Avec les Assises départementales des Etats généraux des territoires de jeudi dernier 13 septembre à Bayonne, nous ne sommes déjà plus dans l’élaboration du consensus local entamée depuis presque un an par le Conseil des élus-Conseil de développement du Pays Basque. Ce premier acte du débat général voulu par le Sénat a pourtant été fortement dominé par le vote fondamental du 6 septembre, qu’Enbata a rapporté la semaine passée, en faveur d’une collectivité territoriale. Il a même été l’occasion d’un retournement spectaculaire et décisif de trois éminents élus socialistes, dont la députée Colette Capdevielle*, qui avaient cosigné un amendement assassin de dernière minute, mettant à bas le long travail de réflexion du Conseil des élus. S’ajoutait à cette prise de position publique au cours de ces assises, celle du député Jean Lassalle. On peut donc déjà considérer la décision du Conseil des élus, en faveur d’une collectivité territoriale basque, largement majoritaire avec le soutien affiché de nos trois députés du Pays Basque et de deux sénateurs sur trois des Pyrénées-Atlantiques, Frédérique Espagnac et Jean-Jacques Lasserre.
A la hauteur de l’histoire
Au-delà de ce fait politique majeur, ces assises départementales organisées par les sénateurs des Pyrénées-Atlantiques se sont articulées en deux séquences, présentées comme des tables rondes à thème, animées par l’universitaire Jean-Michel Uhaldeborde. A dire vrai, la plupart des intervenants sensés techniquement développer ces débats ont avoué y avoir été invités quelques instants auparavant et, de ce fait, être pris de cours. Ainsi, statut de l’élu, relation Etat/collectivité territoriale, complémentarité ruralité/centre urbain, fiscalité, intercommunalité -tout celà, pouvant être traité aussi bien en Auvergne qu’en Charente- a été complètement avalé par la spécificité basque. Les trois sénateurs, Labazée, Lasserre et Espagnac, ont ouvert et clos la séance qui n’a réuni qu’une soixantaine d’élus, quelques simples citoyens et de nombreux journalistes. Jean-Jacques Lasserre y a clairement défendu le texte voté par le Conseil des élus dont il est le président, de même Frédérique Espagnac qui a hissé l’événement à la hauteur de l’histoire de France et enfin Georges Labazée, silencieux sur l’aspiration basque et qui, président du Conseil général, devait le lendemain présider une réunion identique à Pau pour les élus béarnais.
Bousculer les habitudes
C’est donc Marie-Christine Aragon, qui en lisant la déclaration, reproduite ci-après, annonçait son ralliement et celui de Colette Capdevielle, qui a été l’élément majeur de cette réunion. Ce revirement, signe d’une honnêteté politique après une erreur tactique reconnue, fut applaudi. Sylviane Alaux, députée, tint des propos forts: «Si l’on ne tenait pas compte des travaux du Conseil des élus, je me sentirais un peu humiliée. Il faut mettre en œuvre ces réponses. Notre territoire a atteint sa maturité». Frédérique Espagnac, sénatrice: «Nous sommes ici pour une collectivité territoriale en Pays Basque». Martine Bisauta, débatrice irremplaçable au cœur de ces thèmes, Jean-René Etchegaray, dénonçant la «perfidie» de certains socialistes, Alain Iriart demandant de bousculer les habitudes et d’être novateur, Jean-Michel Galant, Christine Bessonart, Sauveur Bacho sollicitant une consultation populaire, Alice Leiciagueçahar et Jakes Abeberry, rappelant les étapes des trois actes de la décentralisation et les manquements de l’Etat, allèrent tous, avec des arguments complémentaires, dans le même sens. Guy Lafite, Jean Espilondo, Guy Mondorge se placèrent à des nuances près dans le camp d’en face, pour le statu quo.
On attend maintenant le rendez-vous promis par la ministre de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, avec la délégation du Conseil des élus.
*Avec Colette Capdevielle, ont rejoint le texte du Conseil des élus, Marie-Christine Aragon et Christophe Martin, conseillers généraux PS.
Intervention de la Conseillère générale socialiste Marie-Christine Aragon, en son nom propre et celui de la députée Colette Capdevielle, aux Assises
départementales des Etats généraux de la démocratie territoriale à Bayonne.
“Le dépôt d’un amendement sur une position minimale visait à constituer un consensus, en premier lieu parmi les élus PS et sympathisants, puis de rallier sur cette position commune l’en-semble des élus du Pays Basque. Nous visions par là, la poursuite de la démarche engagée par le Conseil des élus et le Conseil de développement du Pays Basque sur la gouvernance Pays Basque et l’adhésion la plus large possible, répondant ainsi à la nécessité d’une réponse, sinon unanime, du moins très majoritaire, demandée par la ministre Marylise Lebranchu.
Force est de constater que notre démarche n’a réussi à rallier, dans notre propre parti, ni les opposants à la collectivité territoriale, ni ses partisans les plus engagés, ni les plus modérés. Ne parlons pas du deuxième objectif qui visait à rassembler au-delà de la gauche, car nous savons que nombre d’élus ne sont pas favorables à la collectivité mais préfèrent choisir l’absence.
Notre position était responsable car réaliste, mais tardive et inefficace. Nous avons pris des années de retard sur cette problématique, n’ayant pas de position commune assumée nous ne sommes pas en mesure d’attirer l’adhésion.
Etre minoritaire ne m’a jamais posé le moindre problème, à condition de me battre pour mes convictions et mes valeurs. Mon adhésion reposait sur la raison, sur la volonté de mettre en œuvre tous les moyens pour éviter que la démarche soit enterrée faute d’une majorité large, que le territoire puisse poursuivre le travail engagé sur la gouvernance Pays Basque. Cette démarche, demeurant très minoritaire, risque elle-même d’être porteuse d’échec. J’ai donc décidé d’assumer mes convictions personnelles de soutien à la collectivité territoriale à statut particulier. Colette Capdevielle, retenue à Paris dans le cadre de sa mission parlementaire, m’a demandé de l’associer à ce texte”.