Les lois de réforme des collectivités territoriales de 2010-2011 ont pour objectif d’achever et de rationaliser le tissu des EPCI (Établissements Publics de Coopération Intercommunale). Plusieurs dispositifs sont prévus dans le but de parvenir, au 1er janvier 2014, à une couverture de la carte intercommunale de l’ensemble de l’Hexagone. Dans cette optique, l’État prévoit une diminution du nombre de communautés de communes (CC) : chaque préfet est donc chargé d’élaborer un Schéma Départemental de Coopération Intercommunale (SDCI) avant la fin 2011, proposant fusions, extensions de périmètres ou créations de nouvelles CC. Le SDCI doit être présenté et débattu devant une Commission Départementale de Coopération Intercommunale (CDCI), dont la composition est prévue par la loi. Enseignant spécialiste de l’histoire de la Navarre, auteur de La conquête de la Navarre (Elkar), Antton Curutcharry, explique comment ce processus fait interagir une multiplicité d’enjeux en Basse Navarre.
Combien de communautés de communes pour la Basse Navarre ?
En Pyrénées Atlantiques, la première séance de la Commission a lieu le 27 avril 2011. Le préfet Ceccaldi y présente un projet de Schéma dans lequel le département passerait de 32 intercommunalités à 18. En Pays Basque, il envisage notamment l’incorporation d’une grande partie de la CC d’Oztibarre-Iholdi à celle d’Amikuze, tandis que les communes d’Irissarry et de Suhescun rejoindraient Baigorri-Garazi (voir carte). Pourquoi dépecer ainsi la CC du centre de la Basse Navarre ? Deux raisons : premièrement, la population de cette EPCI : 3.700 habitants. La loi stipule qu’il ne devra plus y avoir de CC de moins de 5.000 habitants même si une dérogation concernant les CC de zone montagne dont Iholdi-Oztibarre peut se prévaloir, existe. Cette taille réduite a en effet vite posé la question des ressources de la CC, qui sont assez limitées. La seconde raison remonte à ses origines : au moment de sa fondation en 2003, Irissarry et Larceveau avaient fait part de leur préférence pour intégrer la CC de Baigorri-Garazi, mettant en péril le projet. C’est contraintes par l’autorité préfectorale qu’elles durent entrer Oztibarre-Iholdi le 1er janvier 2004. Depuis ce jour, Irissarry (23% de la population de la CC), entretient des relations orageuses avec sa CC.
En avril 2011, l’idée du préfet est donc de passer de trois à deux CC bas-navarraises, sacrifiant Oztibarre-Iholdi aux intérêts de la rationalisation. Selon Ceccaldi, les deux CC ainsi créées, de « taille comparable », matérialiseraient les deux bassins de vie identifiés par l’INSEE, le Conseil de Développement et la CCI, car Saint-Palais et Saint-Jean-Pied-de-Port constituent « deux polarités urbaines affirmées et dynamiques ».
Intervient alors Barthélémy Aguerre, vice-président de la CC d’Amikuze, qui suggère de créer une CC qui engloberait la « Basse Navarre historique » et pourrait même « s’étendre jusqu’aux CC voisines de Salies-de-Béarn et Navarrenx ». Ceci va à l’encontre des propos du préfet qui soulignait que la « fusion des 3 CC au regard du nombre de communes concernées et des distances parfois importantes entre celles-ci, compromettrait son bon fonctionnement ». Malgré ce bémol, d’autres élus emboîtent le pas à Aguerre. Pour Lucien Delgue, président de la CC d’Oztibarre-Iholdi, le découpage de sa CC en deux est non-pertinent et il se rallie à l’idée d’une seule grande CC Baxe Nafarroa. Il est rejoint par Jean-Baptiste Lambert, maire de Baigorri. De son côté, Xavier Lacoste, maire d’Irisarri, approuve la disparition de la CC d’Oztibarre-Iholdi à laquelle son conseil n’a jamais vraiment adhéré et, s’il se prononce pour une CC Baxe Nafarroa, il demande du temps pour la discussion car il pense le sujet sensible. Tous les représentants des CC concernées semblent d’accord. Sauf que. Prenant la parole en tant que conseiller général de Garazi, Frantxua Maitia déplore l’absence d’un représentant de l’exécutif de la CC de Baigorri-Garazi. Ni Jean-Michel Galant, ni ses vice-présidents n’ont été conviés… Lambert est bien là, mais, dans cette CC, il fait partie de l’opposition. Personne donc, pour représenter Baigorri-Garazi. Etonnant ! De là à y voir une volonté délibérée des élus de droite d’écarter un gêneur, abertzale et de gauche, il n’y a qu’un pas.
