Enbata: L’aménagement du territoire basque est en pleine ébullition. Une commission départementale a présenté un Schéma de coopération intercommunale où le préfet a pris une place majeure. Au titre de président de la Communauté Garazi-Baigorri, avez-vous participé aux travaux de cette commission?
Jean-Michel Galant: Je n’ai malheureusement pas pu intégrer cette commission. Lors-que je me suis inquiété auprès des services préfectoraux j’ai découvert l’existence d’un mail totalement anodin, arrivé en mairie et que personne n’a vu, dans lequel figurait l’arrêté du préfet indiquant la date de clôture du dépôt des candidatures. C’était déjà trop tard. L’Association des Maires avait constitué une liste consensuelle gauche-droite dans laquelle elle a cru bon de considérer que le territoire Garazi-Baigorri était déjà représenté par la présence du maire de Baigorri dans le collège des élus représentant les communes. Ainsi, la CDC Garazi-Baigorri se trouve être la seule Communauté du Pays Basque à ne pas être représentée par son président ou un vice-président. Mes différents courriers et appels téléphoniques auprès du président de l’Association des Maires ou du sous-préfet n’ont rien changé. La liste était déposée. J’observe que ceci n’a pas provoqué de protestation chez les candidats représentant les CDC voisines, qui, quelques jours plus tard, m’invitent à nous retrouver au sein d’une même Communauté.
Enb.: Après quelques hésitations il semblerait que l’on propose le regroupement de l’ensemble des intercommunalités de la Basse-Navarre historique, Labastide-Clairence compris, Bidache exclu. Quelle est la justification de ce choix territorial « Basse-Navarre »?
J-M.G: D’abord je voudrais souligner que le regroupement des 70 communes intégrées dans les trois CDC de Basse-Navarre ne correspond pas du tout au territoire historique de Baxenafarroa et ce, même après l’inclusion de Labastide-Clairence. Peut-être l’idée vient-elle de l’existence du Syndicat mixte Baxenafarroa porteur du PCD de Basse-Navarre ce qui pourrait laisser penser que ce territoire élargi fonctionne déjà ensemble, et qu’une telle configuration ne ferait que sceller définitivement des liens forts déjà existants. Plus qu’une volonté locale, il faut souligner que c’est à la Région que l’on doit la création de ce syndicat. Appelé à animer et porter un PCD, c’est la Région qui avait exigé qu’il soit réalisé à l’échelle des trois Communautés de Basse-Navarre. En parallèle, un Comité de développement local (CDL) associant des socio-professionnels aux élus a vu le jour et a mené la réflexion afin de définir les enjeux de ce vaste territoire et essayer de trouver des actions globales. Si le CDL a permis d’initier des réalisations, l’envergure de celles-ci et leur réalisation ont été, dans presque tous les cas, de dimension locale répondant à un besoin de l’un des territoires communautaires. Ceci dit, il n’y a pas de doute ce travail de réflexion doit continuer. Le CDL Baxenafarroa, grâce à la détermination de son président, a été reconduit et c’est une bonne chose. Si le Syndicat a décidé de lancer plusieurs études à l’échelle des trois CDC, je pense à l’OPAH, la planification, aujourd’hui sur l’avenir des services santé, la dimension territoriale est tout à fait cohérente mais ce n’est pas pour autant que ces travaux justifient la refonte des trois CDC en une seule.
Concernant Labastide-Clairance je reste dubitatif. Ceci me laisse penser que le retour de la position de l’état en l’espace de huit jours, après n’avoir entendu que l’avis personnel de trois élus, n’a pour objectif que de nous faire réagir. Nous avons trois petits mois pour le faire et espérer que l’ensemble des collectivités appelées à donner leur avis prenne le temps de réfléchir sérieusement à la question au regard d’une multitude d’éléments qui nous manquent encore pour pouvoir trancher.
Enb.: Quelles sont les réactions actuelles des élus de votre zone? Ont-ils des alternatives à proposer?
