Le G7 est terminé et avec lui le contre- G7. L’organisation de ce dernier aura été l’occasion de travailler et discuter ensemble, de mieux se connaître, entre mouvements du Pays Basque et organisations progressistes de l’Etat français.
Le manifeste de clôture du contre-sommet, co-rédigé par la plateforme basque et la plateforme hexagonale, reflétait les convergences d’analyse et les enrichissements mutuels que cette coopération pouvait susciter : “Dans les années 1990, les institutions internationales et le G7 avaient promis que la mondialisation néolibérale allait permettre le triomphe de la “démocratie de marché, le développement des pays et la réduction des inégalités. Toutes ces promesses se sont fracassées sur les crises majeures du système, la montée de l’autoritarisme sur tous les continents et l’explosion des inégalités et de la précarité, qui touche en priorité les femmes. Et il n’est resté qu’une vérité crue : ce système a la prétention de transformer toutes les réalités du monde, qu’elles soient humaines ou naturelles, en marchandises à la merci de marchés financiers avides de profits ; d’offrir aux multinationales un marché-monde pour leurs produits uniformisés ; et de proposer comme seules aspirations et rêves aux populations du monde entier une consommation sans limite de ces marchandises. Tout cela en multipliant leurs profits au détriment de travailleur.se.s eux-aussi réduit.e.s en marchandise jetable et précarisée. (…) Avec ce contre-G7 nous voulons démontrer qu’il est possible de résister au système capitaliste qui scie la branche sur laquelle l’Humanité est assise. (…) Ici au Pays Basque, comme dans beaucoup d’autres endroits du monde, se construisent des relations différentes, d’autres systèmes fondés sur la coopération, les circuits courts, des relations entre humains et nature respectueuses et une démocratie réelle. (…) Nos alternatives construisent des territoires plus solidaires, plus résilients face aux crises majeures et à l’effondrement à venir, et mieux armés contre la marchandisation de nos sociétés et de nos vies, la délocalisation et la mise en compétition des peuples et des individus, la destruction de la nature et des cultures populaires. (…) Ceci implique de reconnaître le droit à l’expérimentation et à l’autodétermination sur les terrains politiques, économiques, alimentaires, énergétiques et culturels(…)”.
Aucun incident
Dans l’ensemble, le contre-sommet organisé à Hendaye et Irun s’est bien passé. Aucun incident d’ampleur n’a été à déplorer dans ces deux villes qui l’accueillaient, ce qui aurait immédiatement justifié le fait qu’il ait été interdit à Bayonne et l’occupation quasi-militaire du B.A.B. La grande manifestation du samedi 24 août a été joyeuse et colorée et entièrement pacifique. La résonance médiatique du contre-sommet a été particulièrement forte, permettant aux messages alternatifs d’atteindre l’opinion publique, tout au long de la semaine.
De nombreuses actions non-violentes ont eu lieu en parallèle du contre- sommet. L’action contre un Mac Do à Hendaye, le décrochage d’un portrait Macron à la mairie d’Irissary, le blocage de l’usine Monsanto à Peyrehorade, la marche des portraits à Bayonne, etc. Globalement les médias n’avaient que peu d’images d’affrontements à diffuser et ont donc dû privilégier les messages, critiques et propositions des organisateurs.
Ici au Pays Basque, comme dans beaucoup d’autres endroits du monde, se construisent des relations différentes, d’autres systèmes fondés sur la coopération, les circuits courts, des relations entre humains et nature respectueuses et une démocratie réelle. Dans l’ensemble, le contre-sommet organisé à Hendaye et Irun s’est bien passé.
À part le samedi après-midi à Bayonne, très peu d’images de violences sont venues justifier l’incroyable état de siège imposé à la Côte basque pendant une semaine entière.(*)
Un bilan en demi-teinte
Malgré tous ces points positifs, le bilan du contre sommet est en demi-teinte. Au delà même des grandes décisions stratégiques (Fallait-il organiser un contre sommet ? Fallait-il accepter l’interdiction de ne pas le faire sur Bayonne et du coup le tenir sur Hendaye et Irun ? N’y avait-il pas des formules moins “rituelles” et plus originales, plus perturbantes pour le G7 à inventer ?) la composition, le rôle et le fonctionnement de la plateforme organisatrice, la conception et la gestion du campement ont suscité maintes tensions et frictions entre les anti- G7, notamment au sein de la plateforme d’Iparralde. En fait, un certain nombre de débats existant depuis pas mal d’années en France, et que Bizi connaissait bien pour avoir dû s’y frotter via Alternatiba et ANV-COP21 depuis 2014 déjà, se sont largement invités en Pays Basque ces derniers mois : sur les modes d’action, la complémentarité violence/ non-violence, la “convergence des luttes”, les alliances, le fonctionnement et la gestion des collectifs, plateformes et des événements, les cortèges de têtes, le rapport aux organisations, et à l’organisation tout court, la conception même de la démocratie et de la pluralité.
Un certain nombre de dérives, néo-staliniennes sous des apparences anars ou “radicales”, ont connu un essor important dans le mouvement social et écologiste français, paralysant un certain nombre de fonctionnements militants, imposant par la crainte et la politique du fait accompli des décisions tactiques ou stratégiques décidées par des minorités peu transparentes, et affaiblissant, marginalisant ou permettant de criminaliser un certain nombre de dynamiques massives porteuses d’espoir.
Si on ne veut pas commettre les mêmes erreurs en Pays Basque dans les années à venir, il faudra prendre le temps de tirer un bilan, le plus politique et dépassionné possible, de l’organisation de ce contre-sommet. (On peut d’ores et déjà lire l’analyse d’Alternatiba publiée dans Mediapart et qui remet pas mal de pendules à l’heure : “Quelles leçons tirer du contre G7 ?” et celle de Bizi! “Contre-G7 : une cure de désintox ?” ).
(*) En effet, comme le disait une pétition citoyenne, le président Macron n’a pas hésité à prendre en otage une population entière, à la traiter comme une variable d’ajustement, pour offrir un cadre balnéaire à une réunion de 3 jours de 7 dirigeants publics, payés avec l’argent public. Zones entières interdites, plages et gares fermées, routes et boulevards interdits à la circulation, marchés paysans et événements divers annulés, commerces invités à fermer, personnels de soin ne sachant pas comment accéder à leurs patients et des milliers de problèmes empoisonnant la vie quotidienne des gens ont marqué les esprits.