Le débat sur la “gouvernance” future du Pays Basque Nord a fait un bon en avant que personne n’avait envisagé si rapide. Fruit du travail opiniâtre de certains, d’évolutions politiques récentes et de conjonctures inédites, résultat d’une lente mais puissante maturation. La synthèse des groupes de réflexion sur les politiques publiques et le rapport des juristes sur les évolutions institutionnelles possibles à court terme pointent clairement en direction de la création d’une «Collectivité territoriale à statut particulier» entité juridique constitutionnelle de droit français dont les caractéristiques sont sans ambiguïtés: assemblée élue au suffrage universel, compétences octroyées par la loi et fiscalité correspondante. L’avis du Conseil de développement du 5 avril voté à une très large majorité vient conforter cette option comme la meilleure des trois proposées au départ pour répondre au-jourd’hui aux défis du territoire basque au sein de l’Etat français. Reste le passage par la case du Conseil des élus dans les prochaines semaines. Une mobilisation des partisans de l’immobilisme est toujours possible mais un blocage de la dynamique engagée supposerait un hara-kiri pur et simple de la structure.
Ensuite aura lieu la dernière partie du débat entamé en novembre dernier avec plusieurs points au menu. Le mode d’organisation de cette Collectivité tout d’abord, ses organes délibérant et exécutif, les rapports entre eux ainsi que le mode d’élection des conseillers sur quelle(s) circonscription(s). La palette des compétences propres ainsi que celles qui pourraient lui être déléguées par d’autres niveaux institutionnels avec leurs financements adéquats constitueront le deuxième chapitre. L’insertion de cette Collectivité dans l’architecture institutionnelle existante sera le troisième débat: quid du département des Pyrénées-Atlantiques, remplacera-t-elle aussi la Région aquitaine sur le territoire du Pays Basque? Enfin le calendrier et les étapes pour la création de cette institution devront aussi être évoqués: comment donner voix au chapitre à la population, y aura-t-il une consultation et sur quel périmètre?
L’enjeu de ces débats sera d’arriver à un consensus le plus large possible entre élu(e)s et acteurs divers du territoire, con-dition politique indispensable pour interpeler les nouveaux dirigeants de l’Etat central, sans pour autant produire un projet affadi. Ces débats déjà complexes en eux-mêmes seront donc traversés par des considérations stratégiques sans être exempts d’arrières-pensées politiques. Dans l’hypothèse probable d’une victoire socialiste de nombreuses inconnues de-meurent en effet. En dehors de l’engagement à supprimer le conseiller territorial unique pour le département et la région, le fameux acte III de la décentralisation souvent évoqué reste le grand absent de cette campagne présidentielle. Que produiront les Etats généraux de la démocratie territoriale annoncés par le Sénat pour l’automne et notamment la mission d’étude sur la Corse, la Bretagne et le Pays Basque dont Labazée se dit porteur? Ce dernier ainsi que le président de la Région Aquitaine sont de farouches opposants à toute reconnaissance institutionnelle du Pays Basque et la position officielle des socialistes est toujours le refus de toute évolution majeure. De l’autre coté du spectre politique on voit d’autres opposants récemment convertis pousser à la roue, dénoncer les demi-mesures, caressant de façon à peine voilée les délices d’un refus obtus du futur gouvernement socialiste.
Autant dire qu’au sortir de ces débats la bataille politique principale restera à mener, pour laquelle la réflexion stratégique doit être entamée sans plus attendre. En cas de blocage politique persistant, la consultation de la population deviendra notamment un outil démocratique incontournable.