Incertitudes et manque de perspectives d’avenir, accentués par la crise sanitaire, peuvent être également des opportunités pour la jeunesse abertzale de questionner l’avenir politique du Pays Basque.
Se poser des questions de fond dans un contexte incertain compte parmi les exercices les plus difficiles. Car si le travail d’imagination est sérieusement mené, il aboutira nécessairement à une remise en question de certains des fonctionnements les plus ancrés du mouvement abertzale.
Tout aussi inconfortable ce processus soit-il, il n’en reste pas moins nécessaire pour proposer un projet abertzale adapté au monde de demain.
Stratégie de survie
C’est une chose bien connue des généticiens et des biologistes, la diversité d’un système permet de mieux s’adapter au changement. En partant de ce principe, il nous faut être proactifs en allant chercher de nous-mêmes cette diversité pour nous prémunir des bouleversements actuels et à venir. Misons sur des profils différents qui manquent aujourd’hui dans le mouvement abertzale et allons chercher les femmes, les jeunes, les personnes issus des minorités ethniques, religieuses…
C’est très certainement de là qu’émergeront les réponses les plus innovantes qui permettront au mouvement abertzale de se réinventer en profondeur.
La jeunesse a toujours incarné une force révolutionnaire et transformatrice, comme en témoigne l’histoire du mouvement abertzale à commencer par la création même d’Enbata. Pourtant, il y a à peine deux mois, le mouvement de jeunes abertzale Aintzina s’est dissout. Quelle est la marge laissée aujourd’hui à la jeunesse ? Comment s’assurer de la suite du mouvement abertzale ?
Une transmission en douceur
L’Histoire est un peu une perpétuelle course de relais où chaque génération essaye d’aller le plus loin possible avant de passer le témoin à la suivante. Or dans ce sport, le passage du témoin ne s’improvise pas, c’est un moment stratégique et décisif. Il en va de même pour le mouvement abertzale. Son histoire doit être transmise pour que les nouvelles générations de militant.es n’aient pas à réinventer l’eau chaude ni à répéter les erreurs du passé, tout en ayant la liberté d’essayer de nouvelles voies.
Dans ce processus de transmission, on pourrait très bien imaginer des formations intergénérationnelles basées sur un dialogue, des cours d’histoire contemporaine du Pays Basque dans les lycées, des podcasts et des chaînes Youtube de récits de militant.es historiques…
Rafraîchir l’abertzalisme
Devenant chaque jour davantage plus indispensable dans nos vies quotidiennes, Internet continue de bouleverser nos modes de communication. L’usage des réseaux sociaux est devenu systématique pour une majorité grandissante, ce qui a amené de nouvelles façons de communiquer et de s’informer, allant jusqu’à créer une “culture internet”. Les anglicismes, emojis, gifs(1) et mèmes(2) sont une partie intégrante des codes culturels de toute une génération. Sur le réseau social d’Instagram, des jeunes euskaldun du Pays Basque utilisent déjà ces codes pour commenter l’actualité, la politique, les pratiques culturelles avec dérision et sarcasme. Pour avoir des chances de convaincre les jeunes il est sans doute nécessaire d’utiliser ces canaux de communication mais aussi de rafraîchir l’image de l’abertzalisme pour qu’ils puissent s’y identifier. Il en va de même pour le genre de mobilisations.
Si l’Engagement était une équation, ce pourrait être le produit d’un sentiment de Frustration face à une situation devenue insupportable, d’une Vision d’une société meilleure et d’un premier pas pour passer à l’Action.
En=FxVxA
Or si les propositions concrètes d’action ne semblent pas adaptées, le résultat du produit restera nul, aussi belle soit la vision et aussi frustrée soit la personne. Pour que l’engagement soit durable, la notion de plaisir doit être ajoutée à l’équation.
Enfin le contenu du projet abertzale et de ses propositions doivent correspondre aux réalités présentes et futures des personnes ciblées.
L’accès au logement est une question fondamentale qui ne s’arrangera pas avec le temps si rien n’est fait, tout comme le changement climatique. L’égalité femme-homme, le numérique et les effets de l’uberisation de la société méritent également de sérieuses réflexions.
