Cessez-le-feu d’ETA

Les quatre signataires indiquent dans un texte rendu public le 25 septembre à Gernika qu’un tel cessez-le-feu sera «l’expression de la volonté d’ETA en faveur de l’abandon définitif de la lutte armée». La déclaration s’adresse également au gouvernement espagnol: lui est demandée «la reconnaissance des droits civils et politiques permettant l’activité et le développement de tous les projets politiques», en d’autres termes le droit pour Batasuna d’être légalisé et de pouvoir présenter des candidats aux élections.
L’arrêt des poursuites à l’égard des militants abertzale, la disparition de la procédure d’isolement lors des arrestations et qui permet la torture systématique hors de tout contrôle, la fin de la politique de dispersion des preso basques et des mesures discriminatoires prises à leur encontre, font partie du catalogue des mesures que devraient prendre rapidement les autorités espagnoles. Les signataires rappellent qu’ils souscrivent aux principes du sénateur Mitchell et évoquent la situation des victimes, «la nécessité d’une reconnaissance, d’une réparation et de la réconciliation».
Jamais la gauche abertzale proche d’ETA n’était allée aussi loin dans ses déclarations
sur la nature et les conditions du cessez-le-feu demandées à l’organisation armée basque.
Son caractère permanent et vérifiable par la communauté internationale sont les termes même de la Déclaration de Bruxelles signée il y a quelques mois par plusieurs prix Nobel
pour la résolution du conflit basque. Le terme de «reconnaissance» des victimes n’avait à ce jour jamais été utilisé. Quant à évoquer explicitement «l’abandon définitif de la lutte armée», cela constitue également une grande première.
La déclaration du 25 intitulé «Bake bidean aterabide demokratikoen akordioa», Accord pour un scénario de paix et de solution démocratique, a reçu le soutien d’une trentaine d’organisations politiques ou sociales: les syndicats LAB, EHNE, Hiru, ESK, STEE-EILAS, ELB, les organisations de jeunesse des différents partis politiques signataires, les organisations de soutiens aux preso (Etxerat, Amnistiaren Aldeko Mugimendua), L’observatoire des droits de l’homme, Herria 2000 Eliza, etc.

ETA rappelle ses conditions
Le même jour, le quotidien Gara mettait en ligne et faisait paraître le 26 septembre dans
son édition papier, une longue interview de deux porte-parole d’ETA. L’organisation armée basque indique qu’elle a déjà «fait un pas en avant et a la volonté d’en faire d’autres si l’on crée les conditions pour cela». Euskadi Ta Askatasuna critique durement l’immobilisme et le blocage de certains et appelle à l’ouverture de négociations avec une définition des objectifs, la méthode de la démarche, des règles du jeu et l’ordre du jour. «Le problème est que l’Etat espagnol veut fixer ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, par-dessus la volonté populaire», indique ETA qui fait allusion à l’exigence d’un abandon définitif de la violence exigée par l’Espagne, en préalable à toute concession, en particulier celle de la légalisation de Batasuna. Parmi les premières mesures a minima que le gouvernement devrait prendre, figurent selon ETA, la libération des prisonniers malades et de ceux dont une nouvelle législation rallonge l’incarcération, au-delà de ce qui a été décidé par le juge lors de la condamnation initiale. Le caractère «définitif» du processus de paix est suspendu au fait que «les citoyens basques auront la parole», en d’autres termes la mise en œuvre d’un référendum, et que l’expression de cette «volonté sera respectée».
Bien qu’ETA nie tout désir de mettre sous sa tutelle les futures négociations, nous som-mes bien pour le moment dans ce scénario qui auparavant a toujours échoué et que rejette catégoriquement le gouvernement espagnol. Au-delà des effets d’annonce et de l’effort de mise en scène, ETA qui a fait trois déclarations en un mois, reste sur ses positions traditionnelles. Il refuse toujours de dire oui à l’exigence numéro un de la Déclaration de Bruxelles, lancée il y a plusieurs mois par plusieurs prix Nobel: «La déclaration d’un cessez-le-feu permanent et complètement vérifiable». Il se dit prêt à le faire, si le gouvernement espagnol fait un pas en avant. Sa formulation est même plus vague et sibylline dans son communiqué du 15 septembre adressé à «la Communauté internationale»: «ETA est disposé à examiner conjointement [avec les signataires de la Déclaration de Bruxelles] les avancées que requiert une solution démocratique, y compris les engagements que doit prendre ETA».
L’élément nouveau dans le paysage politique basque demeure l’évolution de l’ex-Batasuna qui s’aligne au fil des mois sur les positions définies par ses partenaires actuels et avec lesquels il s’est tant affronté par le passé. Si échec il y a, tout porte à croire que cette nouvelle alliance volera en éclats comme ce fut le cas lors des Accords de Lizarra-Garazi. Cependant, beaucoup s’accordent à dire qu’y compris au sein de Batasuna, «un changement de mentalité» est en cours et qu’il n’y aura pas de «retour en arrière».

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