Le 4 mai, lors d’une nouvelle CDCI, le préfet ayant pris les remarques en compte, propose la création d’une CC regroupant Amikuze, Oztibarre-Iholdi, Baigorri-Garazi, mais aussi Labastide-Clairence, commune isolée qui doit intégrer une CC avant le 1er janvier 2014. Le projet regrouperait donc 71 communes et 27.000 habitants. Aguerre fait savoir que les élus d’Amikuze se sont réunis et y sont favorables, de même qu’ils approuvent l’idée d’une extension jusqu’à Salies et Navarrenx. Il repousse en revanche l’idée d’incorporer Labastide. Delgue et Lambert soutiennent ses vues. Lacoste se montre déjà plus réservé, quant à Maitia, il rappelle l’absence de Galant et donne sa préférence au schéma prévoyant deux CC. Le nouveau schéma est maintenu, vient l’heure des premières consultations.
Débat, ou pas débat ?
Les discussions à la CDCI ont montré une ligne de fracture politique : la droite est unanimement favorable au SDCI proposant la fusion des trois CC, tandis que la gauche semble plus réservée. Sur le terrain pourtant, le temps laissé pour la consultation des élus municipaux et communautaires est très court : réponse doit être donnée pour le 26 août. Autant dire qu’avec la saison estivale, il n’est pas de véritable débat envisageable, ni entre élus, ni avec les populations, principales concernées par les conséquences d’une fusion.
Les élus amikuztar ont déjà donné un avis positif. Ceux d’Oztibarre-Iholdi disent oui le 8 août. Restent ceux de Baigorri-Garazi. Le 25 août, 17 des 30 communes se déclarent défavorables, arguant de la précipitation et de l’absence d’étude sur les conséquences d’un tel projet. Mais les avis sont très partagés car les 13 communes favorables représentent 60% de la population, dont celle des deux chefs-lieux de canton. La séance, très houleuse, voit même 22 délégués qui refusent de voter une demande de délai supplémentaire, quitter la salle. La requête est approuvée par la majorité des restants. Pourquoi tant de crispations ? C’est que, depuis juillet 2010, la CC de Baigorri-Garazi est en crise ouverte. Quatre vice-présidents ont démissionné, prétextant un choix du président qu’ils estiment contestable. Galant est fragilisé. Derrière ce coup d’éclat se cachent rivalités et rancœurs politiques : l’alliance compliquée des abertzale et sympathisants de gauche aux centristes « dissidents », qui avait valu à Galant de prendre en 2008 la tête de la CC au détriment de l’UMP-MoDem, a volé en éclats. Difficile, malgré l’alliance, d’accepter trop longtemps d’être dirigé par un abertzale. Le débat sur la fusion, outre les opinions légitimes de chacun, sert de nouveau prétexte pour affaiblir Galant.
Lors de la CDCI d’octobre, Aguerre, Delgue et Lambert s’appuient sur le vote par commune, qui laisse apparaître une majorité favorable (69%, soit 49 des 71 communes concernées), pour confirmer leur souhait de voir se réaliser Baxe Nafarroa. Ils excluent en revanche l’opportunité d’intégrer Labastide Clairence. Ignorant l’avis et la demande de la CC de Baigorri-Garazi et faisant fi des interrogations soulevées dans cette même commission, Aguerre parle d’un « fort engouement » et demande la mise en place rapide de Baxe Nafarroa. Néanmoins, en novembre, une discussion entre les présidents des trois CC est engagée sous l’égide du sous-préfet Nunez. Sur proposition de Galant, l’idée d’une étude sur deux ans est acceptée par tous. L’Agence Publique de Gestion Locale (APGL) est contactée ; elle doit réfléchir aux conditions et conséquences de la création de la nouvelle CC. Ce contretemps agace Aguerre, Delgue et Lambert qui voulaient en finir. Pourquoi un tel empressement ? Peur qu’un changement de majorité à la tête de l’État ne vienne remettre en cause la réforme engagée ? Il est vrai qu’à l’époque, en pleine campagne présidentielle, le candidat socialiste parle d’abroger les lois de réforme territoriale. Peur que le résultat de l’enquête de l’APGL ne fasse apparaître des complications dans l’harmonisation des compétences et de la fiscalité des trois CC ? Ou essaient-ils d’éviter que le débat ne s’ouvre dans la population ?
