Synthèse de plusieurs articles parus dans le quotidien de Perpignan L’indépendant
Le maire communiste Nicolas Garcia dénonce « le représentant de l’Etat qui considère que parler catalan au conseil municipal est dangereux pour la République ». La réponse du tribunal administratif sera rendue d’ici un an et demi environ. Cette affaire fait grand bruit en Catalogne Nord.
Le maire de cette commune de près de 10.000 habitants monte au créneau. « Nous ne voulons pas d’une république linguicide et glotophobe ! » Nicolas Garcia réagit le 25 septembre à la procédure lancée par le préfet des Pyrénées-Orientales : Rodrigue Furcy a introduit, auprès du tribunal administratif de Montpellier, une requête en annulation de la délibération du conseil municipal d’Elne. Elle permet à chaque conseiller qui le désire d’exprimer en catalan ses délibérations. À condition de les traduire in extenso en français.
Un début de polémique était né de ce choix. Certains conseillers municipaux d’opposition le refusant, ils s’étaient levés et avaient déserté la séance lorsque cet usage du catalan était effectivement entré dans les faits. Mais d’autres communes catalanes s’en inspirent. Le maire communiste d’Elne dénonce « le représentant de l’État qui considère que parler catalan au conseil municipal d’Elne est dangereux pour la République, c’est grave et c’est une faute. Quel aveu de faiblesse pour la République française si la simple possibilité de parler catalan dans un hémicycle d’une commune de 10 000 habitants dans les Pyrénées-Orientales la fait vaciller. Nous pensons au contraire qu’une république n’est jamais aussi forte que quand elle est capable de s’ouvrir et quand elle fait de sa diversité culturelle et linguistique une force, un atout, plutôt qu’un handicap« .
Les Jacobins : « Il ne faut pas que la langue devienne une sorte d’outil d’apartheid »
Le premier magistrat insiste: « L’État codirige l’Office public de la langue catalane avec le département et la région, dont l’objectif majeur est de promouvoir la culture et l’usage de la langue catalane dans l’espace public. L’État vient de signer une charte avec le département s’engageant à créer les conditions pour que dans les dix ans chaque élève qui le souhaite puisse apprendre le catalan à l’école, et il redoute dans les conclusions de sa requête « tout élément susceptible de mettre à mal les principes fondamentaux de la République et la hiérarchie entre langue officielle et langues régionales. Elle doit s’analyser comme un élément de revendication d’une identité culturelle qui ne doit pas prospérer dans les assemblées délibérantes des collectivités… ».
Le maire d’Elne pense s’appuyer sur la loi pour valider sa décision: « C’est la langue de nos ancêtres. Elle ne nuit pas aux Français et elle n’est pas contraire à l’article 75 de la Constitution qui dit que les langues régionales sont un patrimoine. »
Richesse ou pas, c’est un acte politique et non-culturel selon Gilles Glin, conseiller municipal d’opposition. « On entre dans une démarche portée par les séparatistes et il ne faut pas que la langue devienne une sorte d’outil d’apartheid. Ceux qui parlent contre ceux qui ne parlent pas ; ceux qui sont catalans et ceux qui ne sont pas. Attention à ces discours politiques autour de la langue qui ont conduit les Bretons jusqu’au terrorisme. »
Le préfet : « La langue de la République est le français«
Le 25 septembre, le préfet des Pyrénées-Orientales, Rodrigue Furcy, précise son action : Le 21 avril, la commune d’Elne a modifié le règlement intérieur de son conseil municipal pour permettre au rapporteur et aux conseillers municipaux de délibérer en langue catalane en accompagnant les interventions d’une traduction en français. Le 21 juin 2022, le préfet a demandé, dans le cadre du contrôle de légalité, à la commune de retirer cette délibération. La commune n’ayant pas obtempéré, le préfet l’a déférée devant le juge administratif le 20 septembre 2022 afin que celui-ci puisse se prononcer sur la légalité de cette délibération. Le représentant de l’Etat considère en effet que la délibération de la commune d’Elne permettant la délibération en langue catalane n’est pas conforme aux dispositions suivantes : l’article 2 de la Constitution de la Ve République, qui dispose: « La langue de la République est le français« . Aux termes de l’article 75-1 de la Constitution, « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France », mais elles n’ont pas un statut de langue officielle dans la vie publique. L’article 1er de la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française, dispose ceci: «Langue de la République en vertu de la Constitution, la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France. Elle est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics. »
Le Conseil constitutionnel et les juridictions administratives ont, à plusieurs reprises, jugé illégales les délibérations d’assemblées délibérantes se tenant dans une autre langue que le français. Il appartiendra au juge administratif, dans le cadre du déféré préfectoral, de se prononcer sur la légalité de la délibération de la commune d’Elne, précise l’autorité préfectorale.
