiques de Kanaky étaient reçus à Matignon pour la reprise des discussions dans le cadre du processus d’autodétermination censé donner la possibilité aux Kanaks de décider de l’application pleine et entière de leur souveraineté. Le gouvernement qui avait imposé le troisième référendum en pleine pandémie ne veut rien entendre : pas de nouveau référendum prévu à court terme, ou encore un élargissement du corps électoral inacceptable. Si à Paris rien ne change, localement des changements sont amorcés et l’optimisme doit rester omniprésent au sein de nos processus d’émancipation. Une majorité indépendantiste en Polynésie, des discussions en faveur de l’autonomie de la Corse, un sénateur indépendantiste en Kanaky, une eurodéputée autonomiste en Bretagne…
Des lignes bougent doucement sur nos territoires, des mouvements s’amorcent pour réclamer et obtenir plus de souveraineté. A l’heure où Bagira procède au dépouillement et à l’analyse précise des résultats des 1500 réponses à l’enquête du mouvement abertzale (qui servira de matière première à l’élaboration d’une feuille de route commune aux diverses composantes du mouvement, pour fixer les objectifs transversaux et partagés des prochaines années), nul doute que ces défis de souveraineté du Pays Basque seront au coeur des préoccupations.