Dans son livre publié en mars dernier, « La France face au génocide des Tutsi », l’historien Vincent Duclert revient notamment sur l’intervention du 1er RPIMa de Bayonne, fer de lance du soutien militaire français au régime hutu.
Il y a un peu plus de trente ans, d’avril à juillet 1994, au Rwanda, 900 000 Tutsis ont été massacrés à la machette par des Hutus. C’est le dernier génocide du XXème siècle. Face à ce drame, nous avons un devoir de mémoire particulier en Pays Basque, à double titre. En premier lieu, c’est à Biarritz que s’est déroulé cette année-là (les 7 et 8 novembre), le sommet France-Afrique. Adélaïde Mukantabana[ 1], rescapée du génocide, était elle aussi à Biarritz, parmi les manifestants qui dénonçaient les responsabilités de la France. En second lieu, le 1er RPIMa de Bayonne a été le fer de lance du soutien militaire français au régime hutu. Pour rappel, le 1er RPIMa est un régiment d’élite des forces spéciales, dont d’anciens chefs de corps se targuent d’être des spécialistes des techniques de la contre-insurrection[ 2], techniques forgées durant la guerre d’Algérie.
Dans un ouvrage publié cette année[3], l’historien Vincent Duclert, qui a présidé la commission d’enquête sur le rôle de la France au Rwanda mise en place par E. Macron en 2019, apporte un nouvel éclairage sur les responsabilités de Paris. Le 27 mai 2021, le président français avait reconnu à Kigali une « responsabilité accablante » des autorités françaises dans le génocide. Le 5 avril dernier, il affirmait que Paris « aurait pu arrêter » le génocide, mais « n’en a pas eu la volonté ». Pour autant, V. Duclert évoque dans son ouvrage le «rapport Muse» mandaté par le président rwandais P. Kagamé qui concluait quant à lui que « la France a rendu possible un génocide prévisible ».
« Selon Vincent Duclert,
l’’opération spéciale’ déclenchée à partir de 1990 au Rwanda,
et exécutée principalement par le 1er RPIMa,
a conduit à ‘recycler dans le conflit rwandais
des méthodes utilisées durant la guerre d’Algérie’. »
V. Duclert nous décrit aussi les modalités d’intervention du 1er RPIMa au Rwanda. Dès 1990, un de ses officiers, le lieutenant- colonel G. Canovas est positionné comme conseiller auprès du chef d’état-major des Forces armées rwandaises (FAR). A partir de cette date, vont s’échelonner sur trois ans des missions du 1er RPIMa visant à l’assistance et à l’instruction des militaires hutus.
Les militaires du 1er RPIMa ne pouvaient pas ne pas être au courant
Selon Vincent Duclert, l’ »opération spéciale » déclenchée à partir de 1990 au Rwanda, et exécutée principalement par le 1er RPIMa, a conduit, en lien direct avec la présidence de F. Mitterrand, à « recycler dans le conflit rwandais des méthodes utilisées durant la guerre d’Algérie ». Par ailleurs, la Fédération Internationale des droits de l’homme avait, un an avant (en janvier 1993), dénoncé publiquement les prémices d’un génocide à l’encontre des tutsis [4]. Ce génocide était donc effectivement prévisible. Et les militaires du 1er RPIMa ne pouvaient pas ne pas être au courant… Et pourtant, en février 1993, une nouvelle opération dite « Chimère » sera menée par le 1er RPIMa. Elle consistera, d’après le général D. Tauzin qui la dirige, à « prendre le commandement indirect des FAR ». A cette occasion, D. Tauzin fera la connaissance de A. Bizimungu, un officier des FAR pour lequel il a « toujours considéré comme un honneur de l’avoir connu et combattu à ses côtés ». Or, il faut savoir que A. Bizimungu sera condamné en 2011 par le Tribunal pénal international pour le Rwanda à trente ans de prison pour crime de génocide… Mais que reprocher au 1er RPIMa ? Car c’est bien connu, les militaires ne font qu’obéir aux ordres… Pourtant, un militaire de haut rang dira non. Il s’agit du général J. Varret [5], qui démissionnera de l’armée française en 1993 après avoir informé sa hiérarchie des préparatifs du génocide au Rwanda. Face à ce double devoir de mémoire, et dans un contexte où, entre autres, la guerre à Gaza nous confronte à l’insupportable, en Pays Basque comme ailleurs, en tant que citoyen·nes du monde, refusons de fermer les yeux sur l’inavouable [6].
[1] Voir : A. Mukantabana, L’innommable, Agahomamunwa, un récit du génocide des Tutsi, éd. L’Harmattan, 2016.
[2] D. Tauzin, explique par exemple comment il a participé en Angola à la formation d’officiers de l’UNITA pour faire face à la guérilla du MPLA. Voir : D. Tauzin, Rwanda : je demande justice pour la France et ses soldats, éd. Jacob- Duvernet, 2011.
[3] Voir : V. Duclert, La France face au génocide des Tutsi, éd. Tallandier, 2024.
[4] Voir l’interview édifiante de J. Carbonare au journal télévisé de France 2 le 28 janvier 1993 : https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/ cab93005500/plateau-jean-carbonare
[5] Voir : Général J. Varret, Souviens-toi. Mémoires à l’usage des générations futures, éd. Les Arènes, 2023.
[6] Voir : P. de Saint-Exupéry, L’inavouable. La France au Rwanda, éd. Les Arènes, 2004.
Le génocide rwandais n’est pas le dernier du XXe siècle. Quelques années plus tard,le régime tutshi a envahi la RD Congo voisine, massacrant des civils jusqu’à ces jours. Parler du Rwanda,sans parler du génocide congolais c’est tordre l’histoire et cracher sur la mémoire des victimes congolaises
Parler du génocide commis contre les Tutsi. Ignorer d’autres inventions comme le génocide du Congo ou le génocide commis contre les hutu, ces dits génocides n’ont jamais été reconnus. Ce sont de pures inventions. Seul le génocide commis contre les Tutsi du Rwanda a été reconnu par les instances habilitées.
Cet article est uniquement à charge , les négociations d’Arusha ne sont pas évoquées alors qu’elles étaient une part importante de l’implication française et internationale. La France soutenait d’une main l’ancien régime et essayait de l’autre de favoriser des négociations, lesquelles ont été conclues en août par un partage de pouvoir. Jusque là le genocide n’était pas inéluctable même si les extrémistes ne digéraient pas cet accord. Mais l’assassinat du président Hutu burundais par l’armée tutsie burundaise, en octobre 93, puis l’assassinat du président Hutu rwandais ont ouvert la porte aux extrémistes qui ont perpétré le genocide …
Les négociations d’Arusha ne sont pas évoquées dans cet article alors qu’elles étaient une part importante de l’implication française et internationale. La France soutenait d’une main l’ancien régime et essayait de l’autre de favoriser des négociations, lesquelles ont été conclues en août par un projet de partage de pouvoir. Jusque là le genocide n’était pas inéluctable même si les extrémistes ne digéraient pas cet accord. Mais l’assassinat du président Hutu burundais par l’armée tutsie burundaise, en octobre 93, puis l’assassinat du président Hutu rwandais ont ouvert la porte aux extrémistes qui ont perpétré le genocide …