Jean-Daniel Elichiry, Artisans de la Paix
Mixel possédait cette qualité indispensable à la réalisation d’un projet : la pensée stratégique. La conviction ne suffit pas.
1- Ni punis, ni soumis : la prise de risque pour la paix.
Le 17 décembre 2016, je prends connaissance de l’action menée à Louhossoa. Qui me surprend par son audace et la personnalité de ses auteurs, peu suspects d’impétuosité et d’agissement irréfléchis. Ou comment créer l’événement afin de susciter un débat en place publique. Je n’ai encore jamais rencontré Mixel. Quelques jours après, je suis invité à rejoindre le mouvement des Artisans de la Paix qui se structure au côté de l’association Bake Bidea. C’est lors de nos réunions qui vont se succéder, avant et après le 8 avril 2017, que je vais découvrir peu à peu Mixel et que je vais en apprécier les multiples qualités (dont son humour…). Nous avons en commun d’être tous deux des militants engagés depuis plusieurs décennies, lui dans le syndicalisme agricole et moi dans l’action sociale. Notre choix de vie prend racine, dans notre jeunesse, au sein du MRJC, inspirés notamment par Don Hélder Camara, l’“évèque des bidonvilles”, opposant à la dictature militaire des années 60 à 80 au Brésil : “Lorsque l’on rêve seul, ce n’est qu’un rêve. Lorsque nous rêvons ensemble, c’est le commencement de la réalité”.
2- La graine et le projet.
Mixel possédait cette qualité indispensable à la réalisation d’un projet : la pensée stratégique. La conviction ne suffit pas. Mixel était un stratège, sachant transformer la chronique d’un échec annoncé en récit d’une issue trouvée grâce à la détermination, la ténacité, la persévérance dont il faisait preuve dans ses actions. Il savait laisser ouverte une fenêtre pour le “Kairos” (l’opportunité), la négociation dans l’action sans jamais abdiquer du but animant le projet. Il ne pratiquait pas la grammaire du courtisan avec les hommes et les femmes “de pouvoir” : sujet, verbe, compliment. Être libre, c’est ne plus avoir peur. A un texte, que je lui avais envoyé et qui traite de Justice d’exception et de libertés démocratiques, il me répondait fin août 2020 : “C’est vrai que la soumission bienveillante, l’asservissement accepté, voire volontaire, voire même réclamé : c’est actuellement le sens de la pente (…) Si on n’y résiste pas, on se fait embarquer tous, insidieusement…Y résister, c’est un effort permanent”. Après sa terre Michel a su cultiver le champ des Artisans : celui de la paix où il aura semé ce qui a nourri sa conviction que la non-violence est une arme de persuasion massive, que notre avenir (et celui de nos enfants) en EH ne peut se construire sur l’amnésie du conflit vécu, des souffrances encore vivaces, des dialogues impossibles.