En cette nouvelle ère du paraître, où démêler le vrai du faux semble toujours plus compliqué, il n’y a rien de plus désarmant que l’authenticité, cette capacité à communiquer avec sincérité et engagement ce que l’on est profondément.
En cette ère du paraître,
où démêler le vrai du faux
semble toujours plus compliqué,
il n’y a rien de plus désarmant
que l’authenticité,
cette capacité à communiquer
avec sincérité et engagement
ce que l’on est profondément.
La recherche d’un mouvement abertzale authentique exige de faire preuve de courage pour faire face à ses limites et contradictions, les bonnes décisions vis-à-vis de l’avenir en découleront.
Profitons de l’incertitude actuelle pour rehausser nos ambitions en procédant à une mise à jour d’une version 3.0 du système abertzale ; il n’en sortira que plus efficace et résilient pour faire face aux enjeux du XXIe siècle.
En bonus, une liste non exhaustive de questions pour imaginer les possibilités du Pays Basque de 2050.
Les jeunes locaux pourront-ils encore se loger dans les villes du BAB ? Vivra-t-on dans une collectivité territoriale à statut particulier ? Le Pays Basque sera-t-il unifié ? Ou bien les frontières auront-elles disparu pour mieux gérer les flux migratoires ? L’euskara sera-t-il officialisé ? Le revenu de base sera-t-il en place ? Y aura-t-il une vague de femmes élues maires abertzale ? Nos villes seront-elles plus vertes ? Aurons-nous droit à une sécurité sociale et alimentaire ? L’eusko sera-t-elle l’une des monnaies officielles du Pays Basque ? Y aura-t- il une université d’Iparralde ? Sera-t-il encore possible de manifester dans la rue ? Y aura-t-il toujours des militant·e·s abertzale ?
1) Format d’images numériques animées.
2) Eléments ou phénomènes repris et déclinés en masse sur Internet.
Il y a une inquiétante distance entre le questionnement que vous soulevez sur l’état de l’abertzalisme aujourd’hui et votre conclusion sous forme de questions pour imaginer le pays basque de 2050. Que je sache, l’abertzalisme n’a pas été tiré d’un musée. Il répondait et répond toujours au défi lancé par l’oligarchie capitaliste pour enfermer la population basque dans un sinistre fonctionnalisme socio-économique. Aujourd’hui, ce que vous appelez « crise sanitaire » et qui, jusqu’à preuve du contraire, tient surtout du terrorisme politique d’état, apparaît comme la bombe atomique utilisée par le système oligarchique contre la résistance des peuples. La non-réponse de ces peuples laisse dans le temps que nous traversons un écho d’autant plus glacial désespérant qu’il ne trouve guère de contradiction.
Or, comme vous l’écrivez si bien, « le passage du témoin ne s’improvise pas, c’est un moment stratégique et décisif ». Se projeter dans un hypothétique société 2050 pour répondre à ce moment est pour le moins léger et inefficace, au point d’en représenter un gaz soporifique fatal pour la conscience abertzale. La réponse doit être au contraire « Hemen eta Orain » !
Barkatu bainan .
Je suis abertzale et cet article me fait douter ! En période de crise il faut toujours aller sur se qui est la base .
Pourquoi nous sommes abertzale ? Pour que le peuple Basque et sa langue survive . Et qu elles sont nos objectifs ? Un parlement de plein exercice et surtout que les impots produits en Pays Basque restent en Pays Basque et qu ils soit gérer par un gouvernement élus par les habitants du Pays Basque .
Milesker
Cet article est d’autant plus pertinent qu’il y a encore des personnes pour penser que le problème de la souveraineté du peuple basque, de son existence même, sera réglé par un parlement de plein exercice et le reversement local et total de nos impôts… Effectivement, sans un sérieux travail d’imagination, une réelle capacité à remettre en question quelques acquis idéologiques devenus inopérants en temps de globalisation capitaliste et de profonde crise écologique, il sera vraiment compliqué de proposer un projet abertzale adapté au monde de demain, voire tout simplement d’aujourd’hui.
