Le souci de faire participer le plus directement le citoyen à la gouvernance de l’Agglomération Pays Basque devrait animer les abertzale dans l’élaboration de leur engagement aux municipales de l’an prochain. Éclairage sur le concept fédéraliste de “subsidiarité”.
La création de la Communauté Pays Basque (CAPB) a supposé la dissolution des 10 anciennes intercommunalités d’Iparralde, et leur fusion dans un nouvel ensemble. Ce processus qui nécessitait aussi la prise en charge d’un nouveau périmètre de compétences n’était pas évident en soi à mettre en oeuvre, et il est remarquable qu’il ait été géré en assurant la continuité du service public. Aujourd’hui, il faut franchir une nouvelle étape qui est celle d’une organisation interne la plus décentralisée possible.
C’est en effet dans ce sens qu’abondent plusieurs initiatives qui ont vu le jour ces derniers mois. La première est celle de l’Audit citoyen mené par Batera.
Une initiative remarquable qui a débouché sur 27 préconisations pour améliorer le fonctionnement de la Communauté Pays Basque.
La seconde est celle d’EH BAI qui a rendu public récemment une proposition visant à l’élaboration d’un nouveau pacte de gouvernance. L’idée maîtresse de cette proposition est de garantir la prise en compte de la diversité des territoires qui composent la CAPB.
Enfin, un groupe de maires de tous bords est en train de solliciter la signature de ses congénères autour d’une contribution au projet communautaire de la CAPB.
Le premier grand principe que souligne cette contribution est celui de “subsidiarité”. Un concept tout à fait pertinent et incontournable dans le débat actuel. Mais un concept qui reste tout de même un concept d’initiés… Sa définition fait apparaître que la subsidiarité implique de positionner la gestion des politiques publiques à l’échelon le plus proche des citoyen-n-es. Cela paraît assez trivial, mais la mise en oeuvre technique de ce principe se heurte à des problématiques assez redoutables. En ce qui concerne Iparralde, elle suppose notamment de construire une véritable complémentarité entre l’urbain et le rural. Et il faut dire que le mode de pensée jacobin qui a pour tendance systématique d’appréhender la gestion des grands ensembles par la centralisation ne nous y aide guère. Quoi qu’il en soit, la difficulté principale de l’exercice reste d’ordre politique.
La première étape est celle d’une vision politique partagée autour du diagnostic. S’il existe un accord politique sur la nature du problème à régler, un consensus peut aussi émerger sur la nature des solutions à y apporter. A partir de là, les modalités pratiques de ces dernières devraient normalement pouvoir être imaginées… A ce jour, il semble qu’il y ait un consensus sur une partie du diagnostic : il est nécessaire de contrecarrer les tendances au fonctionnement centralisé de la CAPB, car elles créent des tensions légitimes qui peuvent mettre en péril la pérennité même du pas franchi avec cette première institution. Maintenant, en revenant à sa définition, si la subsidiarité vise à rapprocher au maximum les lieux de pouvoirs des citoyens, elle apparaît comme étant l’une des caractéristiques d’un fonctionnement démocratique.
Déficits démocratiques
De ce point de vue, le diagnostic sur les difficultés de fonctionnement de la CAPB doit être élargi à une problématique plus générale qui est celle des déficits démocratiques qu’il peut engendrer. En particulier, dans ce débat il ne faut pas oublier le problème posé par l’absence d’un vote direct des représentants de la CAPB par les citoyen-ne-s.
Le diagnostic sur les difficultés de fonctionnement de la CAPB
doit être élargi à une problématique plus générale
qui est celle des déficits démocratiques.
En particulier, il ne faut pas oublier
le problème posé par l’absence d’un vote direct
des représentants de la CAPB par les citoyen-ne-s.
C’est pour cela que tout nouveau pacte de gouvernance ayant pour horizon un fonctionnement institutionnel le plus démocratique possible pour Iparralde doit revendiquer le passage à une collectivité territoriale.
D’autre part, en revenant sur la généalogie du concept, il est assez cocasse de remarquer que deux figures aux options politiques sûrement diamétralement opposées ont plus particulièrement contribué à sa postérité : d’un côté, un philosophe calviniste allemand, Johannes Althusius (1563-1638), et de l’autre, un anarchiste français, Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865).
Les discours affirmant que le clivage gauche/droite est révolu ont tendance à m’agacer, mais force est de constater que la subsidiarité n’est ni de droite, ni de gauche…
A la veille des élections de 2020, on est donc en droit d’espérer que le débat sur la subsidiarité en Iparralde reste honnête, et ne fasse pas l’objet de visées de politique politicienne.
Enfin, la forme même du débat doit être en conformité avec son objet. La problématique ayant trait à une amélioration du fonctionnement démocratique, il est important d’éviter un débat d’initiés, et, autant que possible, d’associer au-delà du cercle d’élus, un maximum de citoyen-ne-s. Dans cette perspective, on mesure tout l’intérêt de la démarche entreprise par Batera ces derniers mois.