Ce n’est pas votre serviteur scribouillard mensuel qui niera l’importance stratégique de «faire tourner» l’euro en Iparralde. Nous le savons tous, au niveau d’une collectivité il est aussi possible d’évoquer les termes de «balance commerciale».
Que pourrions nous dire sur les flux entrants? Je me risque dans cet exercice, en essayant de citer, au passage, et, de façon délibérément non exhaustive, les flux auxquels on ne pense pas. Au niveau des salaires, par exemple, tout salaire payé par une société ayant son siège à l’extérieur, tout salaire des fonctionnaires de fonction «régalienne»: policier, enseignant public, etc. Il faut aussi évoquer les retraites, qui participent du phénomène. Sans se cantonner dans les salaires, toute facturation faite à un touriste, à un locataire occasionnel, etc. Et bien entendu tout produit vendu à l’extérieur, ou en interne, pourvu que sa valeur ajoutée dans le territoire (c’est aussi sur ce point que l’exercice est complexe) soit la plus importante possible.
Au niveau des flux sortants? Nous pensons bien entendu tous aux impôts sur revenus, TVA, sociétés et, partiellement sur les impôts locaux (car une partie «revient» chez nous: route, RSA, aides, etc.). Il faut aussi ajouter toute les retenues sociales de tous les salaires (bien qu’une partie revienne lors des maladies, accidents et retraite). Tout achat sur produit ou facturation à une société externe. Tout ou partie d’achat de produit dont la valeur ajoutée est externe: typiquement achat d’équipement électroménager, automobile, grande partie des vêtements, sports ou non, carburants, électricité (à part les initiatives de micro-production, type microcentrale hydraulique, panneaux solaires, par exemple) pour lesquels sur 100 e d’achat, seule une infime partie des salaires d’une partie de la distribution revient au territoire. On voit par là que le champ est vaste.
On devine aussi, que la «liberté d’action» est très très faible, pour un acte d’achat territorial, car le degré du «made in Iparralde» est beaucoup plus faible par exemple que le «made in Euskadi», pour ne citer que cela, et, sans aborder, en ce qui con-cerne ce dernier acteur, la liberté stratégique conférée par l’autonomie conséquente de la compétence économique, enviée, et demandée, à présent par la Catalogne.
Les vitalités du territoire
Les possibilités résident principalement dans l’agroalimentaire. La vitalité, et dernièrement développée, la diversité de l’offre des produits permettent une assurance d’au moins «faire tourner une fois» l’euro. Mais pour ce secteur, tous les modes de distribution ne sont pas identiques. Dans l’ordre de décroissance de «la part de l’euro qui tourne», en haut de l’échelle, on trouve les AOC en vente directe, et, en bas, les grandes distributions qui consentent à ouvrir leurs rayons aux produits partiellement faits ici. Les Amap, Gie, et autres initiatives participent de ces principes.
Un autre type de production, participant de la vitalité du territoire est celle liée aux métiers du bâtiment (rénovation, construction, entretien…) avec une vraie filière organisée (écoles, IsaBTP, etc.), et, une vraie espérance pour les jeunes, cette production fixe l’euro, par ses salariés, investissements et achats (en partie…).
Quatre exemples «à la Prévert»
pour retenir l’euro ici
Poussé à l’extrême, et, sans doute un peu bêtement, il vaut mieux acheter une voiture d’occasion à un ami et la faire réparer par un garagiste proche et indépendant qu’en acheter une neuve. Mais les nouvelles technicités des voitures et les bancs de contrôles contraignent les réparations à être faites par les succursalistes. Ce phénomène est aussi amplifié par la honteuse politique de la pièce détachée.
Ne faites pas ainsi pour la machine à laver, programmée pour durer le temps économique qu’il faut et dont de plus en plus de pièces détachées sont vendues en ensemble non séparable. Tout pousse à acheter neuf. Si vous êtes particulièrement sensible à l’achat territorial, vous disposez en la matière de marques et certaines chaînes de distribution sont plus proches du territoire. Mais nous sommes loin du compte.
Si vous entrez dans un restaurant, dont la part main-d’œuvre dans le prix de revient est importante, un cuisinier ou une serveuse est un emploi, intéressez-vous à ce que le restaurant fasse lui même sa cuisine et ne soit pas un réchauffeur de plats cuisinés. La carte doit être donc simple (pas plus de 3 ou 4 possibilités par plat). Je n’évoque pas ici la grande restauration (vertueuse au sens de l’employabilité des salariés et liée aux flux entrants touristiques).
Si vous êtes maire d’une commune, tentez de gérer par la collectivité vos parkings, votre eau, mais c’est juridiquement de plus en plus complexe (à cause de l’accumulation de la réglementation) au lieu d’en confier la gestion à nos chers monstres modernes (Vinci, Veolia, etc.).