La journaliste Sylvie Garat signe un nouveau film, « GAL : au nom de la raison d’Etat ». En avant-première, l’auteure le présente le 20 mars, au cinéma Le Select à Donibane Lohizune.
Comment révéler clairement au grand public et en moins d’une heure l’action du GAL, ses acteurs, ses commanditaires, ses objectifs, ses drames, ses conséquences politiques et juridiques ? Sylvie Garat réussit ce tour de force. Il est vrai que la réalisatrice originaire de Zuraide et travaillant à FR3 Méditerranée, n’en est pas à son coup d’essai. Elle a déjà sorti en 2014 un film sur IK, «Génération autonomistes basques» et collabora auparavant avec le cinéaste Arthur MacCaig.
Pour relever le défi, Sylvie Garat est parvenu à interviewer un grand nombre d’acteurs et de témoins de cette affaire : victimes, militants abertzale, hommes politiques et hauts fonctionnaires français, hommes de main et magistrats des deux côtés des Pyrénées. Les commanditaires espagnols comme les policiers français au rôle actif ou pour le moins trouble, brillent évidemment par leur absence. Pas de mea culpa bien sûr, mais peu de langue de bois ou de propos auto-justificatifs, ce qui aurait pu être un des écueils du film. L’essentiel est dit et cela donne un documentaire pédagogique qui, tout en restant limpide, montre la complexité du dossier, dans ses ramifications et la logique d’action qui anime ses instigateurs, au moment où les socialistes sont aux commandes à Madrid comme à Paris.
Autre qualité du travail de Sylvie Garat : la valeur des témoignages de plusieurs acteurs qui placent le spectateur au cœur de l’action et du climat de ces années, en lui restituant toute son épaisseur humaine et sa dimension dramatique. Nous sommes loin de l’histoire écrite par les vainqueurs. L’usage des codes formels ou narratifs similaires aux films noirs et aux thrillers donnent à cette œuvre une remarquable cohérence.
Se souvenir et comprendre
On pourra regretter, comme souvent à propos du GAL, le « saucissonnage » du sujet : rien n’est dit sur les escadrons de la mort qui, depuis 1975, commirent en Iparralde plus d’attentats que le GAL, suite rationalisée à partir de 1983 d’une pratique bien antérieure. Silence sur l’activité d’IK à cette époque, qui pour l’opinion publique, ajouta beaucoup de confusion et d’incompréhension sur ce qui se passait en Iparralde. Rien sur la mise en œuvre par les services espagnols du plan ZEN qui organisa les moyens politiques, militaires, judiciaires, diplomatiques, médiatiques et économiques pour venir à bout de la « question basque ».
Mais il serait très injuste d’insister sur ces critiques, tant est grande la qualité du documentaire de Sylvie Garat. Elle a réalisé une œuvre de référence qui restera pour que les générations d’aujourd’hui et de demain se souviennent et comprennent une page importante de l’histoire de notre pays marqué par une guerre sale, encombrante, reléguée en marge des récits officiels. Elle vient contredire l’amnésie qui entoure ces années et s’oppose à la déclaration du chef d’état-major de la Guardia civil, José Antonio Sáenz de Santa María: «Dans la lutte antiterroriste, il y a des choses que l’on ne doit pas faire. Si on les fait, il ne faut pas le dire. Si ça se dit, il faut tout nier».
+ Sylvie Garat, GAL : au nom de la raison d’État, documentaire de 52 mn, France télévisions, sera présenté à 20 h, le 20 mars, au cinéma Le Select, 29 Boulevard Victor Hugo, à Donibane Lohizune.
Est-ce que ce documentaire sera présenté à Bayonne?