L’occupation d’un terrain à Arbonne par ELB et Lurzaindia est l’ultime recours pour s’opposer au recul des terres agricoles soumis à la pression foncière et pour interpeller les pouvoirs publics sur des dispositifs légaux insuffisants. La préemption partielle a été rendue possible en 2014. Mais comme souvent elle ne donne pas à la Safer la possibilité de l’appliquer jusqu’au bout. Cette faille nécessite d’être réparée. L’occupation est en cours et une pétition en ligne.
L’occupation des terres de la propriété “Yves Borotra”, à Arbonne, a démarré le 23 juin 2021. Le syndicat agricole ELB a été informé officiellement par la Safer qu’un bien agricole comprenant une maison d’habitation en cours de rénovation, l’ancienne maison des fermiers, inhabitée aujourd’hui et des parcelles agricoles d’un peu plus de 15 hectares sur la commune d’Arbonne, était vendu pour la somme de 3,15 millions d’euros à une acheteuse retraitée, Diane de l’Espée, qui n’exerce pas d’activité agricole.
De ce fait, ELB et Lurzaindia considèrent que Diane de l’Espée n’a pas la légitimité pour acheter ces terres, d’autant plus qu’elle n’a pas de projet agricole alimentaire. Ces terres présentent un très fort potentiel agricole, avec peu de relief et une douzaine d’ha d’un seul tenant. On pourrait y installer plusieurs maraîchers, et ou arboriculteurs.
En tant que défenseurs de la terre nourricière, nous refusons en premier lieu l’accaparement de la terre par des non-paysans, qui lui font perdre sa vocation nourricière en les réduisant à une fonction “d’agrément”. De plus, nous dénonçons le prix spéculatif de ce domaine agricole, inabordable pour un paysan. La Safer a estimé ce bien (terres et bâtis) à 800.000 euros “au maximum” pour l’ensemble. Mais la Safer est dans l’incapacité d’exercer son droit de préemption pour réviser le prix à la baisse car la maison principale aurait “perdu sa vocation agricole”. Utilisant dès lors la seule alternative restante, Lurzaindia s’est portée candidate officiellement auprès de la Safer pour qu’elle exerce “son droit de préemption partielle”, c’est-à-dire uniquement sur la terre agricole, en renonçant au bâti principal. Diane de L’Espée, à travers la voix de son fils Jean de Mareuil, ne semblait pas prête à abandonner son projet d’achat total. Pourtant c’est en cédant ces terres à Lurzaindia et non en les accaparant, qu’elle peut les protéger !
Préemption partielle
Il est très important à nos yeux d’expliquer aussi que le droit de préemption partielle est néanmoins totalement défaillant ! En effet, la préemption partielle peut être refusée par l’acquéreur et le vendeur peut exiger de la Safer l’achat de la totalité du bien. Impasse donc, d’un point de vue réglementaire. La préemption partielle a été rendue possible en 2014 par la Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Mais comme souvent (en l’occurrence certainement en raison du lobbying exercé par les propriétaires terriens non-agriculteurs) elle ne donne pas à la Safer la possibilité de l’appliquer jusqu’au bout. Cette faille, que nous mettons en évidence aujourd’hui, nécessite d’être réparée et le soutien des parlementaires sera nécessaire.
La sénatrice Fréderique Espagnac, venue sur place dimanche 27 juin, nous a assuré d’ores et déjà de son appui pour avancer sur cette question réglementaire absolument essentielle. Dans l’attente de pouvoir agir réglementairement, le syndicat ELB et Lurzaindia, par cette action d’occupation de terres agricoles aux portes de Biarritz, avaient plusieurs objectifs : le premier à court terme est d’obtenir que l’acheteuse renonce à l’achat des terres et que le vendeur accepte la préemption partielle sur les terres afin de permettre à un projet agricole alimentaire de s’y implanter.
Au-delà de l’action d’occupation, la moitié des maires du Pays Basque apportent déjà leur soutien et plusieurs maires et conseillers municipaux, candidats aux élections départementales et régionales sont d’ailleurs passés sur le site de l’occupation témoigner de ce soutien.
Vendredi 25 juin, le président de la Communauté d’agglomération, Jean René Etchegaray, et sa vice présidente, Isabelle Pargade, sollicités pour agir à court terme sur cette affaire, sont venus également. Jean René Etchegaray a proposé de mener une médiation. Enfin, nous avons interpellé ces derniers afin qu’ils organisent une table ronde entre les acteurs qui agissent sur le foncier pour réfléchir à une stratégie rapide et efficace de sauvegarde de la terre agricole, ce qui a été promis.
Nous resterons évidemment vigilants pour qu’elle se concrétise. A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous ne connaissons pas l’issue à court et moyen terme de cette affaire, mais nous pensons fermement avoir posé un acte fort et que la mèche qui a été allumée ne s’éteindra pas…
ELB et LURZAINDIA occupent depuis ce mercredi 23 juin des terres agricoles au chemin de Berroeta à Arbonne. Ils dénoncent la multiplication de ventes de terres agricoles et d’anciennes habitations agricoles à des acheteur.e.s non-agricultureur-trice.s, à des prix spéculatifs.
Il y a besoin de volontaires pour occuper et camper là-bas le soir. Celles et ceux qui peuvent sont prié.e.s de signaler qu’ils peuvent passer une nuit là-bas au 07 81 59 65 77, cela permettra aux organisateurs de savoir s’il y a assez de manifestant.e.s pour la nuit.