Un temps plateforme électorale commune aux trois partis abertzale de gauche d’iparralde, EH Bai s’organise peu à peu en une structure dynamique fédérant une vingtaine de sections locales. L’Assemblée générale du 27 juin à Macaye a défini cette architecture et décidé de ne pas se présenter aux elections régionales de décembre prochain.
Il avait été considéré que le nouveau fonctionnement
ne serait que transitionnel et que cettedeuxième assemblée de juin
servirait à le peaufiner.
C’est chose faite et l’on peut considérer qu’EH Bai
est désormais en ordre de marche au quotidien.
Samedi 27 juin s’est déroulée la deuxième assemblée générale d’Euskal Herria Bai, au mur à gauche de Macaye, par une moite matinée d’été. N’étant plus porte-parole d’EH Bai, ni même délégué de mon groupe local luzien, c’est en simple adhérent que je livre ici mes impressions.
Ambiance
La première chose qui m’a sauté aux yeux, c’est l’assistance. Le nombre, d’abord. La salle attenante au mur à gauche était pleine comme un oeuf, alors qu’une telle réunion programmée la veille des grandes torpeurs estivales, en outre quasiment au lendemain de la campagne des départementales, eût pu laisser craindre l’absentéisme. La mixité générationnelle, ensuite. Quel plaisir de pouvoir observer une assistance mêlant crânes dégarnis ou grisonnants, quadra et quinquas relativement habituels, et de nombreux jeunes qui pour beaucoup n’avaient jamais participé à une assemblée générale de mouvement politique… Pour ma part, malgré les quelques années figurant maintenant à mon compteur militant, j’ai été surpris du nombre de gens que je ne connaissais ni d’Aitor ni de Mari – ne cherchez pas à savoir si la correspondance avec Adam et Eve est exacte, c’est juste pour le bon mot – et cela me paraît être un bon signe. La pluralité politique, enfin. Membres d’AB, d’EA, de Sortu, non encartés de toutes tendances actuelles ou plus anciennes, de cultures politiques diverses… on peut considérer que la famille de la gauche aberzale d’Iparralde était une nouvelle fois rassemblée après le congrès de décembre dernier. On pouvait craindre que l’enthousiasme de la nouveauté profitât à la première assemblée pour manquer à la deuxième, d’autant plus que l’ordre du jour paraissait passablement rébarbatif (enjeux de structuration interne et élections régionales) ; or il n’en fut rien. Au-delà de cela, le déroulement de la réunion a lui aussi donné une image plaisante. Bien sûr, une assemblée abertzale reste une assemblée abertzale, avec parfois sa joyeuse pagaille, ses retards à l’allumage et ses prises de parole d’un académisme parfois flexible. Mais le fait est que pour une formation politique encore à l’aube de sa structuration et devant en étudier certains de ses aspects les plus délicats, les débats se sont déroulés dans la plus grande sérénité, les avis les plus tranchés ne donnant lieu à aucun de ces psychodrames toujours à craindre dans un microcosme militant. Si l’histoire du mouvement abertzale ne conservera probablement que les données factuelles, la nature des décisions prises et leurs conséquences à plus ou moins long terme, qu’il soit donc au moins une fois dit qu’EH Bai, en sa deuxième assemblée générale, est bel et bien un mouvement
serein et uni.
Le premier étage de la fusée
Outre son ambiance, cette assemblée avait également la lourde charge de clôturer la première phase de la création du mouvement EH Bai. Cette première phase —rappelons- le— avait débuté l’an dernier avec le lancement du processus de mutation de cette coalition de trois partis politiques en un mouvement à la fois large et pérenne. Sur la base de réflexions “à la base”, abordant tout à la fois les questions de structuration et de fondements idéologiques, la première assemblée générale de décembre avait adopté les grands principes. Dans la masse des points à traiter, certains d’entre eux étant restés en suspens et les élections départementales survenant trois mois après, il avait été considéré que le nouveau fonctionnement ne serait que transitionnel et que cette deuxième assemblée de juin servirait à le peaufiner. C’est chose faite et l’on peut considérer qu’EH Bai est désormais en ordre de marche au quotidien. Bien sûr, les règles de base du vivre-ensemble sont connues mais reste encore à apprendre à les décliner à chaque échelle. On l’a vu, le fonctionnement des groupes locaux reste à améliorer, en bonne articulation avec les groupes municipaux voire intercommunaux. Les liens entre ces groupes, la coordination de leurs délégué-es et le secrétariat sont encore à fluidifier. L’application au quotidien de certains principes généraux tels que la parité ou le besoin d’une autonomisation progressive –notamment humaine et financière– vis-à-vis des trois partis qui à l’heure actuelle le font vivre, est encore un processus que le nouveau mouvement mènera avec le temps. D’aucuns pourraient regretter que cela n’aille pas plus vite, mais rien de bon ne naît jamais dans l’urgence et le concept de maturation ne vaut pas que pour le vin ou le fromage.
Peser politiquement
La machine est donc en marche, reste à la diriger sur de bons rails. Alors même qu’elle était en chantier au plan de sa structuration, elle a déjà frappé un grand coup au plan électoral lors des dernières départementales. Les mois qui viennent lui apporteront autant d’occasions de confirmer son rôle moteur des grandes batailles de ce territoire, en particulier autour de l’institution. Le moment de vérité approche et c’est bien lui qui a largement conditionné la stratégie adoptée en vue des élections régionales de décembre prochain : “appelons à voter blanc au scrutin régional et consacrons plutôt toutes nos forces à la bataille institutionnelle”, c’est en gros la logique suivie. Que ce choix ne me paraisse pas le meilleur importe peu, il est évident pour tout le monde que le grand enjeu de l’heure ne se situera pas dans l’urne mais en dehors, et que c’est bel et bien là que se révèleront les vertus d’une structuration durable et efficace au regard de la capacité d’EH Bai à peser sur politiquement, notamment au sein des conseils municipaux. Où en serons-nous dans un an, bien malin celui qui le prédira, mais je suis convaincu que les assemblées de décembre et juin auront été des gages majeurs de cet avenir, s’il se révèle radieux.