Au coeur de la crise immobilière qui frappe le Pays Basque, les résidences secondaires pèsent lourdement sur notre environnement. Mais si le problème est de poids, la fatalité n’est pas de mise. Des solutions existent, que s’appliqueront à détailler plusieurs spécialistes de cette question lors d’une conférence en ligne ce 19 mai.
Le jeudi 19 mai prochain, Euskal Herria Bai propose une conférence en ligne – ou “webinaire” pour celles et ceux qui n’ont pas découvert ce terme barbare le mois dernier comme moi— sur le thème de la résidence secondaire. Une belle affiche pour mieux comprendre ce phénomène et les outils pour y faire face.
Comprendre simplement un monde complexe
Les résidences secondaires, on en parle assez souvent et depuis assez longtemps pour penser tout savoir de la question. Mais comme devant tout autre fait social ou économique, il convient d’être humble devant celui-ci. La résidence secondaire est un petit monde, dans lequel la pompeuse villa d’oligarque russe a bien peu à voir avec le modeste pied-à-terre acheté dans le temps par les parents ; l’investissement purement spéculatif encore moins avec l’etxe familiale laissée vide par contingence professionnelle ou décès de la vieille amatxi ; l’ancienne borde sur les hauteurs de Larrau avec le studio loué sur Airbnb en plein Biarritz…
Ne parlerait-on que de modalités d’occupation qu’on devrait encore introduire d’autres nuances entre le “régime” classique des deux-trois semaines estivales, celui d’un étalement plus ou moins régulier ou durable, voire la mutation plus récente en résidences secondes ou encore en résidences secondaires partagées. Quant aux formules mixtes, il en existe autant que peut offrir l’imagination des propriétaires.
Mais peu importe la diversité du catalogue, à vrai dire. Comme me le fit doctement remarquer mon pompiste l’autre jour, l’existence précède l’essence, et le poids prohibitif que pèse l’ensemble des logements sous-occupés importe bien plus que leur nature et leur variété. Surtout à l’heure où le volontarisme des politiques publiques à leur encontre ne semble guère révéler une prise de conscience à la hauteur de la gravité du problème.
Songeons par exemple au PLH de notre Communauté d’agglomération, voté il y a un peu plus d’un an, qui prévoit encore 35% de nouvelles résidences secondaires parmi les 16.000 nouvelles constructions prévues…
Continuer à évoquer ce phénomène, à expliquer l’impact déstructurant qu’il a sur le tissu économique et social local mais aussi sur l’environnement, est donc fondamental. Et tout aussi importante est la nécessité de dépasser le simple stade de la dénonciation pour parvenir à montrer qu’en ce domaine aussi peu qu’en d’autres il n’est de fatalité, et que des solutions existent bel et bien pour peu qu’on accepte de prendre le problème à bras le corps.
Dans cet exercice, le mouvement abertzale fit figure de précurseur, prêchant longtemps seul dans le désert jusqu’à ce que dans l’aspiration d’une vague rose, la fameuse majoration de la taxe d’habitation fût votée, seule véritable réalisation à ce jour mais d’un poids majeur.
Car, n’en doutons pas, malgré le faible impact de la mesure elle-même, tout a changé avec sa promulgation pour une double raison : juridique bien sûr, puisque ce qui était considéré comme anticonstitutionnel finit par le devenir, faisant sauter un solide verrou ; philosophique surtout, puisqu’enfin la résidence secondaire était officiellement considérée comme un problème à part entière, y compris par les franges libérales de la droite.
Là était assurément le plus important car ensuite, on le sait bien, là où il y a une volonté il y aura toujours un chemin.
Un élan nécessairement collectif
Poursuivre sur ce chemin réclame un effort collectif. Au Pays Basque, le seul mouvement abertzale a beau être un solide aiguillon, il doit —et de surcroît il peut, sur une telle thématique— susciter un élan populaire massif et des relais transpartisans. Abertzaleen Batasuna l’avait déjà tenté lors d’Assises du logement en 2002 à Biarritz, à nouveau en lançant un Réseau logement en 2006, ou encore en invitant à débattre autour de l’ancien ministre Gayssot (“père” de la loi SRU) en 2008 à Saint-Jean-de- Luz, chaque fois sans lendemain. Les esprits aujourd’hui semblent plus mûrs. Mais il convient aussi de dépasser le seul Pays Basque. Non seulement il est illusoire de penser faire bouger le massif législatif français uniquement depuis notre petit morceau d’Hexagone, mais surtout les pires oeillères seraient celles qui refuseraient de voir que des situations similaires à la nôtre existent par ailleurs, de la Corse à la Bretagne, de la Provence à la Normandie, de Paris aux vallées alpines. Seul l’élan commun de toutes les zones dites “tendues” forcera l’écoute des parlementaires et des technocrates à Paris.
C’est dans cet esprit qu’Euskal Herria Bai propose cette soirée en ligne le jeudi 19 mai à 20 heures. Une conférence à cinq courtes prises de parole (suivies chacune par quelques minutes de questions des internautes), donnant une idée de la variété des acteurs qu’il s’agit d’activer dans notre affaire, des expert.es aux citoyens, aux élus, puis aux parlementaires.
Dans le confort de son salon, mieux qu’un derby de rugby : un état des lieux de la question de la résidence secondaire et des perspectives de solutions telles qu’elles pourraient être portées durant la législature qui s’apprête à s’ouvrir.
Le plateau du webinaire :
• Anne Barrioz (géographe au CNRS, spécialiste des zones tendues des Hautes-Alpes)
• Vincent Aulnay (fondateur du collectif citoyen Parisvsbnb contre les meublés de tourisme)
• Létizia Delorme (directrice du SCOT Pays Basque, sur l’impact de la résidence secondaire dans l’aménagement du territoire)
• Peio Etcheverry-Ainchart (EHBai, pour, audelà du diagnostic, lancer des pistes de solution)
• Jean-Félix Acquaviva (député de Haute-Corse, porteur entre autres pistes d’un projet de statut de résident) Webinaire : jeudi 19 mai de 20h à 21h30. Lien communiqué par Euskal Herria Bai sur ses supports habituels.