Par Michel ETCHEBEST
Je lis attentivement toutes les réflexions de Pantxoa Bimboire qui cherchent à vulgariser les arcanes d’une économie si complexe aux yeux de beaucoup et pourtant essentielle à toute collectivité qui veut maîtriser un tant soit peu son avenir.
Dans le numéro de Mai, Pantxoa amène le sujet de l’ « après création de l’EPCI », avec des compétences limitées, avec la crainte que le soufflé ne retombe après la création de cet outil tant attendu par la communauté économique, et imaginant même que « l’hégémonie des services de l’ACBA serait catastrophique ».
Pour ma part, le questionnement, s’il est logique dans un entre-deux qui nous projette vers une nouvelle dimension, doit être posé d’une façon différente me semble-t-il.
Compétence générale
Au sujet de la remarque sur les compétences limitées : les communes, comme leur regroupements (EPCI) ont une capacité d’intervention générale, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une énumération de ces attributions. C’est la clause de compétence générale.
En fait, et contrairement aux régions et Départements, l’EPCI pourra se saisir de tout sujet ayant trait à l’intérêt public local sans devoir en justifier outre mesure. Et le champ d’action potentiel est tellement large que je crains même que nous ne sachions complètement noircir les pages blanches qui se présentent à nous, d’autant plus que compétence doit rimer avec financement…
Fonctionner avec le collectif
Autre changement à venir, il faut aussi intégrer que demain l’acronyme ACBA disparaitra tout comme disparaitront les mots Errobi ou Sud Pays Basque ou.. etc. et que nous parlerons de Bayonne, de Menditte ou de Sare, et de leurs bassins de vie. Se retrouveront ainsi autour de la « grande table » les représentants des 158 communes du Pays Basque, chacune avec ses spécificités. Et je ne connais pas d’EPCI dont une partie du territoire serait oubliée ou malmenée alors qu’une autre partie serait florissante.
Par expérience, et les EPCI anciennes l’ont vécu pour la plupart, si une commune, pour des raisons qui lui sont propres, ne veut pas fonctionner avec le collectif, la politique générale de l’EPCI s’applique et vaut de manière égalitaire pour tous les habitants du territoire.
C’est là qu’effectivement, le « fait communautaire » est important. Les élus de l’EPCI devront réfléchir et agir pour le bien du territoire qu’ils gouvernent, et j’imagine bien que tout élu qui demandera 3 fois où est le retour direct d’une décision pour sa commune se disqualifiera tout seul. Et oui, passer de sa table à la « grande table », ce sera cela. Porter une analyse pour tout le territoire pour le meilleur pour tous.
Développement harmonieux et équilibré sur le territoire de l’EPCI
Reste donc la question du développement harmonieux et équilibré sur le territoire de l’EPCI . Et le mot développement vient après le préalable incontournable qui veut que l’ensemble de la population du territoire se verra tout d’abord garantir les services à la personne, de base, tels que la collecte des déchets, les services à la petite enfance et aux personnes âgées, la proximité d’une piscine, l’accès à la culture, l’accès au très haut-débit numérique, un service de transport adapté, etc.
Cela relèvera de la gestion au niveau SIVOM, au plus près du citoyen donc, soit par des décisions prises localement, soit pas décentralisation de décisions prises au niveau Pays Basque. Et le travail d’Hasparren a pu démontrer que les écarts de niveau de service entre territoires sont faibles et que la convergence sera rapide et aisée.
Le développement harmonieux du territoire, celui qui va faire que chaque bassin de vie sera vivant et offrira un avenir à ses jeunes, relève lui d’une alchimie plus complexe, dans laquelle se mixeront développement économique, questions d’habitat, d’infrastructures et d’image du territoire etc…
Travailler là où on habite et habiter là où on travaille
C’est le concept de travailler là où on habite et d’habiter là où on travaille. Il est d’ailleurs intéressant de se poser cette question à l’aune des questions de déplacement et de bilan carbone, de coût de l’immobilier et de l’accueil de nos jeunes, ou encore du maillage agricole ou bien encore des zones en déprise démographique par exemple. Tout autant de déséquilibres qui demanderont une analyse transversale, et aussi une vision et un courage politique certains, pour imaginer revenir à un équilibre plus vivable pour tous.
