Comment ce que nous mangeons arrive-t-il dans notre assiette? C’est la question que Pantxoa Bimboire, notre spécialiste économie, s’est posée dans sa chronique de ce mois-ci. Les réponses, basées sur les enquêtes de la CCI, qu’il apporte sont éclairantes. Et pas indigestes du tout.
Nous avons tous en tête l’utilité des circuits courts dans la réappropriation de l’économie d’Iparralde dans le secteur agro-alimentaire. Comme cela a été très justement souligné, néanmoins, par certains, ce mode de distribution restant marginal, nous devons aussi et surtout investir les autres modes de distribution.
C’est une partie des missions de Uztartu, avec les filières Herriko Haragia ou Ogia… Mais d’autres pistes sont en cours de maturation, paraît-il, type “panier de produits diversifiés” d’origine Iparralde (principalement), avec possibilité de livraison sous 24h sur tout le territoire, avec un gros travail de logistique collective. Mais ce n’est pas mon propos.
Origine des chiffres, méthode, évolution
Régulièrement, la CCI Euskal Herria, procède, dans son observatoire Denda, à des études commerciales tous azimuts, par type de distribution. Sur l’agroalimentaire, cet observatoire, à juste titre, fait un focus sur l’acte d’achat fruits frais + légumes frais + lait + œufs + produits laitiers + viande + volaille + gibier + charcuterie + plats cuisinés.
Cet éclairage correspond assez bien aux spécialités d’Iparralde dans lesquelles, a priori, nous pourrions tirer notre épingle du jeu. Les chiffres sont obtenus par sondage sur le denier achat de la “ménagère” de la zone considérée (Pays Basque, Sud des Landes et Pays Basque + Sud des Landes).
J’ai les chiffres 2010 et 2013. Dans le circuit court on distingue marché et foire d’une part, vente directe producteur d’autre part.
Rentrons dans le vif du sujet
• évolution 2010/2013 : évolution lente mais positive puisque la totalité du circuit court passe pour la zone totale (PB + S des L) de 9,4% à 9,7% des achats totaux des produits sélectionnés.
• répartition marché/vente directe : retenons, à gros traits, que la proportion est de 3/4 pour 1/4, donc que la grosse majorité du circuit court est assurée par les marchés.
• différence Pays Basque/Sud des Landes : elle existe puisque pour le Pays Basque le circuit court est de 10,2% alors que pour le Sud des Landes il est à la hauteur de 7,6% des achats des produits sélectionnés
• évolution de la vente directe 2010/2013 : elle est lente mais positive. Pour le Pays Basque, elle passe de 2,3% des achats à 2,6%, pour le Sud des Landes de 2,1% à 2,2% (si tant est que des chiffres relativement faibles puissent donner une statistique fiable). Néanmoins, il sera intéressant de les conforter par les statistiques 2014.
• comparaison par rapport au hard discount alimentaire : les chiffes sont aussi relativement intéressant, l’argument “la qualité ou la proximité est chère” est souvent repris par les tenants de l’agriculture productiviste ou de masse, ou par les tenants de l’alimentation “pour tous” en opposition à l’alimentation “élitiste” (j’ai déjà entendu ces allusions lors de réunions sur le thème de l’agroalimentaire d’Iparralde). Ce hard discount alimentaire représentait 8,1% des achats en 2010 (moins que le circuit court 9,4%) et en 2013, 7,6% (pour un circuit court à 9,7%). Peut-être aussi, ne nous y trompons pas, la “ménagère” interviewée n’osait-elle pas dire qu’elle achetait en hard discount?
• évolution petite enseigne locale 2010/2013 et extension aux hyper et supermarchés : ici aussi les chiffres sont encourageants puisqu’ils passent de 14,4% à 17,7%. Dans la même période, nous avons vu que le hard discount recule, comme recule aussi le total hypermarché + supermarché, en 2010, 40,8% + 24,8% soit 65,6% pour 37,9% + 23,1% soit 61% en 2013.
Conclusion rapide sur ces chiffres
Nous sommes, à mon humble avis, devant une tendance lourde, bien entendu à conforter en 2014, dont nous attendons les chiffres avec intérêt : l’achat agroalimentaire territorial gagne du terrain. Il y a encore beaucoup à faire, car il est encore marginal. Il a sans doute une spécificité basque, à confronter néanmoins avec d’autres zones d’Aquitaine ou de l’Hexagone. Il ne faut pas oublier les circuits traditionnels de proximité (boulangerie, charcuterie ou boucherie qui doivent jouer aussi un rôle s’ils sont boostés par des initiatives type Herriko…
Extension souhaitée, de l’intention à l’acte
Trois axes importants sont à travailler :
• création de la ceinture verte maraîchère autour ou dans l’Acba, en vue de produire les fruits et légumes de proximité. L’Acba y est favorable, transformons l’essai avec au moins une implantation en 2014.
• création d’un centre technique agroalimentaire : sur Saint-Palais avec toutes les bonnes volontés et les acteurs principaux : entreprises, lycée, chambres consulaires, élus de bonne volonté, expertise technique, BLE, etc. pour élaborer techniques nouvelles, produits nouveaux, process nouveaux, dans l’esprit de l’innovation frugale
• étendre la filière Herriko à une troisième opportunité, avec pain/blé et viande
On dagizuela, bon appétit !