L’ambiance générale des élections municipales a été marquée par le débat politique global à l’échelle de l’Etat français. Et Iparralde n’échappe pas totalement à cette règle : les électeurs ne se prononcent pas seulement au regard des thématiques municipales, mais aussi en fonction de ce qu’ils entendent à la télé ou à la radio. A cet égard, un fait marquant me semble caractériser le débat politique national en France : le virage à droite assumé par le Président Hollande avec son pacte de responsabilité. La mesure phare du pacte de responsabilité consiste à supprimer les cotisations sociales patronales destinées à financer la branche famille de la cotisation sociale. Le patronat applaudit des deux mains au cadeau de près de 30 milliards d’euros qui lui ait fait. La question est de savoir comment va être financée cette baisse des cotisations sociales. Pas question d’augmenter la fiscalité, donc la contrepartie sera une nouvelle baisse des dépenses publiques.
Virage à droite
Pourquoi doit-on parler d’un virage à droite ? Parce qu’Hollande assume aujourd’hui pleinement une politique économique libérale qui sert les intérêts du patronat au détriment des catégories populaires. Par ailleurs, la validité de cette politique libérale est remise en cause par des économistes de renommée internationale comme Paul Krugman, (prix Nobel d’économie) qui, dans une chronique au New York Times, a reproché à Hollande de faire explicitement référence à la fameuse loi des débouchés de l’économiste libéral Jean-Baptiste Say (1767-1832) selon laquelle “l’offre crée sa propre demande”. En baissant les cotisations sociales on cherche à améliorer le profit des entreprises pour les inciter à investir.
Or, J. M. Keynes a montré dès les années 30 l’ineptie de la loi de Jean Baptiste Say. Jamais aucune entreprise n’a investi, ni embauché si la demande vis-à-vis de ses produits n’était pas au rendez-vous. En économie, la référence “politiquement correcte”
de la social-démocratie a toujours été J. M. Keynes et surtout pas J.B. Say ! D’un point de vue historique, Hollande assume donc de façon “officielle” un virage idéologique hallucinant…
De plus, vis-à-vis des résultats pratiques, le pacte de responsabilité implique une baisse supplémentaire des dépenses publiques et donc une aggravation de l’austérité qui va affaiblir encore plus la demande et porter préjudice au final à l’activité productive.
Taper sur les dépenses des collectivités locales
Quel est donc le lien avec la gestion municipale ? Le lien réside dans le fait qu’après les coupes budgétaires réalisées au niveau de l’Etat, ce sont les collectivités territoriales locales qui vont être une des cibles principales des réductions des dépenses publiques à venir. En effet, le discours ambiant consiste à souligner l’augmentation “vertigineuse” des budgets de ses dernières depuis dix ans. Taper sur les dépenses des collectivités locales, cela signifie très concrètement, au niveau communal et intercommunal, diminuer les crédits pour les écoles, pour les crèches, pour les transports publics, pour la politique du logement, etc.
Cela suppose donc de trancher dans le vif de services sociaux dont nous bénéficions tous au quotidien. Cela implique aussi des conséquences en matière d’aménagement du territoire, car les communes rurales seront évidemment les premières à pâtir d’une accélération du démantèlement des services publics de proximité.
Pour finir, il faut souligner également les conséquences sur le long terme. Car ce que le discours dominant oublie de dire, c’est que malgré un niveau d’endettement très raisonnable (entre 6 et 7% du PIB en France), les collectivités territoriales assurent 70% de l’investissement public dans l’Etat français. Ainsi, si l’on prend la thématique de la transition écologique mise en avant en Iparralde par le collectif Bizi!, il est évident qu’elle se joue en bonne partie sur la capacité des collectivités locales à entreprendre des dépenses d’investissement ambitieuses. Je suis convaincu qu’une grande majorité des militants de gauche sincères n’assument pas le virage libéral d’Hollande. Et en tout état de cause, les abertzale n’ont pas de leçons à recevoir de la part de certains sur le fait de savoir qui est véritablement de gauche ou de droite.