La globalisation capitaliste exister déja avant l’empire romain , les marchandises , les gens , l argent , les idées , tout circuler a travers le monde et c est sa qui a permis a l étre humain d avoir se niveau technologique . Ensuite la PROFONDE crise écologique , qui fait croire a beaucoup de gens que la fin du monde est proche est quelque chose de contre productif . OUI il y a beaucoup de combat a mener , mais si on regarde l Europe et l Amérique du Nord beaucoup de chose se sont améliorer en 60 ans , les fleuves en Europe de l ouest sont mille fois plus propre et la faunes et la flore y reviennent ( castor , loutre , libéllule , poison , hérons , cormoran ) et les foréts ont triplés de surface ( cerf , écureuil , sanglier , loup , linx , ours , élan en Allemagne ) et tous sa grace a des lois votés par des parlements de plein exercice .
Antton, tes points de vue sont très respectables mais à mon humble avis s’appuient sur des informations et diagnostics quelque peu erronées : ce qui existait avant ou pendant l’Empire Romain peut-être assimilé à une multiplication des échanges à l’échelle du monde connu pour l’époque, mais n’a rien à voir avec la globalisation capitaliste. Les peuples n’y étaient pas dépossédés d’une grande partie de leurs souverainetés alimentaire, énergétique, etc. Il n’y avait pas une logique de délocalisation généralisée tirant vers le moins disant social et environnemental. Il n’y avait pas un ensemble d’entreprises multinationales échappant au contrôle des États et plus puissantes et riches que la majorité d’entre eux…etc. etc. Penser que la biodiversité va mieux en Europe et en Amérique du Nord qu’il y a 60 ans va à l’encontre de la plupart des études scientifiques actuelles. Les réserves naturelles ou politiques spéciales de protection de certains animaux symboliques cachent l’effondrement des populations d’insectes, de vers de terre, phytoplancton etc. moins populaires et moins à la mode mais qui sont des maillons essentiels de la chaîne de la biodiversité. Puisque tu cites l’Allemagne, rappelons que selon les travaux menés dans ce pays par une équipe internationale d’entomologistes, 76 à 82 % des insectes volants ont disparu depuis 1989, ce qui est gigantesque (source : https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809 ). Personne ici ne parle de fin du monde, on essaie juste de regarder la réalité en face, de ne pas faire l’autruche, et d’adapter nos objectifs et stratégies aux problèmes, enjeux, risques et opportunités actuels et à venir. Adeitasunez, Julen
je te dit merci , mais mon logiciel est parfaitement a jour . Et tu as raison sur la disparition des insectes , c est volontaire de ma part si je n’en ai pas parler , ainsi que des oiseaux de petite taille ( hirondelles , rouge gorge , ect.. ) qui sont le résultat de l utilisation massif de pesticides dans l agriculture . Et en se qui concerne le capitalisme , je pense que la loi peu le controler ( encore faut t il que les politiques accéptes de la faire ) , sans que l on décides de mettre tous le systéme a terre !
Mais si on décide de détruire se systéme par quoi le remplacer ensuite ???
la réponse me fait un peu peur !
Egunon,
Ehbaiko permanentea zira. Zer ulertu bejnhar dugu, zure pentsamoldea dela? (Libre zira) ala EHBai linea berri baten berri ematen ari da?
Bestalde, zure artikulua iduritzen zait puska bat « parisetik ikusia » eta abertzaletik gutxi duela.
C est la voix dEHBai ou c ets juste une vision perso?
Gau on,
Nere iritzi pertsonala da eta beraz bai, erraiten duzun bezala libre naiz.
Hegoaldetik idazten dut, baina iparraldeko errealitatetik gertu. Gaizki ulertu ez badut, orain krisi honek sortutako arrakalak edo egoerak gauzak mahiganeratu(ko) dituela nabarmentzen duzu.
Aipatutako erronkak, etxebizitzaralo eskubidea, euskaldun izateko eskubidea eta, bereziki, erabakiak bertan hartzeko eskubidea xede edo izpide izan dituzu. Halaber, horiek lortzeko Abertzale 3.0 garatzea ezinbestekotzat jo duzu, eta horrela da bai.
Gure kontraesanekin aurrera egin behar dugu, helburua argi edukiz. Ea, horretarako iparraldean gazteak eskakizun horiek bideratzeko antolatzen zareten.
Bejon deizula Gaby!