Les enjeux des élections municipales bayonnaises sont plus nombreux qu’ils n’y paraît. Une victoire de la liste Etcheto pourrait bien faire ressortir du placard un dossier sensible en Pays Basque et que l’on pensait définitivement enterré.
« La LGV se fera » : Alain Rousset y croit dur comme fer, et sa promesse a fait récemment, en septembre 2019, la Une de la Semaine du Pays Basque. En privé, il ne cache pas ses raisons d’espérer toujours et encore. A la faveur d’un grand plan de relance européen, ou de relais locaux plus convaincus, le puissant président de la Nouvelle Aquitaine ne compte pas laisser passer la moindre opportunité. Les plans de relance visant à répondre à la crise du Covid-19 et les élections municipales bayonnaises lui offriront-elles enfin l’occasion de relancer le dossier ?
Un des deux candidats en lice au second tour est en effet un partisan déclaré d’une voie nouvelle LGV. Henri Etcheto est connu pour ses positions productivistes et pro-automobilistes en général. C’était également la seule tête de liste à se positionner clairement et fermement pour la LGV aux élections municipales de 2014, en répondant sans ambiguïté au questionnaire du CADE (Collectif des associations de défense de l’environnement): « C’est pourquoi, dans le projet municipal que je porte, nous plaçons la construction du pôle multimodal de la gare de Bayonne au cœur de nos priorités, afin de préparer d’ores et déjà l’arrivée de la LGV SEA à l’horizon 2017 et d’anticiper les futures évolutions du projet à grande vitesse« .
« On ne travaille pas à court terme »
Mathieu Bergé, dont la liste a fusionné avec celle d’Henri Etcheto, est exactement sur les mêmes positions. Bénéficiant de la confiance d’Alain Rousset, il n’a lui non plus jamais renoncé à l’espoir de voir la voie nouvelle LGV traverser Bayonne et la Côte basque. En 2018, suite au rapport Duron qui semblait signer l’abandon de ce projet, il se refusait à croire, dans les colonnes de Mediabask, que la bataille soit terminée: «Reste à trouver d’ici-là les modalités de financement. On ne travaille pas à court terme. Je pense qu’il faut continuer à préserver ».
L’opposition populaire à ce projet destructeur a toujours été forte en Pays Basque et ses arguments nombreux. Notre étroite bande côtière fortement urbanisée est déjà tronçonnée par la «Nationale 10», l’autoroute et le chemin de fer. Demain, ses équilibres écologiques seront bouleversés par un nouveau tracé dont le fuseau nécessaire au passage des TGV sera extraordinairement large et dévoreur d’espaces. L’arrivée de cette ligne aura des conséquences inacceptables sur le renchérissement du foncier agricole ou constructible; avec pour résultat une augmentation des prix des loyers dans un Pays Basque nord déjà inaccessible au logement pour beaucoup de ses propres enfants.
Pourtant, en coulisses, ses partisans n’ont jamais désarmé. Henri Etcheto et Mathieu Bergé parviendront-ils à diriger la mairie de Bayonne, à la faveur du scrutin du 28 juin, et à réactiver ainsi ce dossier, contrairement à l’attitude de l’actuel maire au cours des six dernières années ? Celui-ci, partisan de l’aménagement des lignes ferroviaires existantes, avait dénoncé la convention passée par ses prédécesseurs à la communauté d’Agglomération Côte Basque Adour : il ira même jusqu’à se pourvoir en appel et en cassation pour défendre son refus de payer une partie des 27 millions d’euros qui avaient été actés par l’ex-ACBA pour financer le tronçon Tours-Bordeaux de la LGV !
Repartir à la bataille ?
Jean-René Etchegaray avait reçu le CADE après les élections municipales de 2014 qui l’avaient élu maire, il s’était montré attentif à ses arguments. En 2017, lors d’un conseil communautaire de la CAPB, Jean-René Etchegaray avait répondu à un élu d’Urrugne qu’il était d’ailleurs prêt à ouvrir le débat sur ce financement : «L’ex-Acba avait accepté de financer des études et des travaux sur la ligne Tours-Bordeaux. A l’époque, elle considérait que cela nous ferait gagner du temps. Depuis le bien-fondé de cette convention peut être discuté sérieusement. Consigner 4,6 millions d’euros ne signifie pas l’acceptation d’une dette et ne vaut pas accord en vue d’une LGV au Pays basque. »
Alain Rousset vient de révéler qu’il a voté Macron au premier tour des dernières présidentielles. Il est aujourd’hui le coach de Mathieu Bergé et d’Henri Etcheto. Le trio va-t-il demain ré-ouvrir le dossier de construction de la ligne TGV qui balafrera le Labourd ?