Le 24 mai dernier ont eu lieu les élections provinciales et municipales en Hegoalde. Les résultats appellent trois types de commentaires : en faire d’abord un constat détaillé, en rechercher ensuite les causes, et pointer enfin leurs conséquences. Sans nul doute, les résultats de ces élections ont un impact politique important. Il convient d’en faire une analyse à froid et approfondie, et je ne m’aventurerai ici qu’à quelques premières réflexions.
Pour ce qui des constats tout d’abord. Les résultats sont mauvais pour EH Bildu en Araba, Bizkaia et Gipuzkoa. Le PNV obtient de bons scores, mais la progression en voix n’a lieu qu’en Gipuzkoa. Le PSE baisse en Araba et Bizkaia et se maintient en Gipuzkoa. Podemos réalise de très bons scores dans les trois provinces. Enfin, le PP disparaît quasiment du panorama, sauf en Araba. En Navarre, les résultats sont satisfaisants pour EH Bildu, et très positifs pour Geroa Bai et Podemos. Les partis de “l’ancien régime”, UPN et PSN, ont perdu la majorité au parlement, et à la mairie d’Irunea.
Voici un premier constat loin d’être suffisant pour comprendre dans le détail la réalité des comportements électoraux.
Nécessité d’une réflexion de fond
En tout état de cause, la perte de voix d’EH Bildu a deux sources: un report vers le PNV et l’irruption de Podemos sur la scène politique. Pour ce qui est des causes, il est nécessaire maintenant qu’une réflexion de fond ait lieu au sein d’EH Bildu, afin de réaliser un bilan sans concession, et de redresser ce qui doit l’être. Mais au moment d’aborder les causes, il convient de formuler une question préalable. Les très bons scores d’EH Bildu en 2011 étaient dopés par l’annonce du changement de stratégie de la gauche abertzale. Les mauvais scores de 2015 signifient-ils une sanction tendant à remettre en cause ce changement de stratégie, pour réclamer un retour en arrière dans cette stratégie ? Je n’y crois pas du tout. Je pense plutôt qu’il y a une critique, non sur la nouvelle stratégie ellemême, mais sur les modalités de mise en oeuvre de cette stratégie.
Il faut alors arriver à distinguer ce qui relève du plan politique global, de ce qui concerne la remise en cause du mode de gestion des institutions par EH Bildu. Pour ma part, je crois qu’il faut pointer trois éléments de réflexion. Premièrement, en ce qui concerne la gestion des institutions, EH Bildu n’a pas été perçue comme une force alternative crédible à l’écoute de la population. Secundo, au niveau du contexte politique global, le blocage du processus de résolution du conflit a installé dans la bases sociales d’EH Bildu un climat morose, mais je pense que la problématique est beaucoup plus large. Dans le cadre d’une grave crise économique, le projet souverainiste basque de gauche doit arriver à convaincre de larges couches de la population (bien au delà du spectre abertzale) qu’il constitue une véritable alternative sociale, et ce, par le biais de dynamiques sociales et pas seulement institutionnelles.
Maintenir la diversité au sein d’EH Bildu
L’un dans l’autre, la pilule est dure à avaler : l’avancée du processus de résolution est pour nous la priorité des priorités, mais la majeure partie de la société attend de nous d’incarner une alternative crédible face à ses problèmes quotidiens en matière économique et sociale. Tertio, cette capacité à incarner une force souverainiste de gauche crédible tient en partie au fonctionnement du front large que doit rester EH Bildu. A cet égard, sa diversité doit être maintenue, et étant donné les sources de pertes de voix du côté d’EA et de Podemos, il est indispensable que les sensibilités d’EA et d’Alternatiba continuent d’exister et d’être clairement audibles au sein d’EH Bildu. Pour finir, quelques mots sur les conséquences de ces résultats.
EH Bildu continue d’être la seconde force politique en Hegoalde, mais le PNV s’est réaffirmé en tant que la force abertzale crédible en matière de gestion des institutions. Disons-le clairement, cela ne va pas favoriser l’avancée du processus de paix, et la libération des preso.
Cela n’est pas non plus positif pour la bataille du droit à l’autodétermination, car le PNV d’Urkullu cherche à formaliser un nouveau pacte de transition avec le pouvoir madrilène qui ne serait qu’une simple rénovation du statut d’autonomie de Gernika. Aux côtés du processus de paix et du droit à l’autodétermination, la problématique de la territorialité constitue l’autre noeud gordien en Euskal Herria. Sur ce registre par contre, on ne peut que se féliciter des résultats en Navarre, et du fait que l’UPN et le PSN soient les perdants de ces élections. Deux abertzale euskaldun devraient prendre les rênes du gouvernement navarrais et de la mairie d’Irunea.
C’est une avancée historique sur la question de la territorialité, qui est selon moi à mettre en parallèle avec les bons résultats d’EH Bai en Iparralde.
Tout n’est donc pas totalement négatif, le combat continue : segi aitzina, irabazi arte !
Xabi Larralde a ecrit: ‘il est indispensable que les sensibilités d’EA et d’Alternatiba continuent d’exister et d’être clairement audibles au sein d’EH Bildu.’
Et la sensibilité d’Aralar aussi, j’ajoute
Egunon,
je ne comprends pas très bien ces premières réflexions sans les résultats.
En Guipuzkoa, PNV 30.98 %, EH BILDU 29.87 %, IRABAZI (Podemos) 4.95 %.
En Biscaye, PNV 37.83 %, EH BILDU 19.85 %, IRABAZI 2.32 %
Pourquoi vous considérez que ce sont de mauvais résultats pour EH Bildu ? Et bons pour le PNV ? Quel était les chiffres en 2011 ?
De plus, pourquoi avec de si faibles résultats il est écrit que Podemos fait de bons résultats ? Peut être que je me suis trompée : Irabazi n’est pas Podemos ?
Merci pour votre réponse
Effectivement, l’article de Xabi Larralde manque un peu de recul. En revanche, dans l’article d’Ellande Duny-Pétré, vous trouverez une analyse plus approfondie et comparée. Il montre très bien que le score d’EH Bildu est loin d’être une déroute, le nombre des députés EH Bildu par rapport à ceux du PNV en Gipuzkoa s’est joué à une poignée de voix (300 environ) dans la zone Donostialdea
Effectivement, l’article de Duny-Pétré est bien meilleur et moins partisan, notamment les explications du recul de EHBildu en Guipuzkoa, : « difficulté à passer d’une culture d’opposition radicale aux réalités ingrates de la gestion quotidienne, […] »
Merci
Au vu des résultats excellents pour EH Bildu et magnifiques pour PNV, il me semble que le bilan fait part Larralde n’est pas juste. Les abertzale seront au pouvoir dans les quatre provinces du sud ! Il faudrait arrêter de percevoir le Pays Basque depuis le Gipuzkoa. L’arbre du Gipuzkoa ne doit pas cacher la forêt de Navarre. Les résultats en Navarre ont été historiques pour EH Bildu. Rappelons que c’est le parti qui a le plus d’élus municipaux en Navarre! Et que Pampelune, oui Iruña, aura un maire d’EH Bildu !