Comment travailler ensemble ?
L’année 2012 voit l’ambiance se tendre. Indar, le centre d’appui aux entreprises des trois CC bas-navarraises, est dans une situation financière délicate du fait de la baisse des subventions. L’un des deux postes d’animateur économique est en péril. La CC d’Amikuze évoque la suppression de l’animateur en charge de Baigorri-Garazi. En février 2012, les élus de la CC de Baigorri-Garazi exigent pourtant, à l’unanimité, le maintien de ce poste.
À la même époque, la CDCI arrête la décision sur laquelle le préfet devra se pencher avant consultation finale des communes : la fusion des trois CC, sans Labastide-Clairence qui fait le choix d’intégrer la CC d’Hasparren. En avril, nouvelle tentative de débat à la CC de Baigorri-Garazi sur l’opportunité de la fusion. Devant le refus de Galant qui demande à attendre les résultats de l’étude, 27 des 50 délégués votent contre son budget. Démonstration est faite que l’opposition peut désormais réunir une majorité contre lui.
En juin, l’affaire Indar revient sur le devant de la scène. S’appuyant sur l’unanimité de février, la CC de Baigorri-Garazi confirme son engagement à couvrir 50% du financement nécessaire pour sauver son animateur et demande à Amikuze et Oztibarre-Iholdi d’en faire autant. Refus. Mis face à l’inéluctable, les dirigeants d’Indar, pourtant soutenus par une pétition rassemblant des centaines de signatures, démissionnent, solidaires de l’animateur sacrifié. Désormais, un seul animateur, celui d’Amikuze, est en charge du territoire couvrant les 70 communes. À l’automne, les CC doivent se prononcer sur la réorganisation d’Indar, dont les nouveaux coprésidents sont Jean Berterreche et… Barthélémy Aguerre ! Elle est approuvée par les représentants d’Oztibarre-Iholdi et d’Amikuze, mais aussi par les délégués de Baigorri-Garazi à Indar qui ne suivent donc pas le vote unanime de février. Certains élus de Baigorri-Garazi ne décolèrent pas : comment fusionner avec une CC qui vient de torpiller l’animateur économique dont ils ont tant besoin ? Comment établir des relations de confiance dans ces conditions ? Fusionner signifie-t-il perte d’effectifs ? Et pour qui ? Les remous de 2012 et leurs conséquences font réfléchir. À la fin de l’année, des questions voient le jour et des voix s’élèvent qui réclament que le débat sur la fusion soit porté sur la place publique.
Société civile et abertzale : le débat, enfin !
Début 2013, alors que le projet de fusion est travaillé par les élus des trois CC avec l’aide de l’APGL, un collectif se constitue. Jakin, principalement composé de personnes originaires de Baigorri et Garazi, s’inquiète de la manière dont a été mené le débat sur la fusion, loin des citoyens et à la hâte. S’il ne se prononce pas contre le projet, il exige le report de la seconde consultation des communes au-delà des élections municipales de 2014, étant donné que ce sont les conseils élus qui auront à travailler dans le nouveau cadre communautaire. La pétition lancée par le collectif est un succès. En un mois, 650 personnes signent son appel. La société civile des trois CC concernées s’empare du sujet. Des élus rejoignent la pétition.
Parallèlement, le groupe d’EH Bai rassemblant les militants souletins et bas-navarrais, se lance dans une réflexion globale sur le devenir de l’intérieur du Pays Basque, se posant à son tour la question de l’opportunité d’une fusion des CC de Basse Navarre. Une cinquantaine de personnes se retrouvent en mars pour engager la discussion. Si l’ombre portée d’Aguerre, par ailleurs empêtré dans l’affaire Spanghero-Lur Berri, plane sur les débats et suscite une très grande méfiance, les échanges vont bien au-delà des simples considérations politiciennes. Les questions relatives au périmètre, aux compétences, aux opportunités ou aux faiblesses d’un tel projet sont soupesées avec attention. Car concernant la fusion, les abertzale, comme le reste de la population, ne sont pas tous d’accord. Plusieurs idées-forces orientent les discussions : le besoin d’un service de proximité et de qualité, le fonctionnement d’une CC à 70, qui devra, selon EH Bai, forcément être « décentralisée » et fondé sur des commissions, les façons de faire « à l’ancienne » de la droite clanique étant absolument refusées. La question de la « viabilité » de la CC Oztibarre-Iholdi est aussi évoquée et enfin, le risque de voir la CC d’Amikuze rejoindre ses voisines de Salies ou Navarrenx, si la fusion ne se faisait pas… Quelles que soient les positions au sein de la plateforme, tous sont d’accord sur un point : le débat vient de s’engager, il faut repousser les échéances consultatives et, si possible, l’arrêté de périmètre qui doit être pris par le préfet au 1er juillet 2013 (il doit permettre un vote dans chaque commune avant la fin de l’année afin de rendre le projet de fusion des trois CC effectif au 1er janvier 2014). Par communiqué de presse, EH Bai barnekalde demande l’ouverture d’un débat transparent et populaire et le report de toute décision à l’après-élections municipales.
