Euskal Konfederazioa et les principales associations qui la composent(1) ont décidé le 10 décembre dernier de suspendre leur participation au Conseil consultatif de l’Office public de la langue basque(2). Directement liée à la signature du Contrat territorial du 7 novembre, cette décision vient après mûres réflexions car elle est tout sauf anodine ou purement symbolique.
La préparation du Contrat territorial a donnée lieu à de nombreuses réunions de travail sur chacun des chapitres et suivant une feuille de route ambitieuse basée sur un bilan critique de l’application du dernier contrat.
Pour la langue basque, les mouvements associatifs, acteurs historiques de l’action de revitalisation de l’euskara, se sont fortement mobilisés.
Diagnostic des 10 années de politique linguistique publique depuis la naissance de l’Office fin 2004 et prospective à l’horizon 2050 ont été travaillés.
La synthèse se résume ainsi : la politique linguistique a produit des effets positifs mesurables mais elle rencontre des limites et en l’absence d’une nouvelle impulsion, elle ne pourra dépasser un pourcentage de bascophones aux alentours de 20 % en 2041.
Face à ce constat le Conseil des élus, reprenant les propositions de la commission de travail définissait quatre objectifs stratégiques:
• Opérer une montée en puissance rapide de la transmission de la langue basque.
• Renforcer l’usage de la langue basque dans la vie sociale, économique et administrative.
• Mettre en place les ressources et les conditions nécessaires à la mise en oeuvre de la politique linguistique.
• Faire du Pays Basque un territoire expérimental de revitalisation linguistique.
Les associations ont constaté
le manque évident de volonté politique
pour “donner une nouvelle impulsion
à la politique linguistique”.
Dans ces conditions l’Office
ne peut que continuer à bricoler.
Conclure un nouveau pacte
Pour ce faire il proposait d’une part de conclure un nouveau Pacte, invitant chaque institution membre de l’OPLB à s’engager, pour une montée en puissance de la politique linguistique
et à mettre celle-ci en oeuvre dans ses domaines de compétence.
D’autre part il listait trois leviers stratégiques à actionner :
• Négocier une optimisation du cadre de coopération avec l’Éducation Nationale.
• Constituer un fonds commun pour la formation professionnelle à la langue basque en mobilisant l’ensemble des acteurs concernés : CNFPT, Région, OPCA, etc.
• Augmenter la capacité budgétaire de l’OPLB pour poursuivre le déploiement et la construction de la politique linguistique
A l’arrivée, hormis de belles déclarations, les institutions n’ont pas donné suite aux propositions avancées en rajoutant, pour faire passer la pilule, une clause de revoyure en 2017.
Les associations ont constaté le manque évident de volonté politique pour “donner une nouvelle impulsion à la politique linguistique”.
Dans ces conditions l’Office ne peut que continuer à “bricoler”, ce que refusent de cautionner les associations en participant normalement au Conseil consultatif. Elles ont cependant clairement réaffirmé par ailleurs le besoin d’un travail en commun institutions-mouvements populaires pour définir et mettre en place la politique linguistique ambitieuse nécessaire à la revitalisation de l’eukara et leur volonté d’y participer.
Période cruciale
La politique à mener est sur la table, fruit d’un travail approfondi et objet d’un large consensus. Si la compétence langue et culture est partagée par la loi NOTRe, son exercice peut se mener de diverses façons. La période qui s’ouvre est donc cruciale. En point de mire, évaluation et reconduction du GIP-OPLB en 2016 avec modification des statuts pour intégrer la future Communauté Pays Basque. Celle- ci devra être à la hauteur de la situation, en jouant un rôle de locomotive, en donnant l’exemple, en mobilisant les forces et les financements, bref en incarnant demain une volonté politique forte en faveur de la langue propre à son territoire.
1) AEK, Aldudarrak Bideo, Bertsularien Lagunak, Biga Bai, Euskal Haziak, Euskal irratiak, IKAS, Seaska, Uda Leku
2) Kontseilua a pris la même décision de son côté.
3) Sont notamment listées : limites du développement quantitatif et qualitatif des enseignements en langue basque ; place de la langue basque dans l’espace public très limitée, tout comme dans les medias publics et privés, son usage dans l’administration d’État toujours pas engagée, aucune convention avec les grands opérateurs publics ; faible développement de la formation à la langue basque, condition pour permettre l’apprentissage de la langue chez les adultes, politique d’apprentissage de la langue basque d’initiative personnelle à mieux structurer ; enfin, dimensionnement actuel du budget de l’OPLB ne permettant plus de poursuivre le déploiement et la construction de la politique linguistique.