Jean-Roch Guiresse
Peio Olhagaray a succombé à une crise cardiaque le 14 juillet 2020, à l’âge de 61 ans.
Euskaldun, né à Itxassou, Peio était bon marcheur ; il pratiquait les sentiers de la montagne basque, les chemins côtiers, le trecking dans les déserts sablonneux.
Il avait quitté Euskal Herria pour étudier l’économie à Bordeaux, y prendre Marie-Hélène pour épouse et nouer des amitiés authentiques et durables. Admirateur de Patxi Noblia, il rayonna ensuite sur l’Aquitaine pour animer l’Union régionale des scops, alors présidée par Ramuntxo Camblong, président de Copelec, à l’appel duquel il revint en Labourd, en 1992, animateur engagé de la démarche Pays Basque 2010. Puis naquit le Conseil de Développement du Pays Basque, en 1994. Ramuntxo, devenu président de l’Institut Culturel basque, en devint le premier président et Peio le premier Secrétaire Général. Il le resta durant la présidence de Jean-Claude Iriart.
A ce poste Peio se révéla promoteur de diversité d’opinions – par l’éclectisme de ses relations – fin analyste, robuste en diagnostic, bertsulari dans sa dénomination des faiblesses, potentiels, défis sociétaux, pédagogue dans la transmission du savoir. Assurément, il eut de nombreux disciples. Alors que Pays Basque 2010 avait eu besoin de Michel Godet, de François Bourse, Daniel Behar, Martin Vanier … et de Peio Olhagaray, grâce à eux, la prospective ayant démontré son accessibilité et son utilité, de plus en plus de vocations s’affermirent, de plus en plus de compétences prospectivistes s’établirent en Iparralde, qui n’est plus dépendant de lointains consultants. Eclectique, curieux, marcheur et narrateur sont en effet des qualités de pédagogue précurseur; Socrate, Rousseau et bien d’autres en ont témoigné.
Sherpa-pionnier de la pratique prospective, il nous laisse de belles frises à commenter telles :
« Droit – Devoir – Désir » ;
« La Respiration Territoriale, c’est l’inspiration dans les projets puis l’expiration, qui est le discours au monde » ;
«Faire mieux avec autant est notre premier devoir: les gisements sont considérables ! ».
Devenu en 1998 directeur du service Développement économique à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bayonne-Pays Basque, il y a montré sa capacité à allier « penser », « convaincre », « faire et faire faire ». Il y a vécu l’extension territoriale à la Soule, la naissance des Pôles de Compétitivité et Clusters, … et les rigueurs de la RGPP Révision générale des politiques publiques. Il s’est impliqué pour l’installation de Tribord à Hendaye, et pour celle de très nombreuses PME. Son habileté en ingénierie financière et à la mise en relation lui ont valu la confiance de nombreux entrepreneurs et celle de nombreux animateurs économiques, représentant les pouvoirs publics. Il y perfectionna sa définition très subtile du « succès d’une politique publique ».
Un différend avec son employeur mit un terme à sa fonction fin 2016, tranché en sa faveur par la Justice quelques mois plus tard.
Avec son complice préféré Francis Pougnet, notamment, il envisagea alors d’accompagner des Collectivités Régionales et Institutions d’envergure nationale sur des politiques innovantes du Logement. Ce n’était pas choisir la facilité, mais ça répondait très fort; hélas la vie s’est dérobée .
Peio ne cherchait pas à plaire, ne désirait pas les honneurs ; c’était un homme direct, parfois abrupt dans la discussion, mais attentif aux arguments et profondément respectueux des personnes humaines, de leur sincérité et de leur générosité, quelle que soit leur orientation et leur aménité à son égard, puissante ou en détresse, son épouse et lui accompagnant des migrants.
Peio se vivait comme « explorateur » ; il a vécu pleinement comme « innovateur économique et social, croyant en son pays« , prônant la doctrine du « Se prendre en charge en coopération ».
Gageons qu’il inspirera de nouvelles démarches audacieuses en Euskal Herria.
Très bel article Jean-Rock !
Il est complétement fidèle à la trajectoire, à la personnalité et à l’impact de Peio, sur le territoire et les personnes qu’il a côtoyé.