C’est dans un contexte agité sur le plan de l’organisation territoriale que le Préfet des Pyrénées-Atlantiques a annoncé quelles sont les issues qu’il envisage sur le dossier de la gouvernance Pays Basque. Après de longues semaines d’attente, on connait désormais les hypothèses d’organisations territoriales envisagées par le préfet. Elles seront donc au nombre de cinq, du statut quo à la « macro communauté de commune » en passant par différents syndicats mixtes. Bien content de se débarrasser de la patate chaude, le gouvernement place la balle dans le camp des élus locaux.
Deux blocs de propositions, des outils différents
Ces cinq propositions peuvent être classées en deux familles distinctes. D’une part les outils que l’on appelle «fédératifs» (pays, pôle d’équilibre territorial et pôle métropolitain) qui ont fait l’objet de lecture approfondie par les juristes dont l’expertise avait permis aux membres du Conseil des Elus de les considérer comme fragiles, n’allant pas assez loin et avait donc été écartés des débats.
Il semblerait bien difficile, et le préfet en a bien conscience, que les acteurs du territoire choisissent l’une de ces voix. D’autre part, deux propositions d’outils dits «intégrés» : la communauté d’agglomération et la communauté urbaine.
L’ensemble de ces structures nous les connaissons, et pour cause, elles existent depuis de longues années maintenant. Alors comment ne pas y avoir pensé avant ? Tout simplement car elles ont été écartées car ne répondant pas aux attentes en matière d’organisation ni au niveau des compétences.
L’organisation interne de ces outils et leurs compétences
Lors des annonces sur la méthode le représentant de l’Etat a fixé comme échéance le 1er janvier 2017 pour la mise en place de la nouvelle structure. Ce calendrier impose d’avoir une première assemblée qui ne soit pas issue du suffrage universel direct. Si l’on s’en tient à la loi actuelle, l’assemblée plénière de cet EPCI Pays Basque comporterait près de 200 membres puisque chaque commune a droit à un représentant minimum.
De plus, le fonctionnement des intercommunalité n’est pas aussi transparent que celui d’une Collectivité Territoriale. Dans un EPCI, les pouvoirs sont concentrés autour des membres du bureau alors que l’assemblée plénière est surtout une chambre d’enregistrement des décisions. Lors de sa proposition de Collectivité publiée en 2011, Batera prévoyait au contraire une assemblée élue directement comportant une quarantaine de membres choisi sur l’ensemble du territoire. Mieux encore, le statut particulier permettait d’avoir un pouvoir exécutif séparé du pouvoir délibérant renforçant ainsi la légitimité du président et facilitant la compréhension des citoyens. Est-il envisageable qu’une telle structure, d’autant plus si elle dotée de compétences spécifiques, comporte des membres désignés lors de la campagne des municipales ?
Enfin, au-delà de la structure il convient également de se poser la question des compétences. Les travaux des Conseil des Elus et Conseil de Développement avaient désigné, en plus des compétences départementales, 8 domaines d’interventions spécifiques qu’il conviendrait de gérer localement. La disparition programmée des Pyrénées-Atlantiques pose directement la question de la répartition des dossiers qui jusque-là étaient du ressort du Conseil Général. Mais au-delà même des compétences ce sont des moyens d’application de ces dernières dont il faut parler.
El le contrat territorial dans tout ça ?
Si le dossier de la gouvernance a occupé le devant de la scène, en coulisses l’élaboration du futur Contrat Territorial a mobilisé de nombreux acteurs au Conseil de Développement. A présent ce sont les élus qui auront la lourde tâche de négocier le nouveau contrat. Nul doute que la manière dont se passeront les négociations ainsi que le montant final de l’enveloppe sera regardé de près et interprété. Si l’on doit revoir à la baisse les ambitions en matière de gouvernance et que dans le même temps les moyens ne suivent pas, le bilan de l’opération risque d’amener des crispations et quelques mécontents.
La revendication d’une Collectivité Territoriale pour le Pays Basque repose sur deux piliers importants. Si elle apporte une reconnaissance institutionnelle maintes fois réclamée depuis quelques siècles elle permet aussi de doter notre territoire d’une structure efficace pour gérer les enjeux de demain. C’est cette solution qui est la plus crédible et la plus lisible pour les habitants et qui bénéficie du soutien le plus large de la société et des élus de tous bords politiques. La question qui se pose alors est de savoir si en acceptant une solution à minima on favorise l’obtention d’une Collectivité à statut particulier ou si au contraire la mise en place et le fonctionnement de la nouvelle structure ne renvoie pas notre aspiration première à une échéance plus lointaine, fissurant entre temps l’alliance large des pro-collectivité.
Ces prochaines semaines, les rendez-vous ne manqueront pas et chaque acteur aura son rôle à jouer. Existe-t-il une bonne stratégie parmi plusieurs mauvaises ? La détermination des élus et le soutien des militants permettront de répondre à ces questions mais il y a en tout cas des lignes rouges à ne pas franchir, des minimums non négociables. La meilleure stratégie sera celle qui abandonnera les initiatives personnelles pour maintenir le large front que l’on a connu ces dernières années, et l’on saura alors si cet Acte III de la décentralisation ressemble plus à une comédie à l’issue heureuse ou à une tragédie.