Qui fait quoi ?
Alors bien sûr, se pose ensuite la question de qui fait quoi ? Qui est capable de, ou a envie de… Car la primauté du politique si elle est totale, encore faut-il qu’elle soit exercée. Et c’est dans le cas où il y aurait carence seulement que l’on peut se poser la question du poids de l’équipe technique. Car les techniciens de la future EPCI seront là et fonctionneront, quoiqu’il se passe, qu’ils reçoivent des commandes précises des élus ou pas.
Envie de faire ensemble et réflexion territoriale globale
Mais je dirais que ce point ne m’inquiète pas. Le vote des communes m’amène à dire que notre territoire compte dans ses rangs beaucoup de responsables imprégnés du bien commun, qui ont une forte envie de faire ensemble et qui ont une réflexion territoriale globale.
Car il est remarquable de constater cette majorité de votes au 2/3 pour cet EPCI ! Peu d’élus sont élus aussi confortablement chez eux non ?
De la compétition à la collaboration
Peut-être verra-t-on arriver des discours politiques et partisans, mais, que je sache, chaque parti, s’il doit influer sur la politique de l’EPCI, devra dans tous les cas entendre l’avis de ses propres élus qui sont répartis…. sur tout le territoire. Je n’imagine même pas d’antagonisme côte/intérieur, puisque la compétition fera place à la collaboration. J’imagine plutôt des accords par projets, transverses aux partis politiques.
Mais pour enfoncer un petit peu le clou tout de même, je pense que chaque bassin de vie devra avoir sa propre réflexion et sa propre analyse et contribution à remonter éventuellement au niveau Pays Basque. Si comme je le vois poindre, il y aura des élus ayant une vision transversale, cela n’exonèrera pas chaque bassin de vie de repérer les terrains constructibles économiques, de porter des réflexions et de mûrir des propositions et projets, de travailler à ses petites différences, à son animation, au soutien à telle ou telle initiative etc.
Car tout comme aujourd’hui il y a des communes plus ou moins dynamiques tout en étant au sein du même EPCI, demain la vitalité de chaque bassin de vie, au niveau animation et vie locale, va dépendre… de lui-même. Et dans la même veine, la somme des budgets des EPCI actuels fait 100 et non 110 ou 120 comme certains pourraient le croire.
On ne rasera pas gratis demain, et la nécessité de saine gestion s’imposera à tous, et c’est bien normal.
Potentialisation de l’image et de l’identité de notre territoire
Par contre, là où je vois l’intérêt majeur de notre regroupement, c’est la potentialisation de l’image et de l’identité de notre territoire, au niveau économique tout d’abord.
Tant de chantiers sont à ouvrir qui concernent pèle mêle un développement durable, l’enseignement supérieur et la recherche, la politique foncière et d’habitat, les transports, la gestion des déchets et du cycle de l’eau, les circuits courts de distribution, le renouvellement agricole, les énergies renouvelables, l’industrie, le tourisme, la participation de la société civile à la réflexion etc.
Nous avons de plus l’immense chance, avec Euskadi, d’avoir pour voisin un des territoires dont l’Indice de Développement Humain est le plus haut du monde, bien dessus du niveau moyen France ou Espagne. Imaginer s’en approcher serait un beau programme de développement en soi.
Comme je le disais, un bien beau projet avec beaucoup de pages blanches à noircir ensemble, rassemblés autour de la « grande table » du Pays Basque.
se rassembler autour de la « grande table »…. magnifique projet. Zorionak!