J-M.G: Je constate que trois membres de la Commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) ont exprimé, dès la première réunion, le bien-fondé à leurs yeux du regroupement des trois CDC de Basse-Navarre. Il s’agit du maire de Baigorri Jean-Baptiste Lambert, Lucien Elgue, président de la CDC Iholdi Oztibarre et de Barthélémy Aguerre, vice-président de la CDC Amikuze. Ces interventions, à l’évidence concertées, ont suffi pour que le préfet change d’avis en huit jours. Je pense que le moment est venu de rassembler tous les éléments nous permettant d’évaluer sérieusement les avantages et les inconvénients d’un tel regroupement et les conséquences fiscales notamment pour les uns et les autres. Je pense également aux nouvelles compétences qu’il nous faudra intégrer, au nouveau mode de fonctionnement, au nouvelles priorités qui ne manqueront pas de surgir. Je m’interroge sur le projet que nous pourrions partager. Un projet qui n’existe pas aujourd’hui, même après cinq années de collaboration dans le Syndicat Baxenafarroa. Il y a sur ce territoire deux véritables pôles urbains qui se développent aujourd’hui de façon indépendante. Le bassin de vie autour de Saint-Palais et le bassin de vie autour de St-Jean-Pied-de-Port. Dun coté une intercommunalité déjà ancienne très engagée. De l’autre une jeune communauté qui a su rassembler deux cantons mais qui a besoin encore de faire du chemin et de s’affirmer davantage. Je me souviens de la création de la CDC Garazi-Baigorri. Il nous avait fallu treize mois de travail pour nous accorder sur les compétences. Pourtant nous avions, nous aussi, certaines actions communes à limage du Syndicat Baxenafarroa et nos relations étaient autrement plus importantes que celles que vivent aujourd’hui Amikuze et Garazi-Baigorri. Je pense que l’esprit communautaire entre les trois Communautés est encore à trouver. Ceci ne se décréte pas et demande du temps.
Enb.: Pensez-vous que ce remodelage territorial puisse entrer en application dans un délai raisonnable? Sans l’aval des élus, ce Schéma territorial peut-il voir le jour?
J-M.G: Nous sommes devant des délais très courts. Cela ne facilite pas une bonne ré-flexion. Le 1er juillet 2013 tout doit être en place. Dans le cas où c’est le regroupement qui serait retenu, je pense que nous aurons beaucoup de difficultés. Quel fonctionnement mettrons-nous en place entre les 91 délégués que regrouperait le nouveau Conseil communautaire? Il est vrai que j’ai entendu dire qu’il suffit de dix personnes pour travailler. Le préfet lui même a privilégié dans un premier temps la constitution de deux Communautés renforcées “en raison du trop grand nombre de communes (70) et de distances parfois très importantes entre celles-ci (80 km), réalités factuelles qui compromettraient son bon fonctionnement”. Alors pourquoi ne pas respecter les bassins que les hommes ont eux-même constitués par leur pratiques quotidiennes?
C’est la raison pour laquelle je plaiderais plutôt pour la consolidation de Garazi-Baigorri qui est en phase de concrétiser plusieurs projets structurants de son territoire Nous sommes en présence de deux pôles urbains, deux bassins de vie qui se développent de manière indépendante et sont en capacité de le faire en gardant la proximité indispensable à la bonne évaluation des niveaux de projet et en s’autorisant à travailler avec les CDC voisines chaque fois que la dimension territoriale le justifie. Je pense par exemple à l’étude que nous avons récemment décidé de porter ensemble sur la définition du Projet territorial de santé de Basse-Navarre et de Soule, je pense également à la réponse qu’il nous faudra porter dans un proche avenir à la disparition annoncée des services de l’Etat en matière d’urbanisme. Ce n’est pas pour autant que ces problématiques communes nécessitent la refonte totale des trois Communautés.
L’enjeu est énorme et mobilisera, je l’espère, l’ensemble des élus et au-delà.