Alexandre Da Costa
C’est ainsi que les représentants des États Généraux de Navarre répondaient au XVIIe siècle à la prétention de Louis XIV d’augmenter les impôts sur cette partie du royaume qu’était la Basse-Navarre [1]. Nous n’avons pas le fin mot de l’histoire, mais ce qui est certain c’est que les Basques considéraient à l’époque que le pouvoir du roi dépendait d’une certaine manière de la volonté du peuple.
Le terme « créature » avait bien sûr une connotation religieuse, mais si l’on reprend la définition donnée par la femme de lettre du XVIe siècle, Marguerite de Navarre : une créature est une « personne qui tient sa position de la faveur de quelqu’un »[2]. La « position » du roi est donc conditionnelle.
Mais que signifie le « chez nous » ?
Indubitablement cela désigne la (basse) Navarre, où l’on considère depuis le moyen-âge que, en même temps, les rois doivent garantir les fors (coutumes ayant valeur de loi) et les assemblées doivent reconnaître en être ses sujets.
Osons maintenant un parallèle avec notre époque !
Tout le monde aura reconnu le roi, et qui sont les sujets. Mais est-ce que la relation est aussi équilibrée le qu’alors ?
Imaginons par exemple que nos « provinces » puissent négocier avec l’État la validité de telle affectation d’impôt. Si nous nous soumettons à la force de l’habitude nous pouvons croire que dans l’Europe du XXIe siècle cela est impossible.
Cependant c’est exactement ce qui est réalisé entre les Communautés forales du pays Basque et de Navarre avec l’État espagnol par le Concierto económico (ekonomia ituna) [3], que l’on pourrait traduire par « accord économique ». Il s’agit d’une négociation menée plus ou moins périodiquement pour déterminer quelle part des impôts prélevés au niveau de la Communauté sera reversée à l’État comme contribution aux charges de l’État que n’assure pas le territoire. De fait l’État est obligé de justifier des services qu’il apporte aux territoires et reçoit une quote-part des impôts en fonction.
L’important n’est pas que l’impôt soit géré en grande partie localement, mais surtout que l’État ait à justifier ce qu’il apporte. Les négociations sont ardues et complexes, mais elles sont effectuées de façon relativement transparente, beaucoup plus en tous cas que les décisions prises au sein de ministères parisiens.