Avec les Basques, les Bretons, les Corses, les Occitans et d’autres
Face à la presse le 26 septembre, le maire Nicolas Garcia choisit de renverser la pression dans le bras de fer qui oppose Elne et la préfecture. « Soit le tribunal administratif nous donne raison, soit nous interpellerons très probablement le conseil constitutionnel. Dans les deux cas, une décision favorable concernerait l’usage de toutes les langues régionales lors des conseils municipaux ou autres. Si nous devons aller devant le conseil constitutionnel, nous le ferons certainement avec les Basques, les Bretons, les Corses, les Occitans et d’autres« .
En Pays catalan, seize communes, selon le Syndicat intercommunal pour la promotion des langues occitane et catalane, ont déjà délibéré pour autoriser les échanges et délibérations en catalan, traduites in extenso en français, au sein de leurs conseils: Elne, Amélie-les-bains, Trilla, Latour de France, Vingrau, Port-Vendres, Sorède, Espira de Conflent, Lamanère, Formiguères, Tarérach, Railleu, Saint-André, Sorède, Estagel, Pezilla-la-Rivière et Trilla (en occitan). Il n’est toutefois pas exclu que certaines aient retiré cette délibération, répondant ainsi au recours du préfet, étape avant l’assignation devant le tribunal administratif.
Pour le maire d’Elne, ce recours devant le tribunal administratif est exagéré. Seulement cinq conseillers municipaux sur trente parlent catalan dans sa commune, ce qui fait que la langue est largement minoritaire, dans les faits lors des sessions. « Au dernier conseil nous avons lu deux délibérations en catalan sur 40. Lors du précédent, c’était une seule sur 50. Elles étaient traduites in extenso. Si c’est ça qui met en danger la République… pauvre République ! », ironise-t-il. Il estime que la langue régionale fait partie du patrimoine local et que la préfecture a une attitude « schizophrène » sur le sujet. « Le préfet vient de cofinancer avec la région et le département l’OPLC, l’Office public de la langue catalane, mais il empêche de le parler dans les conseils municipaux. C’est inacceptable ! » Une question se pose : cette décision est-elle contraire ou non à l’article 2 de la Constitution de la Ve république ? « Absolument pas ! Le conseil constitutionnel ne l’interdit pas, il n’y a pas de jurisprudence », précise le maire d’Elne, prenant l’exemple du conseil régional de Bretagne, qui, en début d’année a décidé que les élus pouvaient s’exprimer en breton ou en gallo (langue d’oil).
Une décision qui pourrait faire jurisprudence
La préfecture avance que plusieurs communes ont déjà été rappelées à l’ordre pour avoir utilisé une langue régionale dans des instances officielles, et qu’une jurisprudence en a donc émané. Maître Mathieu Pons Serradeil rétorque que la traduction en français fait toute la différence. « Dans les communes en question, c’était une obligation : du jour au lendemain on est passé du français à la langue régionale sans aucune traduction. C’était donc en effet contraire à la Constitution, qui dit que le français est la langue officielle et ainsi que tous les actes doivent être en français. En revanche, cela ne veut pas dire qu’ils doivent être exclusivement en français« .
Il espère qu’Elne et sa traduction en français feront à leur tour jurisprudence et permettront à d’autres régions comme le Pays Basque, la Bretagne ou la Corse de parler leur langue régionale dans leurs instances.
Là encore la préfecture répond, sans plus de détails, que le français n’est plus qu’une « langue d’accompagnement en traduction« . Le problème semble donc être l’ordre dans lequel les langues sont utilisées. Au tribunal administratif de trancher. Sa décision est attendue d’ici un an et demi.
Beti bezala hizkuntza minorizatuak suntsitu nahi dituela frogatzen digu Frantziako jakobinismoak. Departamentuko prefetak eta Estatuko beste agintariek diotelarik katalaneraren erabilera Elneko herrikoetxean zein besteetan « Errepublikaren Batasunari » eraso bat zaiola oker daude. Suitza begira bezate: lau hizkuntza ofizialak eta lau mendetan zehar ez dira sekulan aldatu Konfederazio Helbetikoaren mugak. Frantziakoak aldiz mende bakoitzean hiru aldiz aldatu dira. XX garren mendean Alemaniarekikoa bi aldiz aldatu da, eta Argeriaren « galera » kontutan hartzen badugu hiru aldiz. Jakobinoari gustatzen ez zaion arren, Frantziako estatuan meperaturik eta gal zorian dauden hizkuntzak aldeztu behar ditugu, hau baita jakobinoek ulertu nahi ez duten etika arazo bat.