Le 19 avril, un débat public est pour la première fois organisé, relayé sur le net par Kanaldude. Les élus n’en sont pas à l’initiative, mais bien une association, Basaizea. Aguerre, Galant, Lambert, Maïtia, Oçafrain, Olçomendy y développent des arguments contradictoires. Le sujet n’est pas si simple. Le PNB intervient peu après pour défendre le projet au nom de l’Histoire et du travail en commun mené depuis une décennie dans le cadre du syndicat mixte Baxe Nafarroa. Le 4 mai, les élus sont invités à prendre connaissance de l’étude de l’APGL : elle présente une analyse fiscale et budgétaire de la fusion et en arrive à des conclusions mitigées. Si la dotation de l’État augmente, c’est dans une proportion moindre qu’annoncée. L’harmonisation fiscale verrait aussi la contribution des ménages d’Amikuze augmenter et celle des autres diminuer. Ces données sont aussi présentées à la CDCI du 16 mai où des élus soulignent les questions restant en suspens : pas de projet commun de territoire, pas de mise en adéquation des compétences, pas de consensus… Voyant le projet s’enliser, ses promoteurs repassent à l’offensive : le 10 mai, 30 délégués de Baigorri-Garazi écrivent au préfet pour lui demander de prendre l’arrêté de périmètre. Ils sont suivis, le 23, par ceux d’Oztibarre-Iholdi et le 31 par ceux d’Amikuze. La pression s’intensifie, mais des deux côtés…
Car au mois de juin, la pétition Jakin atteint le nombre impressionnant de 1.270 signataires, tandis qu’EH Bai écrit au sous-préfet pour lui demander à nouveau un report. Tout le monde attend l’arrêté de périmètre fatidique… qui ne vient finalement pas. En juillet, le sous-préfet de Bayonne fait savoir qu’étant donné l’absence de consensus, il ne prendrait pas d’arrêté. Les communes ne seront pas consultées sur la fusion. Baxe Nafarroa devra attendre les nouvelles majorités municipales et communautaires. Ceux qui ne cessaient de dénoncer l’empressement sont soulagés. Les élections municipales seront l’occasion pour les Bas-Navarrais de débattre sur l’opportunité de cette fusion. Tandis qu’EH bai se félicite de la décision préfectorale, les élus qui ont promu la grande CC font part de leur mécontentement… il s’exprime à nouveau dans le cadre de la CC de Baigorri-Garazi : les adversaires de Galant y pratiquent une politique d’obstruction et d’opposition qui empêche la communauté d’avancer. Le débat crée aussi des tensions dans les communes de Gamarthe, Lasse ou Saint-Jean-le-Vieux… En octobre, deux élus du PNB s’en prennent même publiquement à Galant lors d’une tribune-ouverte musclée parue dans le JPB. En Amikuze, l’éventualité de voir la fiscalité augmenter avec la fusion, et l’orientation prise pour privilégier la perception de Baigorri plutôt que celle de Saint-Palais fait grincer des dents. En novembre enfin, en marge des débats sur les nouveaux cantons, le PNB réitère son avis favorable concernant la fusion des trois CC et présente un dossier sur l’état des lieux socio-économique de chaque canton, sans apporter de nouvel élément sur les avantages d’une fusion.
Finalement, le problème majeur de ce dossier est que des considérations politiciennes, son principal promoteur, Aguerre, et des haines personnelles polluent le fond de la question : une CC à 70 communes est-elle envisageable dans de bonnes conditions ? Quelles en seront les conséquences pour les territoires et la population ?
Mise au point : la Basse-Navarre, qu’est-ce que c’est ?
