Réponse à Patxi Bergara suite à l’article «Finançons nos ikastola !» (www.enbata.info/articles/financons-nos-ikastola)
Bai Milesker, goxo baita iniziatiba baikorrak etortzen direlarik holako sartze koropilatsuetan.
Tu l’as bien noté, en effet on a beaucoup parlé de Seaska à cette rentrée, et les élections approchant l’instrumentalisation de la question va encore aller grandissante… Seaska joue un rôle stratégique dans l’enseignement et la survie de l’euskara, tous vont donc aller de leurs petites phrases, les ennemis d’hier sont nos amis aujourd’hui, il faut s’en féliciter, c’est ce que l’on a toujours voulu ! Convaincre ! J’avoue que j’ai un peu en travers le fait que certains se sentent obligés de tout monter en épingle, mais ça aussi c’est le jeu, chacun son boulot… Et nous on ramasse les pots cassés… on ouvre quand même des ikastola.
Et on est condamné à ouvrir de ikastola parce que tu l’as dit aussi, «l’euskara est le cadet des soucis des gouvernants». Personnellement en ce moment j’ai plus l’impression que certains voudraient bien achever la bête blessée… Le vote du rapport Alfonsi au parlement européen est édifiant, de Mélenchon à Le Pen père et fille en passant par de Villiers, les parlementaires français représentent à eux seul la moitiés des votes contres !1. On pourrait donc croire que les politiciens français qui sont contre s’en battent des langues régionales, mais non, ils en sont encore à se battre contre ! Par contre l’aspect positif de ce vote c’est qu’une majorité des parlementaires européens français ont voté pour le texte et sont pour la ratification de la charte des langues minoritaires et régionales ! Ils sont pour une politique ambitieuse en faveur de nos langues, quoiqu’en disent François Hollande !
Alors qu’est-ce qu’il nous reste ? Ce que Seaska à toujours fait ! Prendre les choses en mains… Et ta proposition va évidement dans ce sens ! (Sauf que là ce sera mieux perçu… pour une fois c’est pas Seaska qui mendie…)
Pour autant ce serait faire injure au génération précédente de croire que cela n’a jamais été fait… Et les piqures de rappel sont un mal nécessaire… Et chaque année Herri Urrats est aussi là pour nous rappeler que Seaska n’attend pas que les pouvoirs publics s’y mettent !
Mais là se posent deux questions ? Peut-on faire sans les pouvoirs publics ? Doit-on faire sans les pouvoirs publics ?
Aux deux questions je réponds non et j’explique. Ikastolen Egoitzak, la structure de Seaska qui s’occupe des questions de bâtis pour nos enfants gère des équipements à géométrie variable au niveau du montage financier. Je ne vais pas faire le détail ici, mais du 100% Seaska au 100 % public, les 31 établissements se déclinent en 31 formules ! L’expertise d’Egoitzak nous a prouvé que nous réussissons à abriter nos élèves à moindre coût que l’école publique (ne comparons surtout pas le coût de Xalbador avec le collège public d’Hiriburu, ce serait indécent.) A Seaska le coût d’hébergement d’un nouvel élève coûte environ 10 000 € (pour presque le double au public). Le calcul est simple : pour faire une ikastola de 100 élèves, il faut 1 M d’€. A la rentrée de cette année nous avons 150 élèves de plus dans le primaire, et l’augmentation des effectifs en collèges nous obligent à les agrandir également soit 50 élèves de plus qui représentent 2 millions d’€ d’investissement nécessaires… Bien sûr la capacité d’accueil maximum n’est pas atteinte partout… Mais c’est mécanique ! L’enfant qui rentre aujourd’hui va générer un besoin en investissement dans les 5 ans de toute façon !
Alors peut-on faire sans les pouvoirs publics ? Non ! Surtout maintenant que les aides du Pays Basque sud n’arrivent plus ! On investit moins dans le primaire ces dernières années… Ou à crédit, et on va prendre un retour de manivelle douloureux dans quelques mois si ça continue… Le collège Xalbador de Kanbo a pu enfin être agrandi après des années d’attente et de précarité pour nos jeunes ! Le lycée professionnel est en route et le lycée général suivra… Mais pour les primaires on ne peut pas faire l’économie des subventions municipales et des montages publics, n’en déplaise au corps préfectoral et au Ministère de l’Intérieur !
Et cela m’amène à la deuxième réponse. Doit-on faire sans les pouvoirs publics ? Pourquoi ? Est-il normal de payer Xalbador avec l’argent des contribuables du Gipuzkoa ? Est-il normal que les parents d’ikastola payent 2 fois pour l’école ? Une fois pour l’école publique qu’ils financent comme tout le monde par l’impôt et une autre pour l’ikastola ? Les parents d’ikastola ne sont-il pas des contribuables comme les autres ? A Seaska aussi nous pensons que oui, même si nous nous battons contre l’uniformité que la république essaie de nous vendre à la place de l’égalité ! Car il s’agit bien de cela : d’égalité !
J’entends d’ici les Mélenchonistes et autres Le Penistes me dire que nous avons choisis de les mettre à l’ikastola… Certes car sinon nos enfants n’auraient pas été bascophones ! Mais avons nous vraiment le choix ? Seule Seaska propose l’immersion, la seule pédagogie vraiment efficace sans l’aide d’une transmission familiale partielle ou totale. Nous aurions eu le choix si le service public proposait des établissements en immersion… Mais on ce n’est pas pour tout de suite ! Vu la difficulté qu’il y a à ouvrir de simples classes bilingues à parité horaire ! L’éducation est une compétence régalienne en France, et l’acte III de la décentralisation permet de centraliser un peu plus l’Etat le plus centralisé d’Europe. Alors non l’immersion dans le public c’est pas pour tout de suite… Cette France qui donne des leçons de démocratie, de pluralité linguistique, de droit de l’homme au monde entier et qui bafoue son propre patrimoine… Cette France dernier rempart réactionnaire en Europe sur ces questions comme on l’a vu plus haut…
Alors Milesker Patxi ton initiative va dans le bon sens (même si beaucoup d’anciens élèves sont déjà parents et donc dans le circuit cotisations-talo) et je te propose de former un petit groupe pour monter une structure que nous appelons tous de nos voeux depuis quelques années : des anciens élèves, des anciens parents, des anciens aitatxi amatxi d’élèves, des anciens bénévoles ne demandent que ça ! Certains seraient même prêt à mettre la main à la pâte… à talo évidement… Seaska a besoin de toutes les énergies, de toutes les bonnes volontés, l’euskara n’a pas les moyens de faire cette économie là !
Comme tu le dis : «On peut continuer à demander des changements «incertains» mais en parallèle nous devons régler le problème de financement des Ikastola de façon «certaine»».
Nous allons donc continuer à rendre certaines toutes les sources incertaines de financements publics et on va s’appuyer sur cette nouvelle génération, la tienne, pour trouver d’autres solutions ! Car nous sommes condamnés à inventer !
Beraz Milesker Patxi ! mais avec une proposition pareille, tu risque de te retrouver président de la nouvelle association des anciens de Seaska !
Paxkal INDO, Président de la fédération des écoles immersives en langue basque, Seaska
1 Vote au parlement : 13 contre sur 26 sont français et 645 pour ! 50 % de contres et 40% des abstentions émanent de parlementaires français!