À Baigorri, du 23 au 29 juin, l’IFJD organise la Xème édition de son Programme d’été, comprenant une Université d’été, un Festival du film et un Forum public. Alors que l’Université d’été se penchera sur les responsabilités des entreprises, Jean-Pierre Massias, professeur de droit à l’UPPA et président de l’IFJD, nous rappelle l’importance et les enjeux de la défense des droits économiques, sociaux et environnementaux, dans cette interview réalisée par Lorena Gualteros-Vanegas.
Lorena Gualteros-Vanegas : Il est assez rare d’organiser des événements autour de la défense des droits économiques et sociaux, pourquoi ce choix ?
Jean-Pierre Massias : Nous avons choisi de nous concentrer sur ces droits car ils sont essentiels et souvent négligés. Nous avons tendance, dans les questions de droits fondamentaux, à retenir les aspects sociétaux : les droits des minorités, le droit à l’environnement, etc. plutôt que les aspects sociaux, qui se rattachent au droit du travail, aux conditions minimales d’existence, le logement, la nourriture, l’éducation. Ces droits sont au cœur de la dignité humaine et celle-ci ne se résume pas à l’absence de torture ou d’esclavage, elle inclut aussi la possibilité de vivre dans des conditions dignes. C’est pourquoi nous avons décidé de mettre l’accent sur ces droits, particulièrement dans le contexte de la Justice transitionnelle, où ils doivent également être protégés et promus.
Lorena Gualteros-Vanegas : Plusieurs sessions ou films sont consacrés aux droits des peuples autochtones…
Jean-Pierre Massias : Ce choix repose sur deux constantes. D’abord, les droits des peuples autochtones représentent un domaine de compétence et d’intervention de l’IFJD. Nous portons un vif intérêt à cette question, tant en France qu’à l’étranger, comme en témoigne l’organisation d’une Université d’été entièrement dédiée à ce sujet il y a quelques années. Ensuite, s’intéresser aux peuples autochtones revient à soutenir des communautés souvent très vulnérables et menacées, qui luttent pour préserver une identité traditionnelle et culturelle distincte de la société occidentale dominante. Les droits des peuples autochtones englobent des enjeux cruciaux liés à l’environnement et aux modes de vie, reflétant des réalités souvent méconnues. Ce sont à la fois des efforts pour restaurer des modèles sociaux fragilisés par le colonialisme et pour préserver la richesse de la diversité mondiale.
Lorena Gualteros-Vanegas : La garantie des droits environnementaux devrait-elle également être un engagement de la part des entreprises ?
Jean-Pierre Massias : Oui, garantir les droits environnementaux doit être une responsabilité des entreprises. Ces dernières, qu’elles soient publiques ou privées, jouent un rôle crucial dans la défense de ces droits et peuvent être responsables de violations graves comme la pollution et le réchauffement climatique. Leur responsabilité doit être engagée et leur bonne volonté soulignée. Cela concerne aussi bien les petites que les grandes entreprises, qui possèdent parfois des capacités d’intervention supérieures à celles des États. En matière de droits environnementaux, sociaux et politiques, les entreprises doivent agir de manière responsable, et en cas de manquement, être sanctionnées comme les États.
Lorena Gualteros-Vanegas : L’IFJD propose un dîner palestinien lors de son Forum public du 29 juin. Souhaitez-vous transmettre un message à travers cette initiative ?
Jean-Pierre Massias : L’organisation d’un repas palestinien lors de notre événement revêt plusieurs significations. Nous entretenons des relations spécifiques avec la Palestine et Israël, incluant des correspondants en Israël et la participation d’étudiantes palestiniennes lors de notre première Université d’été il y a 10 ans, une période marquée par des attaques contre Gaza. Ce repas palestinien est un rappel de la continuité du conflit israélo-palestinien. Nous ne minimisons pas la responsabilité du Hamas ni la brutalité des événements comme ceux du 7 octobre, clairement qualifiés de crimes contre l’humanité. Cependant, notre initiative vise aussi à exprimer notre solidarité envers les civils palestiniens, qui comptent près de 40.000 victimes aujourd’hui, confrontées à des pratiques qualifiées de génocidaires et de crimes contre l’humanité, selon l’ONU. Cette initiative revêt une grande importance pour notre Programme d’été, lieu de rencontre des peuples dans des contextes particuliers, où la question de la Palestine est abordée au même titre que celle de la Nouvelle-Calédonie ou d’autres régions touchées par des conflits.
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Festival du film et Forum public en accès libre et gratuit. Dîner palestinien sur réservation à [email protected]