C’est la question que je me pose souvent. Suite à la création d’une Zone d’Aménagement Différé (ZAD) sur une superficie de 12 ha par le conseil municipal d’Irissarry, mon village a été scindé en deux. Avec d’un côté les soutiens au maire, persuadés qu’il fallait zader ces terres agricoles afin de penser à loger nos futures générations ; et d’un autre, des villageois inquiets des conséquences d’un tel zonage sur l’activité agricole, mais aussi de voir qu’on allait encore artificialiser de la terre nourricière, sans créer un débat alternatif.
Ces derniers allaient créer le collectif Irisarrizain qui, à ma grande surprise, réunit plus de consommateurs que d’agriculteurs. Mon sentiment était double: une grosse satisfaction de voir une partie de la société civile alertée sur le devenir de l’agriculture au village, mais aussi une inquiétude de voir un nombre important de personnes qui ne se sentaient pas concernées par les problématiques de ma profession.
D’où une question que tout le monde devrait se poser: à quoi sert un agriculteur ? Un agriculteur a certes la fonction de produire, mais n’oublions pas qu’il est là aussi pour nourrir les gens. Et si on donne de l’importance à ce dernier point, la réalité revient à nous et nous interroge : que fait-on pour arrêter la disparition des fermiers autour de nous ? Le plus inquiétant d’ailleurs, est que même certains de mes collègues paysans oublient que leurs produits (lait, viande…), en quittant leur ferme, continuent d’exister en étant transformés, puis consommés. Ces paysans, la tête dans le guidon, sont débordés à tel point qu’ils ne se posent plus la question de qui va manger le fruit de leur travail.
Quel consommateur est à la fin de la chaîne ? Et que veut-il manger? Le lien est trop souvent rompu et il n’existe pas de connexion d’un bout à l’autre.
La politique agricole est, pour beaucoup, responsable de cela, aidée par la FNSEA qui depuis des décennies demande de produire toujours plus afin de conquérir des marchés, sur fond de compétitivité. Cela a trop souvent eu l’effet délétère de développer des fermes dépendantes aux antibiotiques, pesticides ou autres produits chimiques. Récemment encore, lors d’une réunion de l’interprofession ovine 64, j’entendais un syndicaliste de la FNSEA clamer haut et fort que cela ne le dérangerait pas de nourrir ses brebis avec des OGM pour produire son lait Ossau-Iraty. Heureusement, les médias n’étaient pas présents: il suffit de peu pour casser l’image d’une filière qui fait ses preuves au niveau qualitatif.
Lors d’une réunion de l’interprofession ovine 64,
j’entendais un syndicaliste de la FNSEA
clamer que cela ne le dérangerait pas
de nourrir ses brebis avec des OGM
pour produire son lait Ossau-Iraty.
Bien sûr, le consommateur a aussi sa part de responsabilité dans le sens où ses actes d’achat ne correspondent pas toujours à ses attentes. Le pouvoir d’achat est toujours en baisse, ou alors on se crée de nouveaux besoins: alors c’est le caddie qui se sacrifie et se remplit avec des aliments à prix cassés.
Et on ne se pose pas la question de la différence entre un poulet à 2€ le kg et celui à 8€. Alors que si, par exemple, on pouvait visionner une vidéo de la période d’élevage, on ne toucherait pas au produit le moins cher.
Récemment, la mairie d’Irissarry réunissait les parents d’élèves de notre école pour faire part d’un projet pour la cantine afin de nourrir nos enfants avec des aliments provenant de chez les producteurs du coin. Ces repas coûteraient plus cher aux parents, mais la collectivité s’engageant à absorber une bonne partie du surcoût, le projet était adopté à l’unanimité.
Heureusement le Pays Basque est une terre riche en visionnaires qui, depuis des décennies, construisent des alternatives afin de sensibiliser la population sur la nécessité de recréer le lien entre le producteur et le consommateur.
Les AMAP, magasins de producteurs et autres initiatives fleurissent!
Les signes officiels de qualité inondent le territoire, notamment en AOP de fromage, piment, vin ou porc et ouvrent la voie à d’autres productions qui bientôt feront de même.
Cette prise de conscience devient virale et l’actualité économique nous rappelle qu’il nous faudra toujours plus localiser nos approvisionnements alimentaires. Il y a tout ce qu’il faut ici!
Continuons à réfléchir pour des fermes nombreuses, à taille humaine, afin de garantir la qualité, le tout au service de notre santé et celle de notre environnement. Des paysans nombreux font la vitalité de nos milieux ruraux et entretiennent nos jolis paysages.
Tout ceci apparait d’intérêt général! Alors oui, les enjeux de l’agriculture, ça ne concerne pas seulement les agriculteurs, mais bien tout le monde ! Qu’on se le dise.
hori Patrick ! egiak bere bidea behar du .
Lekuko ekoizlek eskaintzen dauzkitzue ainitz . Segi :