Euskaltzaindia (II)
Avec L’élection de Jean Baptiste Coyos à l’Académie de la langue basque, celle-ci est désormais composée de 30 académiciens, parmi lesquels six émérites et vingt quatre titulaires. En l’espace de 91 ans d’existence le nombre d’académiciens est donc passé de 12 à 30.
Quand, en 1918-1919 naît Euskaltzaindia, il convient de rappeler qu’il n’y a pas d’université au Pays Basque en dehors de celle des Jésuites à Deusto, laquelle est essentiellement tournée vers le droit et le commerce et se préoccupe fort peu de la langue basque. Il est évident que, à cette époque, le savoir est entre les mains du clergé et d’une partie de la bourgeoisie qui a fait des études universitaires. C’est ainsi que parmi les douze premiers académiciens figurent sept prêtres et cinq laïcs qui, même s’ils ont pensé œuvrer pour une langue littéraire commune et l’établissement d’un Atlas linguistique, ne sont pas parvenus à leur fins.
Ce n’est que pour célébrer les noces d’or d’Euskaltzaindia qu’est décidée l’organisation d’un Congrès dont le thème central porte sur la nécessité de créer la langue commune, le basque standard ou “euskara batua”, congrès qui se tiendra à Aranzazu, ce haut lieu de la résistance culturelle basque, comme l’était Montserrat pour la Catalogne. Désormais la machine est en marche, l’Académie se structure sur le plan de la recherche autour de cinq grandes commissions dont les travaux porteront leurs fruits quelques dizaines d’années plus tard.
Un événement d’une grande importance va se produire en 1975, le 20 novembre très exactement: le décès de Francisco Franco le caudillo. En effet, trois mois plus tard jour pour jour, le 20 février 1976, le gouvernement espagnol se réunit à Barcelone et officialise “l’Institut d’estudes catalans”, l’Académie gallicienne et Euskaltzaindia qui devient, par décret royal du 26 février 1976, “Real Academia de la lengua vasca”. Evènement remarquable que celui qui reconnaît les institutions des trois langues minoritaires de la péninsule, langues méprisées pendant toute la période franquiste et qui place ces institutions sous la tutelle de l’Etat comme l’est l’Académie de la langue espagnole et les autres Académies de l’Institut d’Espagne. Trois mois après le décès du Caudillo, c’est bien l’amorce d’une nouvelle politique linguistique qui sera confirmée dans la Constitution en son article 3 qui officialise sur leur territoire le catalan, le galicien et le basque. Une ère nouvelle s’annonce.
Alors que Hegoalde vit sous la botte franquiste, les prémisses d’une évolution en faveur des langues régionales se manifestent en France par la création d’une chaire de langue basque à l’Université de Bordeaux en 1948, le vote de la loi Deixonne en 1951, la création d’une maîtrise de conférences à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour en 1967.
Bouleversement en Hegoalde par la création de l’Université du Pays Basque dans ses trois campus de Donostia, Bilbao et Gasteiz, de deux universités en Navarre et une à Mondragón. Bayonne devenant en Iparralde le haut lieu des études basques avec tous les diplômes et concours officiels et le Centre de recherches “Iker”.
A son tour, Euskaltzaindia témoigne de cette évolution. En effet, sur les 30 académiciens, 2 sont des prêtres et, parmi les 28 laïcs figurent 5 femmes, la première, Miren Azkarate, ayant été élue en 1992. Si en 1919 les prêtres étaient en majorité désormais le sont les universitaires, qu’ils soient en exercice ou à la retraite, au nombre de 19 docteurs issus des universités de Bordeaux, de Pau, de Navarre, de Deusto et de l’Université du Pays-Basque ainsi que du CNRS. En 60 ans, le Pays-Basque, dans son ensemble a effectué une mutation extraordinaire.