Aux élections présidentielles successives, dès 1965 j’ai voté à gauche aux deux tours jusqu’à celles de 2017 où j’ai opté d’emblée pour le candidat Macron, le préférant pour son langage de facture girondine à ses trois principaux concurrents néo-jacobins. Depuis lors, il exerce un pouvoir vertical et solitaire, en fine pointe du centralisme français, conformément il est vrai au caractère monarchien de la Constitution actuelle, ce caractère étant aggravé par le quinquennat.
La contestation des gilets jaunes semble l’avoir converti au respect des corps intermédiaires : tant mieux, pourvu que çà se concrétise.
Pour tout le reste, je suivrai le sage conseil du regretté Marc Légasse : ne pas se mêler des affaires internes de la grande voisine, car ce serait intrusif et malpoli.
En politique je me limite donc à la défense et à la promotion de notre domaine local, pour lesquelles naquit expressément le mouvement abertzale, patriote en bon français.
Quant au global qui me tient à coeur, c’est le souci universel de la démocratie et de l’écologie qui ne saurait se confiner dans l’hexagone franco-français.
Où en est notre démocratie locale, basque et gasconne ?
Avec la Communauté d’agglomération Euskal Elkargoa héritée de la présidence Hollande, elle bénéficie enfin d’une reconnaissance officielle et d’un certain pouvoir qui ne demande qu’à se renforcer. Mais à quand la réactivation du projet de collectivité territoriale à statut particulier porté par l’ensemble Batera ?
L’avenir de la langue reste un souci majeur, et le voici remis en question par ce qui se passe à l’école publique de Hiriburu / Saint Pierre d’Irube. Un projet de classe expérimentale en immersion, d’abord accepté par le Ministère de l’Education, vient d’être refusé par celui-ci au mois de juillet 2020, au motif qu’il serait contraire à l’article 2 de la Constitution, “La langue de la République est le français” : l’enseignement doit se faire en français ! Cet article interdirait donc d’école les autres “langues de France” dites “langues régionales”, alors qu’elles ont déjà une place dans les établissements publics et les établissements privés —confessionnels ou laïques— sous contrat ? Et que l’immersion est le système en vigueur dans les écoles laïques mais privées gérées par des associations de parents d’élèves telles que Calendreta, Diwan, Seaska ?
Faut-t-il aussi tenir pour nul et non avenu cet autre article de la Constitution déclarant que “Les langues régionales font partie du patrimoine de la France” ?
Mine de rien, l’affaire de Hiriburu est grave pour l’avenir de nos langues “régionales”, et nous autres Basques, ne commettons surtout pas l’erreur de faire cavaliers seuls : le concours des Bretons entre autres peut être décisif pour faire entendre raison à ce gouvernement et à ceux qui le suivront.
Ce qui se passe
à l’école publique de Hiriburu
est très grave
pour l’avenir de nos langues
dites “régionales”
La partie ne sera pas facile car la mauvaise action présente du Ministère de l’Education est conforme aux propos péremptoires tenus en juin 2019 par la ministre de la cohésion des territoires devant le sénat et par celui de l’Education, M. Blanquer, contre l’enseignement “inconstitutionnel” et non pédagogique des langues “régionales” par immersion. Mais d’abord et surtout elle est fidèle à la déclaration restrictive faite par le Président Macron le 20 mars 2018 devant l’Institut de France prétendant que la France “ne vit qu’en français” et que les Français “n’ont que le français”.
Les personnes bilingues ne seraient donc pas françaises ? De nationalité alsacienne, antillaise, basque, bretonne, calédonienne, catalane, comorienne, corse, flamande, gasconne-occitane, guyanaise, polynésienne… nous sommes cependant citoyens de la République Française, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs que les Français monolingues si chers à M. Macron.
Toujours est-il que le propos négationniste du Président n’augurait rien de bon pour nos langues vernaculaires, et nous voyons à Hiriburu un effet négatif de sa vision réductrice.
Si le Président de la République persistait dans son rejet du bilinguisme interne, combien de militant(e)s et de sympathisant(e)s des mouvements linguistiques pourraient encore voter pour lui en 2022 ? Cela ferait tout de même un beau paquet de voix, vous ne pensez pas ? Il nous faudrait surtout une solide candidature écologiste entraînant un large éventail de forces progressistes : seule une victoire du courant écologiste permettrait l’avenir de la biodiversité, y compris dans la forêt linguistique qui résiste encore à l’agression néo-jacobine toujours à l’œuvre dans les détails.