L’initiative de Luhuso avait pour objectif d’accélérer le cours du temps dans le cadre d’un processus de paix trop partiel —du fait du refus des deux États de s’y engager— enlisé et sans perspectives concrètes d’évolution positive. La démarche qui l’a précédée et l’acte ainsi posé visent à aller au bout du démantèlement de l’arsenal d’ETA, dans les plus brefs délais. Il s’agit également de créer en parallèle de nouvelles perspectives et avancées possibles pour remplir de contenu le processus de paix, le rendre global, juste et irréversible. Je pense qu’il faut absolument garder le même calendrier, très resserré, en tête.
Tout d’abord parce que je refuse d’envisager que le petit jeu actuel, humiliant et dangereux, du chat et de la souris se prolonge cinq ans de plus, faisant perdre autant d’années supplémentaires à un règlement civilisé, humain et intelligent du conflit en Pays Basque (victimes, prisonniers, exilés, mémoire, justice, vérité, réconciliation et nouveau vivre ensemble).
Ensuite, parce que je crois qu’il vaut mieux agir de manière décisive aujourd’hui que dans quelques mois, dans un contexte qui sera beaucoup plus incertain (Quel nouveau gouvernement et quel contexte socio-politique en France après les élections présidentielle et législatives de mai et juin prochain ? Quelle situation d’instabilité et de tensions extrêmes connaîtra l’État espagnol à la rentrée prochaine si les Catalans vont au bout de leur volonté de proclamer une déclaration unilatérale d’indépendance ?).
A partir de là, il n’y a que deux grands cas de figure possible.
1- Le gouvernement français aide au démantèlement de cet arsenal
Quelles raisons aurait-il de ne pas le faire ? Il n’a pour cela même pas à assumer le fait de discuter avec une organisation armée. Des interlocuteurs appartenant à la société civile, clairement identifiés comme des militants démocratiques, adeptes de la non-violence et de la transparence, sont désormais dépositaires de la responsabilité du désarmement de l’arsenal d’ETA.
Il suffit de rentrer en contact avec eux, de répondre aux propositions de coopération, ordonnée et sécurisée, discrète et sans contrepartie politique aucune, qu’ils ont formulées.
Dans ce cas là, l’affaire peut-être pliée en quelques semaines.
Le président Hollande et le gouvernement français actuel ont tout à y gagner.
A une époque où même l’armée française peut perdre un porte-char dans la nature ; en tenant compte du lourd passif de l’État espagnol en manipulations, coups tordus et polices parallèles en tout genre ; et compte-tenu du contexte actuel de terrorisme djihadiste ; il n’est pas raisonnable de laisser plusieurs années de suite dans la nature des mitraillettes, fusils d’assaut, pistolets, explosifs, roquettes quand on peut les neutraliser définitivement et sans prix à payer pour cela.
“Vous donnez au monde entier un très bel exemple. Vous sortez d’un conflit qui a duré des années, qui a fait des dizaines de milliers de morts, qui a ravagé toute une région (…) et aujourd’hui, vous êtes ici rassemblés”, a affirmé ces jours-ci François Hollande dans un camp de désarmement en Colombie, après avoir serré la main à Pablo Catatumbo, un des dirigeants des Farc (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie), sur lesquels pesaient pas moins de 41 chefs d’inculpations pour homicides, enlèvements et trafic de drogue…
Le président français, qui s’est déclaré impressionné par la démarche de réconciliation entreprise en Colombie, pourrait lui aussi apporter une contribution directe à l’Histoire de la résolution des conflits.
En autorisant un désarmement ordonné et sécurisé de l’arsenal d’ETA, il rendrait possible d’autres pas décisifs dans un scénario global de pacification et de réconciliation en Pays Basque.
Ne briguant pas un nouveau mandat, qu’a-t-il à craindre du courroux du gouvernement PP qui ne jure que par la poursuite d’une stratégie de la tension et de la vengeance, elle-même porteuse de futures envies de revanche ?
En refusant d’alimenter cette stratégie de la tension, c’est également aux espagnols eux-même qu’il rendrait service.
Tout le monde, en Espagne, au Pays Basque et en France, sortirait gagnant d’un scénario de paix durable, de justice transitionnelle et de réconciliation. Tout cela est à portée de notre main, et le gouvernement français actuel pourrait rajouter cela à son bilan avant le 7 mai.
Le président français pourrait lui aussi
apporter une contribution directe
à l’Histoire de la résolution des conflits
en autorisant un désarmement
ordonné et sécurisé
de l’arsenal d’ETA.
2- Le gouvernement français ne veut rien entendre
Dans ce cas-là, la société basque, avec ses différentes composantes et de manière partagée, devra à nouveau prendre ses responsabilités pour solutionner définitivement et par elle-même cette question, là également dans les quelques mois qui viennent.
Entre les différentes institutions du Pays Basque, les organisations et secteurs profondément attachés à un scénario de normalisation politique pour la société basque, les élus et citoyens de toutes tendances qui ont montré leur capacité de se mobiliser sur cette question-là, nous avons beaucoup de ressources potentielles pour y parvenir. Nous pouvons également compter sur une aide précieuse au niveau international, et sur le soutien de nombreuses personnalités françaises prêtes à apporter leur contribution à une résolution non-violente du conflit en Pays Basque.
Enfin, nous serons forts de la conviction de servir l’intérêt de tous, de notre volonté d’aider à soulager et à réparer les souffrances de chaque camp, de contribuer à la réconciliation dans notre société. Nous serons portés par une détermination sans faille à construire une paix juste, globale et irréversible en Pays Basque.
Oui, ouvrir définitivement une nouvelle page de l’Histoire d’Euskal Herria est aujourd’hui à notre portée.
Les Artisans de la Paix doivent faire face à d’importants frais -actuels et à venir- pour mener à bien et jusqu’au bout leur travail (frais de justice, de déplacements, et d’organisation).
Chaque contribution, même la plus minime, est importante.
Vous pouvez adresser vos dons en espèce aux représentants mandatés des Artisans de la Paix ; par chèque à l’ordre de Hitzak à l’adresse suivante :
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