Au cours d’une réunion du CDCI, Lucien Betbeder, maire labourdin de Mendionde, demande que « si ce territoire devait se constituer en CC, que l’on épargne le nom de Basse Navarre, qu’on le respecte dans son histoire ». Il a raison. Contrairement à ce qu’affirme Aguerre sur la reconstitution du territoire de Basse-Navarre, et certains abertzale qui y voient la renaissance d’une province historique d’Euskal Herria, l’ensemble des trois Communautés de communes ne constitue pas, loin s’en faut, la Basse-Navarre. La Basse-Navarre historique, son périmètre et son organisation politique, ont disparu sous les coups de ciseaux (déjà !) des révolutionnaires. Elle a ensuite été soigneusement dépecée, coupée et redécoupée afin de casser son identité. Le canton actuel d’Amikuze comprend au moins 5 villages souletins, celui de Garazi est amputé de Suhescun, la vallée d’Ossès a été dissoute dans Baigorri, Labastide Clairence, fondée par un roi de Navarre, a systématiquement été refusée dans le projet « Baxe Nafarroa » par les élus de droite, avant de rejoindre Hasparren. Il manquerait de plus, à la CC « Baxe Nafarroa », la quasi-totalité de la terre d’Arberoue qui, historiquement, est plus anciennement navarraise qu’Amikuze et Oztibarre (voir carte ci-dessus). Enfin, ne pas oublier le domaine des seigneurs de Gramont : Bergouey-Villenave, Arancou, Bidache et Came, ont fait partie, entre le XIIIe et le XVIe siècle, du grand royaume de Navarre unifié. Le nom de « Baxe Nafarroa », par ailleurs jamais utilisé par ses habitants qui ont toujours dit « Baxenabarre » ou jusqu’à la Révolution simplement « Nabarra », serait donc inapproprié pour cette Communauté de communes.
CC et cantons, même combat ?
Une crainte partagée par de nombreux habitants d’Iparralde, et donc de Basse Navarre, est de voir les cantons d’Amikuze et d’Oztibarre-Iholdi rejoindre des cantons béarnais, en cette période de redécoupage cantonal. Le projet de Valls n’incite pas à l’optimisme, les deux cantons précédemment évoqués étant destinés à être rattachés à ceux de Sauveterre et Navarrenx. Mais, faire la fusion des trois CC aurait-il permis de préserver ces deux cantons ? Cela semble très peu probable, pour deux raisons. La première est symbolique : les autorités françaises veulent un canton basco-béarnais afin de briser tout projet de Collectivité territoriale. Ensuite, une CC, entité sur laquelle s’exerceront de plus en plus les compétences liées à l’aménagement du territoire au quotidien, n’est pas de même nature qu’un grand canton de 25.000 habitants, circonscription électorale dont l’unique objet sera de donner un élu au département. La carte proposée par le Conseil général en octobre en fait la preuve : impossible de tenir les frontières de la CC Errobi, de la CA Sud Pays Basque, encore moins celles de l’ACBA, trop peuplées pour ne former qu’un canton. Que dire des deux cantons souletins qui ne prennent pas en compte la commune béarnaise de Lichos, pourtant adhérente à la CC Soule-Xiberoa… Barthélémy Aguerre a beau fanfaronner en laissant sous-entendre que si fusion il y avait eu, la possibilité de conserver l’intégrité des limites du Pays Basque aurait été plus grande, il n’en est rien. Un canton « Baxe Nafarroa » aurait ruiné toute possibilité pour la Soule et ses 13.000 habitants, population insuffisante pour former un seul canton, d’être rattachée à un autre territoire basque. Cantons et CC n’ont donc rien à voir. Mais, si Pau et le ministère de l’Intérieur le souhaitaient vraiment, ils pourraient créer des cantons respectant les frontières du Pays Basque. Début novembre, EH Bai a présenté plusieurs possibilités plus respectueuses du « territoire vécu » des habitants d’Ipar Euskal Herri (voir carte ci-dessous). Par ailleurs, tout en respectant les critères fixés par le ministère de l’Intérieur, et avec un minimum de bonne volonté, il est possible d’opérer un découpage qui respecterait les frontières de 7 des 10 EPCI du Pays Basque. Chacune de ces entités répondrait aux exigences de population et de continuité territoriale fixées par la loi.
Depuis la parution de la carte de redécoupage, la levée de bouclier a été telle dans l’opposition au Conseil général et la partie basque du département, que l’exécutif de Pau a ajourné la présentation prévue pour le 15 novembre. A ceci s’ajoute l’importante mobilisation du 30 novembre organisée par Batera qui permet de mesurer la colère et la frustration engendrée par les manœuvres du pouvoir.