Dix-huit personnes d’Iparralde ont assisté pendant deux jours au XVe congrès d’ELA. Composée de responsables de Bizi, Alda, Fondation Manu Robles-Arangiz ou EHLG, la délégation a également bénéficié d’une session spécifique de présentation d’ELA. Cette formation a porté sur l’histoire du syndicat âgé de 110 ans, qui a régulièrement su se renouveler, rajeunir ses cadres, féminiser sa base et désormais sa direction (parité désormais atteinte à l’exécutif, autrefois exclusivement masculin) et comité national désormais majoritairement composé de femmes.
Organisation de masse, radicale et pragmatique
Elle a également été l’occasion d’expliquer dans le détail comment une telle organisation de masse construit et gère au quotidien une ligne radicalo-pragmatique. Avec une base composée d’adhérents travaillant dans le bâtiment ou le pétrole, pouvant compter des électeurs du PSOE ou du PP, comment se gèrent les inévitables contradictions que suppose un engagement anti-nucléaire, pro-climat, opposés aux grands projets de type LGV, incinérateur, méga-port ou extraction de gaz de schiste, ou encore l’adoption lors de ce congrès d’un positionnement en faveur d’une république basque indépendante et souveraine ? Cette république basque est, dans ce contexte de crise capitaliste et de changement climatique, comprise dans un projet de décentralisation et de relocalisation de la production, un projet de transition écologique, de solidarité nationale et internationale, visant les souverainetés réelles (alimentaires, énergétique, technologique…) et assumant les interdépendances globales de chaque communauté.
Un syndicat en mue constante
ELA planifie à moyen et long terme ses évolutions et elles peuvent se mesurer congrès après congrès. Quand des choix stratégiques sont faits, cela se remarque nettement dans la pratique du syndicat au fur et à mesure des années qui passent. ELA s’était engagé à travailler à la normalisation de l’euskara au sein du syndicat (ce fut la langue de 90 % des interventions de ce congrès) et des entreprises ; à devenir un syndicat féministe (marqueur omniprésent de ces deux journées, mais également des grèves des dernières années), à augmenter son autonomie financière, garantissant ainsi son indépendance à l’égard des pouvoirs publics (son taux d’autofinancement par ses cotisations et rentrées propres est passé de 85,72% en 2007 à 93,70 % en 2021).
Ce congrès a été l’occasion de réaffirmer un autre pari stratégique d’ELA : devenir le syndicat des plus précaires, en orientant de plus en plus ses ressources et moyens humains, matériels et économiques globaux vers les secteurs professionnels les plus précarisés – souvent les plus féminins et où l’immigration est proportionnellement plus représentée- et les moins syndiqués. Ce pari est rendu possible par la structuration très confédérale d’ELA. Les cotisations sont versées à la confédération et pas aux fédérations professionnelles, et les permanents, locaux, moyens divers sont avant tout, voire uniquement, confédéraux, à l’inverse du syndicalisme tel qu’on le connaît en France.