Les cantonales de dimanche dernier ont confirmé l’effondrement du parti de Sarkozy, la poussée du FN et la percée modéré du PS que les sondages annonçaient. Plus significatif encore, le fort taux d’abstention, 56%, illustre bien le décrochage de la classe politique avec la société française.
On retrouve cet ensemble de données en Pays Basque avec de sensibles particularités, dont bien sûr la présence abertzale. Le Front national n’y était présent que dans trois cantons, Bayonne-Nord avec 10,88%, Anglet-Nord avec 8,38% et Biarritz-Ouest avec 11,71%, c’est-à-dire des résultats bien plus faibles qu’en France avec plus de 15%.
L’abstention y est également forte mais d’une manière très différenciée sur la côte et à l’intérieur (voir tableau). Le pourcentage de votants va de 23,15% à Bayonne-Nord à 77,72% à Iholdy. Les raisons généralement avancées pour expliquer cette forte abstention (faible couverture médiatique nationale, pas de couplage avec un autre scrutin, fin de vie des Conseils généraux…) ne tiennent pas au vu du bel impact du scrutin en Pays Basque intérieur, là où la vie du canton rural veut encore dire quelque chose.
Un autre élément nourrissait l’enjeu électoral, le combat gauche/droite, le gain de la Présidence du Conseil général, car l’assemblée était, partagée à égalité, 26 conseillers contre 26 au cours du dernier mandat. Le basculement d’un ou de deux cantons avait donc une valeur éminement politique pour l’un ou l’autre camp. De fait, les résultats de dimanche 20 mars laissent, pour le moment, le suspens en l’état. Anglet actuellement à gauche peut passer à droite, peut-être aussi Bayonne-Ouest alors que le canton de Tardets pourrait faire le contraire. Idem en Béarn.
Un seul élu au premier tour en Pays Basque: Beñat Inchauspé, Nouveau centre, conseiller général sortant et maire d’Hasparren. Il s’inscrit dans une tradition locale d’élu “intouchable”, souvent réélu dès le premier tour, rôle tenu avant lui par Jacky Coumet.
Le vote abertzale
Les abertzale se présentaient sous diverses étiquettes:
– Euskal Herria Bai (EH Bai), plateforme de gauche réunissant Abertzaleen Batasuna (AB), Batasuna et Eusko Alkartasuna (EA). EH Bai était présent dans neuf cantons sur dix sauf à Anglet-Nord représenté par l’association d’action municipale Angeluzain.
– Le PNV était présent dans cinq cantons: Biarriz, Bayonne-Est, Bayonne-Nord, Iholdy et Garazi.
Les résultats sont les suivants (voir tableau):
– EH Bai 3.771 voix soit 12,09% des exprimés.
– PNV 346 voix soit 0,94% des exprimés.
Le PNV s’est lancé dans ces cantonales avec l’illusion d’avoir créé un électorat à l’occasion des régionales de l’an dernier, sans comprendre qu’il n’avait fait que bénéficier, en la circonstance, de l’absence d’AB.
Le résultat global d’EH Bai amène plusieurs réflexions. D’abord saluons l’excellent score du candidat d’Iholdy, Daniel Olçomendy qui avec 32,12% arrive en seconde position derrière le sortant, J-L. Caset 41,34%. Il participera donc dimanche prochain au second tour en tête à tête avec le sortant de droite puisque le troisième, divers droite, maire d’Iholdy, B. Cachenaut, qui pouvait se maintenir, s’est retiré au profit de J-L. Caset. Daniel Olçomendy fortifie les scores abertzale de 2004 passant de 597 voix à 780 voix. Il faut dire que le PS et les Verts, qui ne présentaient pas de candidats dans ce canton, appellaient à voter dès le premier tour pour le candidat EH Bai.
Dans le rayon des satisfactions, la superbe seconde place à Hasparren, 19,76%, de Juliette Bergouignan sera sans prolongement puisqu’il n’y aura pas de second tour.
Enfin, soulignons aussi le beau parcours de Dominique Bacho, 18,83% qui, ayant dé-passé le 12,5% des inscrits, peut se maintenir au second tour. Rappelons que lors des dernières élections de 2004, Peio Iralour candidat AB était dans la même situation d’un possible maintien. Il s’était volontairement retiré en ayant posé diverses questions aux candidats restés en lice.
Deuxième réflexion, après ces bons résultats, il faut constater le terrible décalage entre les résultats abertzale de la côte et de l’intérieur. A la lecture du tableau on constate, élection après élection, la très faible im-plantation dans les cinq cantons urbains. Pour une population deux fois et demi supérieure les abertzale ne recueillent que mille voix soit 4,60% des votants, contre 2.931 voix et 19,45% sur les 5 cantons de l’intérieur. A ce point on ne peut plus parler d’un vote abertzale en Iparralde mais de deux votes.
Enfin, au-delà de cette spécificité territoriale, force est de constater une stagnation globale du vote abertzale (voir tableau).
Europe-écologie-Les Verts, qui avait proposé à AB une alliance électorale refusée en Assemblée générale, ont présenté des candidats dans les cinq cantons urbains plus celui d’Hasparren. Ils y réalisent un score de 9,91%, soit près de deux points de plus que la moyenne française. Ils y ont réunis 2.546 suffrages. Nul doute que leur opposition à la LGV, question centrale du débat public en Pays Basque, et leur indépendance-alliance au PS ait jouée en leur faveur.