Le PNV négocie avec le gouvernement espagnol

Depuis le mois de mai, c’est en permanence la «chemin de croix» pour Zapatero, lorsqu’il veut faire voter une loi aux Cortés. Ses alliés catalans traditionnels (CiU, ERC et ICV, soit 19 députés) refusent de le soutenir, tant la situation politique s’est tendue en Catalogne. On l’a vu il y a quatre mois lors du gel du montant des retraites, la majorité gouvernementale espagnole ne tient qu’à une voix, avec le risque d’être mise en minorité, de devoir dissoudre les Cortés et des élections anticipées à la clef. José Luis Rodriguez Zapatero veut non seulement faire approuver son budget, mais aussi adopter plusieurs lois importantes liés à sa politique économique face à la crise et au dossier des retraites. Il y a urgence. Le chef du gouvernement recherche donc des alliés du côté de la Coalition canarienne (deux députés) et surtout du PNV (6 élus) et même de l’UPN (1) dont il essaie de maintenir la neutralité aux Cortés en obtenant l’abstention de son uni-que député.
L’an dernier, Zapatero avait négocié avec le PNV le renforcement du Concierto économique, mais les deux partenaires n’étaient pas parvenus à un accord sur le transfert des compétences en matière d’emploi, se-cond volet du protocole. C’est aujourd’hui ce dossier qui est sur la table. En voyage en Extrême-orient, Zapatero lance son offre le 1er septembre. Le gouvernement espagnol veut bien transférer partiellement cette compétence, à hauteur de 327 millions d’euros, le PNV en exige 480.

Au rabais
Le Parti nationaliste basque qui siège toujours au sein de la Commission mixte alors qu’il ne dirige plus le gouvernement autonome basque, a rejeté hier cette formule au rabais. Il est trop habitué à des transferts sur le papier, non assortis des moyens fi-nanciers adéquats que le gouvernement basque est obligé de couvrir sur ses fonds propres… Mais le transfert de la compétence en matière des politiques de l’emploi —qui figure dans le texte du statut d’autonomie voté en 1979— n’est pas seulement une affaire de gros sous. Pour rendre ces politiques efficaces entre les mains du gouvernement basque, le PNV exige de pouvoir gérer les sommes relatives aux aides en matière d’indemnités de chômage et de formation professionnelle. Celles-ci sont liées aux cotisations salariales à la Sécurité sociale. Les Espagnols rejettent cette demande au nom du sacro-saint principe de l’unité de la Caisse de Sécurité sociale, garant de l’indivisibilité de l’Etat espagnol (2).
La négociation PNV-PSOE porte sur d’au-tres chapitres: le transfert des services de l’Inspection du travail, le soutien au secteur des machines-outils si important dans l’économie basque, le changement officiel en euskara du nom des provinces basques, comme l’ont déjà obtenu les Catalans, le soutien des socialistes pour voter le budget de certaines députations. Le PNV aimerait y ajouter le respect du principe de l’accession au pouvoir de la formation politique arrivée en tête aux élections… Mais il ne faut pas rêver, cela supposerait l’éviction du Lehendakari socialiste Francisco Lopez.

Lopez doublé
Ce dernier est évidemment très gêné de voir son principal opposant négocier les intérêts de l’autonomie basque. Le débat lui passe largement au-dessus de la tête, le voici réduit au rôle de spectateur. Pour sauver la face, Il se présente déjà comme «le garant» du futur accord et veut être présent à la signature. Même le PP râle copieusement contre cette négociation PNV-gouvernement socialiste, il rappelle que le transfert des politiques en matière d’emploi figure noir sur blanc dans l’accord passé entre le PP et le PSOE, signé peu avant l’accession des socialistes au pouvoir dans la Communauté autonome basque avec les voix des députés de droite.
Ce débat éclaire la nature des relations et des négociations entre les Basques et les Espagnols. Si on veut qu’elles aboutissent, il faut que le parti au pouvoir en Espagne soit suffisamment affaibli pour avoir impérativement besoin des voix des députés basques afin de se maintenir aux affaires. Les Espagnols doivent en outre avoir à vendre aux Basques quelque chose que les Basques désirent acheter. L’Espagne distille ainsi au fil des ans quelques parcelles de compétences qu’elle garde soigneusement en réserve, alors qu’elle les a officiellement accordées depuis plus de trente ans. L’autre condition est que les Basques disposent du plus grand nombre possible de députés à Madrid pour faire monter les enchères.

Achat-vente difficile
A l’inverse, dans la négociation entre ETA/ Batasuna, on voit combien les Basques sont démunis. Cela fait belle lurette —interdiction ou pas— qu’ils n’ont aucun représentant aux Cortés, ils n’y ont quasiment jamais siégé, même à l’époque où ils disposaient de députés. Ils ne pèsent donc rien à Madrid pour le maintien du parti au pouvoir. L’autre «bien» qu’ils auraient à vendre est la paix des armes: elle est extraordinairement dévaluée du fait de l’affaiblissement de la lutte armée, via la répression franco-espagnole et des choix militaires d’ETA. Du point de vue espagnol, négocier quoi que ce soit avec ETA/Batasuna fait perdre des points au parti au pouvoir, tant l’opinion publique y est opposée. Les Espagnols qui sont parvenus à marginaliser ETA/Batasuna et par ce biais, ont conquis le pouvoir dans la Communauté autonome, ne désirent pas vraiment leur acheter grand-chose. Ils n’ont plus qu’à attendre que les Basques fassent monter leur offre pour éventuellement lâcher quelques miettes. D’où le statu quo actuel entre un partenaire qui n’a plus grand-chose à vendre et son interlocuteur qui ne veut plus rien acheter.
Du coup, nous en arrivons au scénario d’aujourd’hui. C’est vers les abertzale que se tourne ETA/Batasuna pour leur vendre une future paix. Le seul prix à payer étant la constitution d’un pôle souverainiste. Plus personne ne croit à une négociation basco-espagnole placée sous la menace de la reprise de la lutte armée, tant ce scénario est usée jusqu’à la corde, après une dizaine de déclarations de trêve en trente ans. La formule de la piste d’atterrissage sur le terrain politique basque est la seule qui semble réaliste aujourd’hui. La dernière déclaration d’ETA avec sa proposition a minima qui dans le meilleur des cas, sera suivie d’autres engagements plus fermes, en est l’illustration.

(1) Ce parti régionaliste navarrais est un clone du PP, mais il a rompu cette alliance historique pour conserver le pouvoir en Navarre avec le soutien du PSOE, sur le dos des abertzale (Nafarroa bai).
(2) Dans l’Etat belge, le même argument est servi aux Flamands, lorsqu’ils demandent aux Wallons de pouvoir gérer leur propre caisse de Sécurité sociale. Ils ignorent sans doute que la France, phare du jacobinisme et du centralisme triomphants, ne respecte pas ce beau principe avec un régime de Sécurité sociale particulier, propre à la région d’Alsace.

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